La résistance aux antibiotiques et le risque de transmission à partir des animaux et des aliments d’origine animale.


Introduction

La résistance antimicrobienne est un phénomène naturel:
certaines familles bactériennes sont intrinsèquement résistantes à une ou plusieurs classes d’antibiotiques (par exemple les Enterobacteriaceae envers les macrolides et les lincosamides), d’autres bactéries peuvent acquérir la résistance suite à des mutations occasionnelles et/ou à l’acquisition de matériel génétique par transmission horizontale, dont la conjugaison est le plus fréquent. L’utilisation des antibiotiques engendre une pression de sélection qui favorise les bactéries résistantes par rapport aux souches sensibles. La conséquence de la résistance antimicrobienne est la réduction ou la perte d’efficacité d’une ou plusieurs molécules du répertoire thérapeutique. Les conséquences sont graves pour la santé publique et animale. L’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS), l’Organisation Mondiale pour la Santé Animale (OIE) et l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) travaillent conjointement sur la base du principe « Une seule santé » (Figure 1).


Figure 1 : Infographique réalisé par l’OMS reprenant les causes à la base de la résistance aux antibiotiques en médecine et en médecine vétérinaire.

En février 2017, l’OMS a publié une liste «d’agents pathogènes prioritaires» résistants aux antibiotiques, avec les 12 familles de bactéries les plus menaçantes pour la santé humaine et pour lesquelles le développement de nouveaux antibiotiques est le plus urgent pour la santé publique (1). Dans la liste on y retrouve des bactéries pathogènes pour l’homme et des agents de zoonose classés en critiques et prioritaires. Il s’agit donc d’un signal supplémentaire de l’importance d’une approche globale et « une seule santé » dans la lutte à l’antibiorésistance. Parmi les plus critiques on y retrouve des bactéries résistantes et multirésistantes qui constituent une menace particulière dans les hôpitaux, les maisons de retraite ou pour les patients avec cathéters sanguins (à titre d’exemple Klebsiella pneumoniae et Escherichia coli résistants aux céphalosporines de troisième génération). Des agents zoonotiques comme Campylobacter et Salmonella spp. résistants aux fluoroquinolones sont classés dans le deuxième groupe en termes de priorité (1). 

En Belgique le Centre de connaissance sur l’utilisation et la résistance aux antibiotiques chez les animaux (AMCRA), une asbl agréée par l’Agence Fédérale pour la Sécurité de la Chaine Alimentaire (AFSCA) et l’Agence Fédérale pour les Médicaments et les Produits de Santé (AFMPS), dont la mission est de réduire de manière durable l’utilisation des antibiotiques en médecine vétérinaire et d’améliorer ainsi la santé humaine et animale et le bien-être animal, a un rôle central d’avis et de sensibilisation pour toutes les parties prenantes en médecine vétérinaire (www.amcra.be). A titre d’exemple, l’AMCRA a développé des lignes directrices à l’attention des vétérinaires pour un choix éclairé en antibiothérapie (www.e-vademecum.be). Ces recommandations tiennent compte de la priorisation des antibiotiques en santé humaine et animale, réalisée par l’OMS, le Conseil Supérieur de Santé aux Pays Bas et l’OIE. Elles ont été rédigées tant pour les animaux de rente que pour les animaux de compagnie, dont le chat, le chien et le cheval. 

La résistance aux antibiotiques peut se développer autant chez l’homme que chez les animaux. La classe d’antibiotique, la voie d’administration, la dose, la durée du traitement utilisées sont des facteurs qui influencent le développement des résistances. Les gènes de résistance peuvent être transférés de manière horizontale, entre bactéries appartenant à la même famille ou à familles différentes, ou verticale (explication de la transmission verticale). La transmission des bactéries résistantes est un phénomène très complexe qui repose sur  un écosystème caractérisé par des contacts et des échanges continus entre l’homme, les animaux et l’environnement (2). Une représentation simplifiée des multiples et potentielles voies de transmission est montrée dans la figure 2. La complexité de l’écosystème et des échanges qui existent entre les compartiments écologiques augmente la difficulté de quantifier le risque associé à chacun des réservoirs potentiels de bactéries résistantes. La transmission peut survenir par contact direct, indirect via la contamination environnementale ou la consommation d’aliments et eaux contaminés. Des préoccupations existent à propos du rôle joué par les animaux et en particulier par les animaux producteurs de denrées alimentaires et leurs produits dans la transmission à l’homme et la diffusion dans l’environnement des résistances aux antibiotiques. Dans une étude récente, une revue systématique à large échelle a été réalisé afin d’examiner l’association entre l’application de mesures restrictives d’utilisation d’antibiotiques en élevage et la prévalence de l’antibiorésistance chez les animaux et l’homme (3).

Une relation étroite a été mise en évidence entre utilisation et niveau de résistance chez les animaux d’élevage et les personnes en contact direct avec ces animaux (3). Il s’agit d’un résultat très intéressant qui souligne l’importance du contact direct dans la transmission des bactéries résistantes avec un risque plus élevé pour certaines catégories professionnelles (éleveurs, vétérinaires, travailleurs d’abattoir…). Un risque accru a été mis en évidence par exemple chez les éleveurs porcins par rapport à la transmission de Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) (4). L’importance du contact direct dans la transmission de certaines formes de résistance souligne le rôle central des mesures de prévention, telles que l’hygiène, le nettoyage et la désinfection. Sur la base de la méta-analyse réalisée dans l’étude de Tang et collaborateurs, l’occurrence des résistances dans la population  doit être expliquée par d’autres facteurs que l’utilisation des antibiotiques chez les animaux producteurs de denrées alimentaires (3).

Figure 2 :  Voies de transmission potentielles des bactéries résistantes (flèches oranges) selon Harbarth et al. 2015. Schématiquement les voies suivantes sont représentées ci-dessus : 1) l’eau contaminée par les effluents de provenance des hôpitaux et des communautés, est la source de contamination potentielle d’animaux ou personnes en contact avec le milieu aquatique; 2) les cultures et les sols peuvent être contaminé par les produits d’élevages utilisés dans la fertilisation; 3) le sol contaminé peut être également à l’origine de la contamination de l’eau; les végétaux (4), les produits alimentaires d’origine animale (5) et l’eau (6) sont toutes des sources potentielles de contamination pour l’homme; 7) la faune sauvage peut se contaminer par contact direct avec d’autres animaux ou par la consommation d’eau, végétaux ou autres produits contaminés. 

Plusieurs études ont été réalisés afin de définir la relation sur base moléculaire des bactéries résistantes isolées chez l’homme et les animaux. La caractérisation moléculaire des souches est un des outils les plus performants pour tracer les liens entre espèces qui hébergent les mêmes bactéries résistantes. En effet la caractérisation phénotypique permet uniquement de constater que des souches isolées chez l’homme et les animaux sont résistantes aux mêmes classes d’antibiotiques mais aucune conclusion ne peut être tirée par rapport au réservoir principal de la résistance. 

Dans l’étude de Dorado-García et collaborateurs une analyse moléculaire a été réalisée à partir de souches d’Escherichia coli producteurs de béta-lactamases à spectre étendu (BLSE) et de céphalosporinases (AmpC) (5). Les souches ont été prélevées aux Pays-Bas à partir d’animaux, aliments, prélèvements environnementaux et chez l’homme (avec une différenciation entre la population générale et les personnes avec contacts professionnels avec les animaux de rente). En fonction du réservoir examiné, des gènes BLSE/AmpC prédominants ont été identifiés. Néanmoins dans la comparaison souches animales-humaines, une similarité élevée a été identifié entre les souches provenant des personnes avec contacts professionnels avec les animaux de rente et les animaux producteurs de denrées alimentaires. Ce résultat s’aligne avec les observations dérivant de la méta-analyse réalisée par Tang et collaborateurs (3). Les souches E. coli BLSE/AmpC isolées de la population générale avaient une similarité plus élevée avec les souches isolées chez les personnes hospitalisées, les prélèvements environnementaux et les oiseaux sauvages. De plus, la diversité des souches retrouvées dans la population générale était la plus importante en comparaison aux autres réservoirs, ce qui témoigne ultérieurement du rôle de multiples sources de contamination. 

La présente étude souligne l’existence de corrélations entre les différents réservoirs examinés, mais n’a pas identifié des liens au niveau moléculaire entre des souches isolées de la population générale et des souches isolées des animaux producteurs de denrées alimentaires.  

Conclusion 

Selon l’avis de l’AMCRA des études supplémentaires sont nécessaires afin de mieux identifier et quantifier les risques associés au contact direct et indirect hommes-animaux dans la transmission des résistances aux antibiotiques. Le rôle des animaux producteurs de denrées alimentaires ou des produits d’origines animale ne doit pas être négligé sans toutefois être surestimé. Le risque associé au contact direct avec les animaux de compagnie doit être également pris en compte. Une approche « une seule santé » est la plus appropriée dans la lutte contre l’antibiorésistance, afin que tous les secteurs soient responsabilisés et puissent participer avec des initiatives spécifiques. Néanmoins une meilleure compréhension des mécanismes de transmission permettrait de prioritiser les efforts et la mise en place des actions les plus efficaces tant chez les animaux que chez l’homme et l’environnement. 

Références :

1. World Health Organization. Global priority list of antibiotic-resistant bacteria to guide research, discovery, and development of new antibiotics. Geneva: World Health Organization,  27 February 2017 (http://www.who.int/medicines/publications/WHO-PPL-Short_Summary_25Feb-ET_NM_WHO.pdf?ua=1). 

2. Harbarth S, Balkhy HH, Goossens H, Jarlier V, Kluytmans J, Laxminarayan R, Saam M, Van Belkum A, Pittet D, and for the World Healthcare-Associated Infections Resistance Forum participants. Antimicrobial resistance: one world, one fight! Antimicrobial Resistance and Infection Control, 2015; 4: 49.  

3. Tang KL, Caffrey NP, Nóbrega DB, Cork SC, Ronksley PE, Barkema HW, Polachek AJ, Ganshorn H, Sharma N, Kellner JD, Ghali WA. Restricting the use of antibiotics in food-producing animals and its associations with antibiotic resistance in food-producing animals and human beings: a systematic review and meta-analysis. Lancet Planet Health, 2017; 1: e316–27.

4. Voss A, Loeffen F, Bakker J, Klaassen C, Wulf M. Methicillin-resistant Staphylococcus aureus in pig farming. Emerging Infectious Diseases, 2005; 11: 1965–1966.

5. Dorado-García A, Smid JH, van Pelt W, Bonten MJM, Fluit AC, van den Bunt G, Wagenaar JA, Hordijk J, Dierikx CM, Veldman KT, de Koeijer A, Dohmen W, Schmitt H, Liakopoulos A, Pacholewicz E, Lam TJGM, Velthuis AG, Heuvelink A, Gonggrijp MA, van Duijkeren E, van Hoek AHAM, de Roda Husman AM, Blaak H, Havelaar AH, Mevius DJ, Heederik DJJ. J Antimicrobial Chemotherapy, 2017 ; doi: 10.1093

Amélioration de l’observance de l’hygiène des mains dans une unité de soins : le projet « 5 ans pour sauver des vies » aux Hôpitaux Iris Sud


Contexte : 

D’après l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 5 à 15% des patients hospitalisés sont à risque de contracter des infections liés aux soins. Des mesures de prévention simples et peu couteuses comme une hygiène des mains appropriée ont un impact significatif sur les infections associées aux soins [1].
L’observance de l’hygiène des mains est un défi quotidien pour les équipes de soins. Les services de prévention et maitrise des infections multiplient les interventions afin de soutenir les équipes dans l’amélioration continue de cette observance.
La Plateforme pour l’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité des patients (PAQS) apporte un soutien et un accompagnement aux institutions de soins bruxelloises et wallonnes dans le développement et la mise en œuvre de démarches d’amélioration continue de la qualité des soins. Les Hôpitaux Iris Sud (HIS) se sont engagés dans un de leur projet, le projet « 5 ans pour sauver des vies » (voir article précédent). Pour le volet « infections » de ce projet, la PAQS a proposé aux hôpitaux de travailler à l’optimisation de l’hygiène des mains dans une unité de soins, avec pour objectif, une progression d’au moins 5 % l’observance de l’hygiène des mains dans le service choisi.
Pour atteindre cet objectif, la PAQS a mis à disposition un change package basé sur les cinq actions de la stratégie multimodale de l’OMS pour la Promotion de l’Hygiène des Mains [2] : le changement de système, l’organisation de formations, l’évaluation et la restitution des résultats, des rappels et incitatifs sur le lieu de travail, et enfin une culture institutionnelle de la sécurité.
Le service Qualité et Sécurité du patient a sollicité le service de Prévention et de Maîtrise des Infections Liées aux Soins pour construire et mettre en place un tel projet aux Hôpitaux Iris Sud. 

Méthode : 

Un groupe pilote s’est constitué, composé des membres de l’équipe d’hygiène, d’un manager de soins et d’un référent qualité. Le choix de l’unité de soins s’est porté sur une unité de gériatrie aigue.
Le protocole de la PAQS a été adapté tenant compte de contingences institutionnelles. Le groupe pilote a mis en œuvre le change package de la manière décrite dans le tableau 1.

 

Tableau 1 : Mise en application de la stratégie multimodale de l’OMS pour la promotion de l’hygiène des mains dans le projet PAQS « 5 ans pour sauver des vies » aux Hôpitaux Iris Sud 

Le projet a visé tous les intervenants ayant des contacts avec les patients du service.
Une évaluation des besoins en support pour SHA a été réalisée avant le début de la période d’observations.
Les observations se sont déroulées de manière hebdomadaire, par session de 30 min, en début de matinée les jeudis ou vendredis, par quatre observateurs formés à la méthode de l’observation à l’hygiène des mains telle que proposée par l’institut de santé publique Sciensano, suivant le manuel méthodologique de la campagne nationale d’hygiène des mains 2016-17 [3].
Le taux de départ a été établi par la médiane des résultats des premières observations, portant sur un nombre minimal des 150 opportunités. Le taux cible a été fixé à +10%. L’objectif a été considéré comme atteint lorsqu’au moins 5 mesures se sont situées au-dessus de la médiane, signant ainsi la pérennisation de l’amélioration.
L’encodage des résultats des observations a été réalisé en interne sur un document Excel®. Les taux d’observance ont été suivis en fonction des 5 indications décrites par l’OMS et par catégorie d’intervenants. Les résultats hebdomadaires du taux d’observance ont été rapportés dans un run chart, outil de gestion de la qualité [4].
La période de formation a été définie à l’avance, à savoir maximum 12 semaines. Des sessions hebdomadaires ont été prévues pour tout le personnel en contact avec les patients de l’unité. Des supports sous forme d’affiches annonçaient le thème de la formation de la semaine. Des marques-pages, réalisés en interne,  ont été distribués à chaque séance, ils rappelaient les points clés de celle-ci.
Les professionnels ont également été invités à suivre un module d’e-learning d’Iris-Academy [5] consacré à l’hygiène des mains, auquel l’équipe d’hygiène des Hôpitaux Iris Sud a contribué.  
Le groupe pilote s’est présenté au service avant les premières observations. Ce groupe s’est réuni régulièrement tout au long du projet. Plusieurs feed-back ont été organisés. En fin de projet, une séance d’évaluation a eu lieu avec le service.

Résultats : 

Le projet a démarré le 8 février 2018 et s’est terminé le 25 mai 2018. 
La disponibilité de la solution hydro-alcoolique sur les lieux de soins a été auditée. Les supports et la SHA étaient présents dans toutes les chambres et, à l’exception d’un support, dans tous les locaux annexes. Le support manquant a été installé.
714 opportunités d’hygiène des mains ont été observées en 15 séances, avec une moyenne de 47,6 opportunités par séance.
Le run chart a permis de suivre l’évolution du taux d’observance. Le taux de départ a été établi après 4 séances d’observations. Il était de 69,4%. Le taux cible a donc été fixé à 80,0%. Ce taux cible a été atteint en cours de projet. Les formations ont commencé une fois le taux cible déterminé et se sont étalées sur 10 semaines, du 26 février au 7 mai 2018, des lundis ou mardis. Vingt-six sessions de formations ont été organisées, dont ont bénéficié 54 professionnels.
Au terme du cycle de formation, le taux médian d’observance de l’hygiène des mains était de 88.8%. Les observations se sont poursuivies pendant plusieurs semaines. Le taux d’observance a continué à s’améliorer pour atteindre 92.3% (tableau 2).

Tableau 2 : Evolution de la médiane du taux d’observance à l’hygiène des mains dans une unité de gériatrie pendant le projet PAQS. L’évolution du taux d’observance global ainsi que les différentes actions entreprises sont présentées sur le graphique 1. L’amélioration de l’observance de l’hygiène des mains obtenue est statistiquement significative car à partir de la mesure réalisée le 6 avril, on note six points consécutifs sont au-dessus de la médiane (graphique 1). 

Graphique 1 : Evolution du taux d’observance de l’hygiène des mains dans une unité de gériatrie durant le projet PAQS

 

Le temps investi par l’ensemble des équipes pour le projet est d’environ 200h. Ce temps comprend les réunions, la préparation des formations, les formations et observations, le traitement des données.

Discussion :

Dès le début, plusieurs équipes de l’hôpital se sont associées pour mener à bien ce projet. Dans une perspective multidisciplinaire, le projet a impliqué l’équipe d’hygiène, le service qualité et des cadres infirmiers. Deux des quatre observateurs et l’un des trois formateurs ne faisaient pas partie de l’équipe d’hygiène hospitalière. L’un d’eux a  été formé aux méthodes d’observations pour ce projet. La collaboration entre l’équipe d’hygiène, le management et le service qualité a été un élément déterminant dans la réussite de ce projet. Chacun a apporté son expertise et sa vision qui se sont avérés totalement complémentaires.
Le groupe pilote a proposé de travailler avec une unité de gériatrie aigue. Divers éléments ont présidé à ce choix. Tout d’abord, plusieurs formations en prévention des infections associées aux soins avaient déjà eu lieu dans cette unité et la collaboration avait été fructueuse. L’équipe de cette unité était par ailleurs engagée dans d’autres projets pour lesquels des observations avaient déjà eu lieu régulièrement. Familiarisée avec cet outil, l’observation était perçue positivement. De plus, les membres du service étaient ouverts aux formations et souhaitaient améliorer leurs pratiques. L’ensemble de ces éléments et une dynamique de travail positive et collaborative ont été considérés comme des facteurs d’adhésion au projet et de succès.
Les membres du service ont régulièrement interpellé le groupe pilote sur les objectifs de ce projet, qui a donc été discuté avec les différents membres du service.
Le projet visait à atteindre tous les intervenants ayant des contacts avec les patients de l’unité. Ainsi ont été inclus dès le départ les infirmiers, aides-soignants, kinésithérapeutes, médecins, ergothérapeutes, logopèdes, assistants sociaux et soignants de l’équipe mobile.
Carte blanche a été laissée à l’infirmière hygiéniste pour imaginer un programme de formation adapté. Partant du constat que les soignants connaissent la technique et les indications théoriques de l’hygiène des mains, elle nous a proposé un programme innovant qui visait à clarifier la manière d’implémenter dans leur pratique ce que les soignants maitrisaient déjà en théorie. Des formations de proximité, en petit groupe, de courte durée et répétées dans le temps devaient être privilégiées.
Des sessions de mini formations (flashs info) hebdomadaires sur l’hygiène des mains ont été organisées afin de mobiliser les connaissances de tous les participants. Chaque flash info a été dédoublé en deux séances, l’une destinée au personnel soignant, l’autre au personnel paramédical, permettant de cibler les opportunités d’hygiène des mains en fonction des activités respectives.
Centrées sur l’activité de soins, ces mini sessions de formation de 15 à 20 minutes en petit groupe ont été fort appréciées par les bénéficiaires. Ils se sont sentis libres d’interagir et de poser des questions. Cette approche a permis de travailler sur les résistances et de modifier les pratiques.  L’analyse par indication a montré que l’observance après contact était nettement meilleure que celle avant contact (voir tableau 2).  Comme ailleurs, c’est donc principalement la fonction auto-protective qui mobilise le soignant. Ainsi suite à une étude menée dans plusieurs hôpitaux français, les auteurs constatent que « l’imaginaire d’insécurité collective (…) relègue au second plan les risques de transmission aux patients » (Carricaburu 2008:s62). Les flashs infos en petit groupe ont permis notamment de questionner le rôle du professionnel dans la transmission du risque infectieux et de travailler ainsi la protection de l’autre, celle du patient [6].
Trois référents hygiène de l’hôpital ont été impliqués dans le projet, dont le référent de l’unité de soins. Leur mission était de relayer l’information de la semaine aux personnes n’ayant pas pu assister au flash info. L’implication du référent hygiène du service s’est avérée particulièrement fructueuse, tandis que celle des deux autres référents a été plus difficile, principalement pour des raisons d’organisation.
La participation du personnel de soins aux sessions de formations a démarré lentement. Cette période était marquée par une surcharge de travail et des tensions dans l’équipe. La semaine du 02 mars, le plus mauvais score d’observance de l’hygiène des mains a été observé (60%). Ce mauvais score a été communiqué rapidement aux participants ainsi qu’aux cadres infirmiers. Suite au premier feed-back et après la normalisation de l’activité, le taux d’observance est remonté.
L’analyse des résultats par discipline a mis en lumière l’impact du personnel externe au service ayant un contact avec les patients de ce service sur le taux global (graphique 2). Les étudiants infirmiers ont dès lors bénéficié de séances flash infos spécifiques. Des formations plus longues dédiées aux brancardiers et aux bénévoles ont été organisées. Ces sessions visaient à donner quelques notions théoriques sur la transmission des germes, ainsi que formation et information sur les pratiques de l’hygiène des mains tenant compte des activités spécifiques à chaque profession. 

Graphique 2 : Evolution du taux d’observance de l’hygiène des mains dans une unité de gériatrie durant le projet PAQS, par type de formation 


Les médecins ont eu des difficultés à être réguliers aux flashs info, principalement par manque de temps. Pour autant, le taux moyen d’observance tout au long du projet a été très satisfaisant : 89,9 %. Ils ont par ailleurs bénéficié de l’interpellation par les autres membres du service, en particulier par le référent hygiène. 
En effet, au cours de projet, les différents intervenants ont été sensibilisés à la méthode du speak up. Cette méthode met l’emphase sur la responsabilisation des professionnels face à leurs actes, sur la détection en temps réel des manquements aux consignes d’hygiène des mains. Le speak up a fait ses preuves pour améliorer et maintenir des taux d’observance déjà élevés [7]. Les différents intervenants s’interpellent, se rappelant les règles d’hygiène à appliquer, dans un but constructif et orienté vers la sécurité du patient. Dans notre cas, l’équipe de soins s’est complètement approprié cette méthode.
L’accès à l’e-learning a été compliqué suite à des obstacles logistiques et techniques, mais le service a pu en bénéficier malgré tout.
Régulièrement, les résultats des observations étaient remis à l’équipe et discuté avec eux, favorisant le maintien et l’amélioration de l’observance.
Le temps de préparation lié aux différents aspects du projet a été perçu comme important, notamment en ce qui concerne la préparation des supports pour les flashs infos.
En guise de remerciements, chaque membre de l’équipe a reçu un courrier de félicitations de la direction ainsi que des écouteurs leurs permettant entre autres de se connecter encore plus facilement aux différents modules d’e-learning consacrés à la prévention des infections associées aux soins.
Les membres de l’équipe sont demandeurs d’un suivi. L’unité de soins continuera à bénéficier d’un soutien pour s’assurer de la pérennisation des résultats et évaluer l’impact de l’amélioration de l’observance sur la réduction des taux d’infections associées aux soins. Le modèle sera adapté pour d’autres services de l’hôpital.

Conclusion :

L’adaptation du modèle multi modal a permis une nette amélioration de l’observance de l’hygiène des mains dans une unité de soins des Hôpitaux Iris Sud. Le taux de 92% atteint est le résultat d’un projet pluridisciplinaire pour lequel tous les services ont travaillé en synergie. La manière de penser les formations ont été adaptées au niveau d’observance des soignants : rappels théoriques, ateliers pratiques, travail sur les représentations et les résistances, speak up, autant d’outils au service de l’amélioration de la qualité des soins. La composition des équipes évolue, justifiant des actions régulières afin d’améliorer l’observance de l’hygiène des mains et de garantir la qualité des soins. 

Références

(1) [Anonyme], Résumé des Recommandations de l’OMS pour l’Hygiène des Mains au cours des Soins, Organisation Mondiale de la Santé, 2010, 54 pg 
(2) [Anonyme], Guide de Mise en Œuvre de la Stratégie multimodale de l’OMS pour la Promotion de l’Hygiène des Mains, Organisation mondiale de la Santé, 2010, WHO/IER/PSP/2009.02
(3) Manuel méthodologique 2016-2017, « Vous êtes en de bonnes mains » CAMPAGNE NATIONALE D’HYGIENE DES MAINS, https://www.health.belgium.be/sites/default/files/uploads/fields/fpshealth_theme_file/manuelmethodologique_hh2016_fr.pdf
(4) Provost L, Murray S., The Health Care Data Guide: Learning from Data for Improvement, (2011), 446 p
(5) Module « Hygiène des mains » à consulter sur le site https://iris-academy.brussels
(6) Carricaburu D & Al., « Quand soigner rend malade : des soignants face au risque infectieux à l’hôpital », Santé Publique, 2008/hs (vol20), p 57-67
(7) Linam MW & al, « Impact of a Successful Speaking Up Program on Health-Care Worker Hand Hygiene Behaviour ». Pediatr Qual Saf. 2017; 2: e035

 

5 ans pour sauver des vies, cela passe aussi par l’observance à l’hygiène des mains !


De belles avancées en matière d’hygiène des mains

En Belgique, depuis 2005, des campagnes de promotion de l’observance à l’hygiène des mains sont organisées sur une base régulière afin de sensibiliser les différents acteurs des soins de santé à l’importance de cette thématique.
Ce travail porte ses fruits puisque l’on peut observer une nette amélioration des résultats d’observance à la suite des différentes campagnes [1] [2]. Toutefois, il est possible de faire encore mieux. C’est même indispensable si nous souhaitons garantir une sécurité optimale aux patients au sein de nos institutions de soins.
C’est pourquoi la PAQS propose depuis début 2017, dans le cadre du projet « 5 ans pour sauver des vies », des actions complémentaires à ce qui existe déjà en vue d’intensifier la lutte contre les infections et d’atteindre, ensemble, des résultats positifs et durables en la matière. 

Impacts pour les patients 

Pour prévenir le transfert de micro-organismes entre patients, soignants et l’environnement hospitalier nous ne pouvons pas nous des résultats actuels. Si les chiffres belges sur l’hygiène des mains sont clairement encourageants, une politique ayant pour objectif zéro dommage au patient, sa famille et aux soignants, demande des résultats encore plus hauts. 
A l’heure actuelle, les dernières données de prévalence publiées font état de 7 % des patients hospitalisés en hôpitaux aigus ayant contractés une infection associée aux soins (IAS) en 2011 [3]. Par extrapolation, le manuel méthodologique 2016-2017 pour la campagne fédérale fait état d’environ 103 000 patients qui contractent une IAS chaque année [4]. Les experts reconnus dans le secteur de l’hygiène hospitalière estiment qu’environ 50 % de ces cas sont évitables.
Sans être catastrophistes, ces chiffres interpellent. Environ 50 000 patients qui peuvent éviter une infection chaque année, ce n’est pas négligeable. De plus, selon l’European Centre for Disease Prevention and Control (ECDC) qui a analysé la charge de six IAS communes, environ 3,5 % vont déboucher sur un décès [5]. Cette proportion appliquée à la prévalence des infections évitables en Belgique donne environ 1 700 décès évitables par an. Clairement, si la Belgique est un bon élève dans sa catégorie, nous pouvons faire mieux !
Ces chiffres sont d’autant plus interpellant que des signaux d’alerte nous arrivent régulièrement sur une possible évolution des risques infectieux dans nos hôpitaux. Selon certains experts, une catastrophe est à nos portes… Très récemment encore, l’ECDC exprimait sa « préoccupation au sujet du développement des entérobactéries résistantes aux carbapénèmes (ERC), ce qui représente, selon l’agence, une menace importante pour les patients et les systèmes de santé dans l’ensemble des pays de l’Union. […] L’ECDC recommande plusieurs options pour réduire les risques associés qui ont été identifiés, notamment la mise en œuvre et le respect strict de mesures de contrôle des infections » [6].

Agir pour tenter de faire encore mieux 

La sécurité des patients ne se résume pas à la prévention des infections. L’OCDE estime que 8 à 12 patients hospitalisés sur 100 [7] seront victimes d’un incident et que la moitié de ceux-ci sont évitables [8]. Ces estimations sont semblables aux études de l’Institute of Medicine (IOM) ou à celles des pays européens ayant procédé à une évaluation de l’impact des évènements indésirables sur leur territoire (Royaume-Uni 2000, Danemark 2001, France 2004, Pays-Bas 2007, Suède 2008). La situation en Belgique n’est certainement pas éloignée de ces chiffres. 
Tous ces incidents vont créer des dommages plus ou moins graves aux patients pouvant aller jusqu’au décès. Si l’on se réfère aux chiffres de l’IOM et que l’on extrapole les chiffres américains (de 44 000 à 98 000 décès par an associés aux soins), l’activité hospitalière belge génèrerait de 3 000 à 7 000 décès par an [9]. Des études plus récentes ont revu ces chiffres à la hausse en multipliant les premières estimations par un facteur allant de 4 à 5. [10,11]
Suite à ce constat et aux recommandations de l’OMS pour améliorer les soins de santé, la PAQS a décidé de proposer aux institutions wallonnes et bruxelloises de s’engager dans un projet ambitieux : 5 ans pour sauver des vies ! Ce projet aborde 6 thématiques prioritaires : la communication, la gestion des médicaments à haut risque, l’identito-vigilance, la préventions des infections, la chirurgie sûre et la prévention de la violence en psychiatrie.
Afin de sauver des vies, différentes actions sont recommandées par l’OMS, elles-mêmes divisées en sous-thématiques pour lesquelles des paquets d’actions efficaces et basées sur les preuves ont été compilés par l’équipe de la PAQS. Lors du lancement du projet en 2017, les 19 institutions participantes ont décidé, dans le cadre du thème prévention des infections, de travailler plus particulièrement sur l’observance à l’hygiène des mains.
L’objectif est d’atteindre et de maintenir des niveaux d’observance encore meilleurs. Pour ce faire, un plan multimodal doit être mis en place. La pluralité des actions est vitale pour améliorer les résultats.
La campagne fédérale est un excellent levier, mais nous devons aller plus loin ! Nous devons proposer des actions nouvelles, soutenir les spécialistes de l’hygiène et créer un vaste plan multimodal pour améliorer encore les résultats, car nous pouvons y arriver ! Des exemples étrangers nous le prouvent : il est possible d’atteindre des taux élevés d’observance soutenue à 90 % et plus [12]. Cette approche, recommandée par l’OMS et par le Conseil Supérieur de la Santé en 2018 [19], est simple, mais puissante.
Cette approche permet la mise en place de paquets d’actions créés sur base des 5 axes et d’une revue de littérature solide pour changer le système actuel. Ces paquets d’actions seront activés par la méthode collaborative et par une stratégie de mesure pour évaluer quantitativement les changements testés. 

Les paquets d’actions proposés par le projet 5 ans pour sauver des vies

La méthode des Breakthrough Collaborative pour implémenter les paquets d’actions  

Pour le projet 5 ans, la PAQS se base sur la méthode des « Breakthrough Collaborative » (collaboratif d’apprentissage en français) développée par l’Institute for Healthcare Improvement (IHI). Cette méthode est un système d’apprentissage partagé et dynamique, permettant de rassembler des équipes de projet de différents établissements de soins qui travaillent ensemble en vue de réaliser rapidement des améliorations significatives dans les processus, la qualité et l’efficience d’un domaine spécifique de soins. 
Les équipes testent et mettent en œuvre simultanément des changements et, à travers un mécanisme d’apprentissage, partagent leurs expériences. Ces projets reposent sur des itérations du cycles PDSA, Plan-Do-Study-Act (« Planifier-Exécuter-Étudier-Agir »), dans un temps défini et sont divisés en trois phases principales. 

1. Période de préparation
Lors de la période préparatoire les objectifs et les interventions techniques du collaboratif sont définis et la structure pour soutenir la mise en œuvre du collaboratif est développée (ex : méthodologie, engagement des institutions, formations, constitution et préparation des équipes, indicateurs et mesures, changements à mettre en place, etc.).
Une particularité des collaboratifs d’apprentissage réside dans la définition des paquets d’actions. Ceux-ci définissent les changements que toutes les équipes vont mettre en œuvre. Ils regroupent un ensemble de pratiques et de procédures fondées sur la meilleure preuve existante, qui une fois mises en œuvre de façon systématique, vont produire les résultats attendus et formulés dans les objectifs du collaboratif d’apprentissage.

2. La période de mise en œuvre
La période de mise en œuvre est caractérisée par des sessions d’apprentissage séparées par des périodes d’action.
Les sessions d’apprentissage sont des réunions en face à face réunissant les équipes multidisciplinaires de chaque organisation ainsi qu’un ou plusieurs expert(s). Lors de ces séances, les équipes échangent leurs expériences, leurs défis et leurs échecs et apprennent ainsi davantage les unes des autres.
Lors des périodes d’action, les équipes testent et adaptent les changements qui sont préconisés dans les paquets d’actions à travers des cycles PDSA. Ce processus en quatre phases est un moyen de développer, tester et de mettre en œuvre des changements. Le cycle PDSA donne l’occasion de tester rapidement des changements à petite échelle, d’en observer les conséquences, d’adapter les changements si nécessaire, puis de les tester à nouveau, avant de mettre en œuvre tout projet de changement à une plus grande échelle. C’est aussi à ce moment que les équipes collectent les données qui vont mesurer l’impact de ces changements. Pendant ce temps, les institutions sont soutenues par l’ensemble du collaboratif d’apprentissage (visites sur place, conférences téléphoniques, forums de discussions, etc.). 

3. La période extension/pérennisation
Une fois le collaboratif d’apprentissage terminé, les bénéfices et les activités du projet doivent être maintenus, institutionnalisés et pérennisés au sein de l’institution. C’est ce qu’on appelle la phase d’extension et de pérennisation. Le travail accompli, les résultats et les leçons apprises peuvent être partagés à d’autres sites, à travers, par exemple des conférences, des congrès et/ou des articles.  

Figure 1. Schéma d’un collaboratif d’apprentissage


De l’importance du travail multidisciplinaire pour avancer ensemble

Le 21 juin 2018, dans le cadre du projet 5 ans pour sauver des vies, la PAQS a organisé une journée d’échanges d’expériences sur l’hygiène des mains. L’objectif de la journée était de rassembler les équipes de projet des différentes institutions de soins participantes avec le responsable de la partie hygiène du projet. Cette réunion a permis d’améliorer la communication relative au projet, de rappeler ce qui est attendu des équipes et de veiller à ce que le projet ainsi que les améliorations à mettre en place soient bien appropriés par les équipes. Cependant, le but principal de la réunion était de réunir les équipes multidisciplinaires afin d’ouvrir le dialogue sur les réussites et les obstacles rencontrés et de créer ainsi une véritable collaboration interprofessionnelle. 
La collaboration interprofessionnelle est importante pour l’amélioration de la qualité et la sécurité des soins, notamment en ce qui concerne l’hygiène des mains. L’OMS la définit comme suit : « lorsque de nombreux prestataires de soins ayant différentes formations professionnelles offrent des services complets en travaillant avec les patients, leurs familles, leurs soignants et les collectivités, afin de prodiguer les soins de la plus grande qualité possible dans différents milieux d’intervention » [13].
Une étude récente [14] a montré que la collaboration entre professionnels permet de modifier les attitudes et les perceptions négatives ainsi que d’améliorer les problèmes de confiance et de communication, de renforcer les compétences collaboratives, de faire face aux problèmes, et de promouvoir la satisfaction au travail. Elle permet par ailleurs d’encourager l’esprit d’équipe, d’identifier et de valoriser les rôles respectifs tout en favorisant le changement dans la pratique et les professions et de créer un environnement de travail plus flexible.
Une étude menée au Canada [15] a évalué l’effet de trois cultures de prévention du risque des infections nosocomiales sur les pratiques du personnel soignant à l’égard de l’hygiène des mains :
• Dans une culture individuelle, les professionnels de la santé perçoivent la sécurité des patients sous l’angle des pratiques qu’ils peuvent individuellement adopter pour éviter la propagation des infections nosocomiales.
• Au sein d’une organisation où la culture est hiérarchique ou « blaming culture », il existe une perception que les risques découlent d’un défaut de conformité par rapport aux standards de contrôle et de prévention de ces infections.
• Enfin, dans la culture collaborative, la perception de la sécurité des patients se base sur l’opérationnalisation systémique d’un programme de prévention, où tous les acteurs — personnel soignant, gestionnaire, administratif, patients, visiteurs, etc. — ont un rôle à jouer, et celui-ci est expliqué et compris de tous dans un effort commun.

 Cette dernière étude de Bernard L et al. [15] démontre que lorsque les professionnels perçoivent que leur institution promeut et met en œuvre une culture collaborative de prévention des infections, ceux-ci portent plus attention à l’hygiène des mains. Ainsi, lorsqu’il y existe un esprit d’équipe en ce qui concerne la sécurité des patients et la prévention des infections, la gestion du risque devient plus collective et les professionnels agissent de façon plus responsable.
Cette coresponsabilité a des effets positifs tant sur la gestion du risque et sur les opérations de prévention, que sur l’apprentissage et le transfert des connaissances, le leadership et, finalement, sur la sécurité des patients.
C’est pourquoi, le projet « 5 ans pour sauver de vies » tente d’instaurer et de promouvoir cette culture collaborative au sein des institutions. Finalement, l’hygiène hospitalière est l’affaire de tous !

Comment mesurer les actions mises en place ?

Les institutions participantes ont collégialement défini des objectifs SMART pour chacune des sous-thématiques. Concernant l’hygiène des mains, l’objectif retenu est d’améliorer le taux d’observance à l’hygiène des mains de 5 % d’ici la prochaine campagne nationale de l’hygiène des mains.
Pour permettre d’évaluer la réussite de cet objectif, la PAQS propose une stratégie de mesure inspirée de la méthodologie utilisée par l’IHI [16,17]. Afin de déterminer si un changement est bien une amélioration, il faut collecter des données en continu dans des intervalles de temps restreints. La littérature place même cette stratégie de mesure et de restitution des résultats aux équipes de terrain comme action indispensable aux plans multimodaux d’amélioration de l’hygiène des mains.
Quoi de plus logique pour les institutions participantes que d’utiliser le protocole de collecte mis en place pour la campagne nationale. L’objectif assigné aux données est néanmoins différent. La mise en place d’audits rapprochés permet d’étudier un processus en analysant les variations temporelles des données collectées. Le protocole d’audit prévoit une séance d’observance de 30 minutes par semaine dans les unités pilotes.
Pour analyser les variations temporelles, les institutions ont été formées à l’utilisation du « Run Chart ». Il s’agit d’un outil graphique qui dispose de quatre règles d’interprétation qui permettent d’identifier des changements non aléatoires dans les processus observés. Les 5 premières observations permettent de déterminer la situation de départ et se font avant la mise en place des premières actions. Dans l’exemple fictif ci-dessous, la « baseline », après 5 observations, montre une médiane de 71 % d’observance à l’hygiène des mains. L’objectif pour cette unité pilote sera donc d’atteindre et de maintenir des résultats dont la médiane sera d’au moins 76 %. La collecte des données se réalise en parallèle de l’implémentation des actions evidence-based. Dans l’exemple ci-dessous on peut constater des variations non aléatoires dans les données collectées. Ainsi, une série d’au moins 6 points consécutifs au-dessous de la médiane n°2 ou encore une courbe qui ne coupe pas assez de fois la médiane n°2 sont autant de signaux d’alerte de l’existence d’une amélioration. La nouvelle médiane est de 79 %, l’objectif est donc atteint. L’équipe peut maintenant espacer les audits et continuer ces actions pour pérenniser ses résultats.  

Figure 2. Exemple de données rapportées dans un Run Chart 


Pour quels résultats ?

Les questions que toute personne est en droit de se poser sont : est-ce que cela fonctionne vraiment ? Peut-on arriver à des taux d’observance d’hygiène des mains plus élevés ? Si oui, qui y est arrivé ?
Dans le cadre de la journée du 21 juin, nous avons eu l’occasion d’échanger avec un hôpital suisse qui a mis en place un plan multimodal dans le cadre d’un collaboratif d’apprentissage mené par la Fédération des Hôpitaux Vaudois (FHV) [12]. L’Ensemble Hospitalier de la Côte (EHC) est parvenu à une amélioration significative de l’observance qui est passée de 53 % à 86 % en l’espace de 18 mois. Ce qui est remarquable, c’est qu’ils réussissent à maintenir dans le temps leur objectif de 85 % et plus [18].
Sans surprise, tous les changements testés et adoptés par cet hôpital suisse se retrouvent dans les paquets d’actions présentés dans cet article. Ainsi leur projet a notamment permis de :
• Améliorer la mise à disposition des produits de désinfection par zone de soins (augmentation significative) et généraliser le port de support de poche ;
• Mettre en place des référentiels à l’indication de l’hygiène des mains par secteur dans l’institution, définissant les zones de soins et les zones patients pour chaque unité ;
• Prévoir des procédures de félicitation pour les services ayant atteint l’objectif de 85 % ;
• Initier une campagne de promotion de l’hygiène des mains lors de la journée mondiale de l’hygiène des mains. 

Maintenant, la PAQS et les hôpitaux participants au projet 5 ans pour sauver des vies, se doivent de montrer au secteur des soins de santé que l’application d’un plan multimodal au niveau d’institutions belges dans une méthodologie collaborative donne des résultats similaires.  

Bibliographie

1. De Pauw H, Uwineza A, Benhammadi N, Catry B. Résultats de la 7e campagne nationale pour la promotion de l’hygiène des mains dans les hôpitaux 2016-2017. Sciensano. 2018. 
2. De Pauw H, Uwineza A, Benhammadi N, Catry B. La voix du patient : une analyse sur l’expérience des patients vis-à-vis de la 7e campagne nationale de promotion de l’hygiène des mains. Sciensano. 2018.
3. European Centre for Disease Prevention and Control (ECDC). Point prevalence survey of healthcare associated infections and antimicrobial use in European acute care hospitals. Stockholm. 2013. https://ecdc.europa.eu/sites/portal/files/media/en/publications/Publications/healthcare-associated-infections-antimicrobial-use-PPS.pdf
4. Manuel méthodologique 2016-2017 : Campagne Nationale Pour La Promotion de L’hygiène Des Mains. Bruxelles. 2014. http://www.nsih.be/download/HH/ManuelMethodologique_HH2016_FR.pdf
5. Cassini A, Plachouras D, Eckmanns T, Abu Sin M, Blank H-P, Ducomble T, et al. Burden of Six Healthcare-Associated Infections on European Population Health: Estimating Incidence-Based Disability-Adjusted Life Years through a Population Prevalence-Based Modelling Study. PLoS Medicine. 2016; 13 (10): e1002150
6. Univadis Medical News. Avertissement au sujet du développement des entérobactéries résistantes aux carbapénèmes (en ligne). Univadis International. 2018. https://www.univadis.be/medical-news/596/Avertissement-au-sujet-du-developpement-des-enterobacteries-resistantes-aux-carbapenemes
7. Conklin A, Vilamovska A, de Vries H, Hatziandreu E. Improving patient safety in the EU: assessing the expected effects of three policy areas for future action. Cambridge: RAND Corporation. 2008.
8. Slawomirski L, Auraaen A, Klazinga N. The economics of patient safety: Strengthening a value-based approach to reducing patient harm at national level. Paris: OECD Publishing. 2017.
9. Institute of Medicine (US) Committee on Quality of Health Care in America; Editors: Kohn L, Corrigan J, & Donaldson, M. To err is human: Building a safer health system. Washington, D.C: National Academy Press. 2000.
10. Makary MA, Daniel M. Medical error—the third leading cause of death in the US. BMJ. BMJ. 2016 ;353:i2139.
11. James J. A new, evidence-based estimate of patient harms associated with hospital care. Journal of patient safety. J Patient Saf. 2013;9(3):122-128
12. Staines, A, Amherdt I, Lécureux E, Petignat C, Eggimann P, Schwab M, Pittet D. Hand Hygiene Improvement and Sustainability: Assessing a Breakthrough Collaborative in Western Switzerland. Infect Control Hosp Epidemiol. 2017;38(12):1420-1427
13. Gilbert H, Yan J, Hoffman S. A WHO report: framework for action on interprofessional education and collaborative practice. J Allied Health. 2010;39 (Suppl 1):196-197.
14. Reeves S, Pelone F, Harrison R, Goldman J, Zwarenstein M. Interprofessional collaboration to improve professional practice and healthcare outcomes. Cochrane Database of Systematic Cochrane Database Syst Rev. 2017; 22 (6).
15. Bernard L, Biron A, Lavigne G, Frechette J, Bernard A, Mitchell J, Lavoie-Tremblay M. An exploratory study of safety culture, biological risk management and hand hygiene of healthcare professionals. J Adv Nurs.2018; 74 (4):827–837
16. IHI Open School: http://app.ihi.org/lmsspa/#/6cb1c614-884b-43ef-9abd-d90849f183d4
17. Provost L, Murray S. 2011. The Health Care Data Guide: Learning from Data for Improvement. San Francisco; Published by Jossey-Bass; 446 p.
18. Lebrun L, Linder S, Marchetti O, Pirotte-Snoussi M, Staines A, van Hollebeke I. Plan multimodal pour l’amélioration de l’observance à l’hygiène des mains : les facteurs-clés de réussite. Hygiènes. 2016; 6 : 283-292.
19. Conseil Supérieur de la Santé. 2018. Recommandations en matière d’hygiène des mains durant les soins. Révision de 2018.  Bruxelles: CSS; 2018. Avis n° 9344

 

On a lu pour vous

Rump B, Timen A, Hulscher M, Verweij M.


Ethics of Infection Control Measures for Carriers of Antimicrobial Drug-Resistant Organisms.

Emerg Infect Dis. 2018 Sep;24(9):1609-1616.

Abstract
Many countries have implemented infection control measures directed at carriers of multidrug-resistant organisms. To explore the ethical implications of these measures, we analyzed 227 consultations about multidrug resistance and compared them with the literature on communicable disease in general. We found that control measures aimed at carriers have a range of negative implications. Although moral dilemmas seem similar to those encountered while implementing control measures for other infectious diseases, 4 distinct features stand out for carriage of multidrug-resistant organisms: carriage presents itself as a state of being; carriage has limited relevance for the health of the carrier; carriage has little relevance outside healthcare settings; and antimicrobial resistance is a slowly evolving threat on which individual carriers have limited effect. These features are of ethical relevance because they influence the way we traditionally think about infectious disease control and urge us to pay more attention to the personal experience of the individual carrier.

Gysin DV, Cookson B, Saenz H, Dettenkofer M;: Widmer AF; ESCMID Study Group for Nosocomial Infections (ESGNI).

Variability in contact precautions to control the nosocomial spread of multi-drug resistant organisms in the endemic setting: a multinational cross-sectional survey. 

Antimicrob Resist Infect Control. 2018 Jul 9;7:81.

Abstract
Background: 
Definitions and practices regarding use of contact precautions and isolation to prevent the spread of gram-positive and gram-negative multidrug-resistant organisms (MDRO) are not uniform.
Methods: 
We conducted an on-site survey during the European Congress on Clinical Microbiology and Infectious Diseases 2014 to assess specific details on contact precaution and implementation barriers.
Results: 
Attendants from 32 European (EU) and 24 non-EU countries participated (n = 213). In EU-respondents adherence to contact precautions and isolation was high for Methicillin-resistant Staphylococcus aureus (MRSA), carbapenem-resistant Enterobacteriaceae, and MDR A. baumannii (84.7, 85.7, and 80%, respectively) whereas only 68% of EU-respondents considered any contact precaution measures for extended-spectrum-beta-lactamase (ESBL) producing non-E. coli. Between 30 and 45% of all EU and non-EU respondents did not require health-care workers (HCW) to wear gowns and gloves at all times when entering the room of a patient in contact isolation. Between 10 and 20% of respondents did not consider any rooming specifications or isolation for gram-positive MDRO and up to 30% of respondents abstain from such interventions in gram-negative MDRO, especially non-E. coli ESBL. Understaffing and lack of sufficient isolation rooms were the most commonly encountered barriers amongst EU and non-EU respondents.
Conclusion: 
The effectiveness of contact precautions and isolation is difficult to assess due to great variation in components of the specific measures and mixed levels of implementation. The lack of uniform positive effects of contact isolation to prevent transmission may be explained by the variability of interpretation of this term. Indications for contact isolation require a global definition and further sound studies.

Coppéré Z, Voiriot G, Blayau C, Gibelin A, Labbe V, Fulgencio JP, Fartoukh M, Djibré M. 

Disparity of the «screen-and-isolate» policy for multidrug-resistant organisms: a national survey in French adult ICUs.

Am J Infect Control. 2018 Jul 3.  

Abstract
BACKGROUND: 
The prevalence of multidrug-resistant organisms (MDROs) has dramatically increased. The aim of this survey was to describe and analyze the different screening and isolation policies regarding MDROs in French adult intensive care units (ICUs).
MATERIALS AND METHODS: 
A multicenter online survey was performed among French ICUs, including 63 questions distributed into 4 parts: characteristics of the unit, MDRO screening policy, policy regarding contact precautions, and ecology of the unit.
RESULTS: 
From April 2015 to June 2016, 73 of 301 ICUs (24%) participated in the survey. MDRO screening was performed on admission in 96% of ICUs, for at least 1 MDRO (78%). MDRO screening was performed weekly during ICU stay in 83% of ICUs. Preemptive isolation was initiated on admission in 82% of ICUs, mostly in a targeted way (71%). Imported and acquired MDRO rates >10% were reported in 44% and 27% of ICUs, respectively. An MDRO outbreak had occurred within the past 3 years in 48% of cases.
CONCLUSION: 
French ICUs have variable screening and isolation approaches for MDROs, as up to 10 combinations were met. Discrepancies with the 2009 national guidelines were observed. Very few ICUs practice without some form of screening and isolation of patients upon admission.

Furuya EY, Cohen B, Jia H, Larson EL.

Long-Term Impact of Universal Contact Precautions on Rates of Multidrug-Resistant Organisms in ICUs: A Comparative Effectiveness Study.

Infect Control Hosp Epidemiol. 2018 May;39(5):534-540. 

Abstract
OBJECTIVE
To evaluate the impact of universal contact precautions (UCP) on rates of multidrug-resistant organisms (MDROs) in intensive care units (ICUs) over 9 yearsDESIGNRetrospective, nonrandomized observational studySETTINGAn 800-bed adult academic medical center in New York CityPARTICIPANTSAll patients admitted to 6 ICUs, 3 of which instituted UCP in 2007.

METHODS
Using a comparative effectiveness approach, we studied the longitudinal impact of UCP on MDRO incidence density rates, including methicillin-resistant Staphylococcus aureus, vancomycin-resistant enterococci, and carbapenem-resistant Klebsiella pneumoniae. Data were extracted from a clinical research database for 2006-2014. Monthly MDRO rates were compared between the baseline period and the UCP period, utilizing time series analyses based on generalized linear models. The same models were also used to compare MDRO rates in the 3 UCP units to 3 ICUs without UCPs.
RESULTS
Overall, MDRO rates decreased over time, but there was no significant decrease in the trend (slope) during the UCP period compared to the baseline period for any of the 3 intervention units. Furthermore, there was no significant difference between UCP units (6.6% decrease in MDRO rates per year) and non-UCP units (6.0% decrease per year; P=.840).
CONCLUSION
The results of this 9-year study suggest that decreases in MDROs, including multidrug-resistant gram-negative bacilli, were more likely due to hospital-wide improvements in infection prevention during this period and that UCP had no detectable additional impact.Infect Control Hosp Epidemiol 2018;39:534-540.

Datta R, Juthani-Mehta M.

Burden and Management of Multidrug-Resistant Organisms in Palliative Care.

Palliat Care. 2017 Dec 19;10:1178224217749233.

Abstract
Palliative care includes comprehensive strategies to optimize quality of life for patients and families confronting terminal illness. Infections are a common complication in terminal illness, and infections due to multidrug-resistant organisms (MDROs) are particularly challenging to manage in palliative care. Limited data suggest that palliative care patients often harbor MDRO. When MDROs are present, distinguishing colonization from infection is challenging due to cognitive impairment or metastatic disease limiting symptom assessment and the lack of common signs of infection. Multidrug-resistant organisms also add psychological burden through infection prevention measures including patient isolation and contact precautions which conflict with the goals of palliation. Moreover, if antimicrobial therapy is indicated per goals of care discussions, available treatment options are often limited, invasive, expensive, or associated with adverse effects that burden patients and families. These issues raise important ethical considerations for managing and containing MDROs in the palliative care setting.

Burnham JP, Kwon JH, Olsen MA, Babcock HM, Kollef MH.

Readmissions With Multidrug-Resistant Infection in Patients With Prior Multidrug Resistant Infection.

Journal of Infect Control Hosp Epidemiol. 2018 Jan;39(1):12-19.  

Abstract
OBJECTIVE 
To determine incidence of and risk factors for readmissions with multidrug-resistant organism (MDRO) infections among patients with previous MDRO infection. DESIGN Retrospective cohort of patients admitted between January 1, 2006, and October 1, 2015. 
SETTING 
Barnes-Jewish Hospital, a 1,250-bed academic tertiary referral center in St Louis, Missouri. METHODS We identified patients with MDROs obtained from the bloodstream, bronchoalveolar lavage (BAL)/bronchial wash, or other sterile sites. Centers for Disease Control and prevention (CDC) and European CDC definitions of MDROs were utilized. All readmissions ≤1 year from discharge from the index MDRO hospitalization were evaluated for bloodstream, BAL/bronchial wash, or other sterile site cultures positive for the same or different MDROs. 
RESULTS 
In total, 4,429 unique patients had a positive culture for an MDRO; 3,453 of these (78.0%) survived the index hospitalization. Moreover, 2,127 patients (61.6%) were readmitted ≥1 time within a year, for a total of 5,849 readmissions. Furthermore, 512 patients (24.1%) had the same or a different MDRO isolated from blood, BAL/bronchial wash, or another sterile site during a readmission. Bone marrow transplant, end-stage renal disease, lymphoma, methicillin-resistant Staphylococcus aureus, or carbapenem-resistant Pseudomonas aeruginosa during index hospitalization were factors associated with increased risk of having an MDRO isolated during a readmission. MDROs isolated during readmissions were in the same class of MDRO as the index hospitalization 9%-78% of the time, with variation by index pathogen. 
CONCLUSIONS 
Readmissions among patients with MDRO infections are frequent. Various patient and organism factors predispose to readmission. When readmitted patients had an MDRO, it was often a pathogen in the same class as that isolated during the index admission, with the exception of Acinetobacter (~9%).

Marra AR, Schweizer ML, Edmond MB.

No-Touch Disinfection Methods to Decrease Multidrug-Resistant Organism Infections: A Systematic Review and Meta-analysis.

Infect Control Hosp Epidemiol. 2018 Jan;39(1):20-31.

Abstract
BACKGROUND 
Recent studies have shown that using no-touch disinfection technologies (ie, ultraviolet light [UVL] or hydrogen peroxide vapor [HPV] systems) can limit the transmission of nosocomial pathogens and prevent healthcare-associated infections (HAIs). To investigate these findings further, we performed a systematic literature review and meta-analysis on the impact of no-touch disinfection methods to decrease HAIs. 
METHODS 
We searched PubMed, CINAHL, CDSR, DARE and EMBASE through April 2017 for studies evaluating no-touch disinfection technology and the nosocomial infection rates for Clostridium difficile, methicillin-resistant Staphylococcus aureus (MRSA), vancomycin-resistant enterococci (VRE), and other multidrug-resistant organisms (MDROs). We employed random-effect models to obtain pooled risk ratio (pRR) estimates. Heterogeneity was evaluated with I2 estimation and the Cochran Q statistic. Pooled risk ratios for C. difficile, MRSA, VRE, and MDRO were assessed separately. 
RESULTS 
In total, 20 studies were included in the final review: 13 studies using UVL systems and 7 studies using HPV systems. When the results of the UVL studies were pooled, statistically significant reduction ins C. difficile infection (CDI) (pRR, 0.64; 95% confidence interval [CI], 0.49-0.84) and VRE infection rates (pRR, 0.42; 95% CI, 0.28-0.65) were observed. No differences were found in rates of MRSA or gram-negative multidrug-resistant pathogens. 
CONCLUSIONS `
Ultraviolet light no-touch disinfection technology may be effective in preventing CDI and VRE infection. Infect Control Hosp Epidemiol 

Meißner A, Hasenclever D, Brosteanu O, Chaberny IF.

EFFECT of daily antiseptic body wash with octenidine on nosocomial primary bacteraemia and nosocomial multidrug-resistant organisms in intensive care units: design of a multicentre, cluster-randomised, double-blind, cross-over study.

BMJ Open. 2017 Nov 8;7(11):e016251. American Journal of Infection Control, 2017, 45(11) : 1249-1253

Abstract
INTRODUCTION: 
Nosocomial infections are serious complications that increase morbidity, mortality and costs and could potentially be avoidable. Antiseptic body wash is an approach to reduce dermal micro-organisms as potential pathogens on the skin. Large-scale trials with chlorhexidine as the antiseptic agent suggest a reduction of nosocomial infection rates. Octenidine is a promising alternative agent which could be more effective against Gram-negative organisms. We hypothesise that daily antiseptic body wash with octenidine reduces the risk of intensive care unit (ICU)-acquired primary bacteraemia and ICU-acquired multidrug-resistant organisms (MDRO) in a standard care setting.
METHODS AND ANALYSIS: 
EFFECT is a controlled, cluster-randomised, double-blind study. The experimental intervention consists in using octenidine-impregnated wash mitts for the daily routine washing procedure of the patients. This will be compared with using placebo wash mitts. Replacing existing washing methods is the only interference into clinical routine.Participating ICUs are randomised in an AB/BA cross-over design. There are two 15-month periods, each consisting of a 3-month wash-out period followed by a 12-month intervention and observation period. Randomisation determines only the sequence in which octenidine-impregnated or placebo wash mitts are used. ICUs are left unaware of what mitts packages they are using.The two coprimary endpoints are ICU-acquired primary bacteraemia and ICU-acquired MDRO. Endpoints are defined based on individual ward-movement history and microbiological test results taken from the hospital information systems without need for extra documentation. Data on clinical symptoms of infection are not collected. EFFECT aims at recruiting about 45 ICUs with about 225 000 patient-days per year.
ETHICS AND DISSEMINATION: 
The study was approved by the ethics committee of the University of Leipzig (number 340/16-ek) in November 2016. Findings will be published in peer-reviewed journals.

Araos R, Montgomery V, Ugalde JA, Snyder GM, D’Agata EMC.

Microbial Disruption Indices to Detect Colonization With Multidrug-Resistant Organisms.

Infect Control Hosp Epidemiol. 2017 Nov;38(11):1312-1318.

Abstract
OBJECTIVE
To characterize the microbial disruption indices of hospitalized patients to predict colonization with multidrug-resistant organisms (MDROs). DESIGN A cross-sectional survey of the fecal microbiome was conducted in a tertiary referral, acute-care hospital in Boston, Massachusetts. PARTICIPANTS The study population consisted of adult patients hospitalized in general medical/surgical wards. 
METHODS 
Rectal swabs were obtained from patients within 48 hours of hospital admission and screened for MDRO colonization using conventional culture techniques. The V4 region of the 16S rRNA gene was sequenced to assess the fecal microbiome. Microbial diversity and composition, as well as the functional potential of the microbial communities present in fecal samples, were compared between patients with and without MDRO colonization. 
RESULTS 
A total of 44 patients were included in the study, of whom 11 (25%) were colonized with at least 1 MDRO. Reduced microbial diversity and high abundance of metabolic pathways associated with multidrug-resistance mechanisms characterized the fecal microbiome of patients colonized with MDRO at hospital admission. 
CONCLUSIONS 
Our data suggest that microbial disruption indices may be key to predicting MDRO 


Hur EY, Jin YJ, Jin TX, Lee SM.


Development and evaluation of the automated risk assessment system for multidrug-resistant organisms (autoRAS-MDRO).

J Hosp Infect. 2018 Feb;98(2):202-211.

Abstract
BACKGROUND: 
A high proportion of infections acquired in hospitals are caused by multidrug-resistant organisms (MDROs). The priority in MDRO prevention is to detect high-risk patients and implement preventive intervention as soon as possible.
AIM: 
To develop an automated risk assessment system for MDROs (autoRAS-MDRO) to screen for patients at MDRO infection risk and evaluate the predictive validity of the autoRAS-MDRO.
METHODS:
Data for 4200 variables were extracted from the electronic health records (EHRs) for constructing the MDRO risk-scoring algorithm, which was based on a logistic regression model. The autoRAS-MDRO was designed such that the MDRO risk classification (high, moderate, low risk) could be automatically displayed on the nursing Kardex screen in the EHRs system. For the development of the MDRO risk-scoring algorithm, 1000 patients with MDROs and 4000 patients without MDROs were selected; similarly, for the evaluation, 2173 and 8692 patients with and without MDROs, respectively, were selected.
FINDINGS: 
The predictive validity of the autoRAS-MDRO was as follows: (i) at the 6-month evaluation: sensitivity, 81%; specificity, 79%; positive predictive value (PPV), 49%; negative predictive value (NPV), 94%; and Youden index, 0.60; (ii) at the 12-month evaluation: sensitivity 79%, specificity 78%, PPV 47%, NPV 94%, and Youden index, 0.57.
CONCLUSION: 
The autoRAS-MDRO had moderate predictive validity. It could be useful in redirecting nurses’ time and efforts required for MDRO risk assessment and implementation of infection control measures, and in reducing the incidence of MDRO infection in hospitals, thereby contributing to patient safety.

Bénet T, Girard R, Gerbier-Colomban S, Dananché C, Hodille E, Dauwalder O, Vanhems P.


Determinants of Implementation of Isolation Precautions Against Infections by Multidrug-Resistant Microorganisms: A Hospital-Based, Multicenter, Observational Study.

Infect Control Hosp Epidemiol. 2017 Oct;38(10):1188-1195.

Abstract
OBJECTIVES 
We aimed to ascertain the factors associated with lack of isolation precautions (IP) in patients infected or colonized by third-generation cephalosporin-resistant Enterobacteriaceae (3GCR-E) and methicillin-resistant Staphylococcus aureus (MRSA) in hospital settings. 
DESIGN 
Prospective surveillance and audit of practices. SETTING The study included 4 university hospitals in Lyon, France. 
PARTICIPANTS 
All patients hospitalized between April and June in 2013 and 2015 were included. Case patients had ≥1 clinical sample positive for MRSA and/or 3GCR-E. METHODS Factors associated with the lack of IP implementation were identified using multivariate logistic regression. The incidence of MDRO infections was expressed per 10,000 patient days. 
RESULTS 
Overall, 57,222 patients accounting for 192,234 patient days of hospitalization were included, and 635 (1.1%) MDRO cases were identified. MRSA incidence was 2.5 per 10,000 patient days (95% confidence interval [95% CI], 2.1-3.0) and 3GCR-E incidence was 10.1 per 10,000 patient days (95% CI, 9.2-11.0), with no crude difference between 2013 and 2015 (P=.15 and P=.11, respectively). Among 3GCR-E, the main species were Escherichia coli (43.8%) and Klebsiella pneumoniae (31.0%). Isolation precautions were implemented in 78.5% of cases. Lack of IP implementation was independently associated with patient age, year, specialty, hospital, colonization compared with infection, and lack of medical prescription for IPs (adjusted odds ratio, 17.4; 95% CI, 8.5-35.8; P<.001). 
CONCLUSIONS 
MRSA and 3GCR-E infections and/or colonizations are frequent in healthcare settings, and IPs are implemented in most cases. When IPs are lacking, the main factor is the absence of medical prescription for IPs, underscoring the need for alerts to physicians by the microbiological laboratory and/or the infection control team. Infect Control Hosp Epidemiol 2017;38:1188-1195.

Questions pratiques concernant la prévention des infections lors des soins dispensés à domicile.


Il existe peu de directives récentes et largement diffusées sur la prévention des infections dans les soins dispensés à domicile. Nous sommes contraints de nous baser sur les principes généraux de la prévention des infections ou sur des directives concernant d’autres cadres que nous transposons alors à la situation du domicile. Plusieurs groupes de travail se penchent sur la spécificité de la prévention des infections lors des soins au domicile mais un consensus ne semble pas se dégager.  L’organisation d’études est nécessaire pour élaborer des directives rigoureuses. Pour l’instant, les directives de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), du groupe de travail hollandais sur la prévention des infections (WIP), du Conseil Supérieur de la Santé (Hoge Gezondheidsraad), du «Center for Disease Control and Prevention» et de la «Nederlandse Landelijke Coördinatie Infectieziektenbestrijding» sont  utilisées.

Cet article propose des conseils pratiques pour la mise en place des principes de la prévention des infections dans le contexte des soins à domicile.

Le domicile, vraiment un cadre différent ?  

L’hôpital est défini comme un environnement «contrôlé». Les médicaments sont administrés à intervalles fixes, vous soignez des plaies , vous discutez des résultats avec votre patient, etc… Le patient reste la majeure partie du temps dans sa chambre ou sur son lit. Au domicile, la situation est différente, le patient bénéficie d’une liberté de mouvement totale en dehors de la prestation de soins. Il interagit avec son environnement et le monde extérieur. Dans un hôpital, la continuité des soins est assurée toute la journée, contrairement aux soins à domicile Le patient qui bénéficie de soins à domicile doit être un partenaire à part entière pour la réussite du traitement.

La formation aux actes infirmiers à l’hôpital repose sur la disponibilité de matériel conçu pour la réalisation de soins, contrairement aux soins à domicile où le mobilier du patient doit être utilisé, de même qu’un environnement pas toujours adapté à la réalisation de ces soins. Un dialogue avec le patient est essentiel à cet égard et son consentement est requis étant donné qu’il s’agit de son environnement de vie. Il est évident qu’un infirmier à domicile doit faire preuve de flexibilité dans cet environnement et travailler avec les éléments à sa disposition. 

L’hygiène des mains chez le patient, à son domicile?  

Lors de soins à un patient, on doit bien entendu toujours respecter les cinq moments de l’hygiène des mains (OMS) et les précautions standard. Ces principes ont en effet été établis pour tous les prestataires de soins, dans toutes les situations et avec tous les patients. Même si la situation de soins change, ces principes restent d’application. Les traduire correctement constitue un défi de taille. 

Que peut-on entendre par « hygiène des mains avant le contact avec le patient » ? S’agit-il aussi bien des contacts de soins que des contacts sociaux, ou une distinction est-elle établie à cet égard, comme c’est le cas dans un cadre psychiatrique ? Dans le cadre des soins à domicile, d’aucuns disent qu’il ne faut pas appliquer à la lettre l’hygiène des mains lors de chaque contact avec le patient, comme lors de sa simple salutation. Cela implique cependant qu’une hygiène des mains correcte doit être respectée lorsque nécessaire. En tant qu’infirmier, il est dès lors important de se désinfecter les mains à son arrivée chez un patient, car la probabilité qu’aucun soin ne soit ensuite administré est très réduite. Et quand appliquer l’hygiène des mains « après un contact avec l’environnement du patient » ? Dans un hôpital, il s’agit de l’environnement immédiat du patient, comme le lit, la tablette de nuit et la perfusion du patient. En est-il de même à domicile ? Qu’en est-il de l’ensemble du foyer du patient avec lequel nous pouvons entrer en contact ? Selon une approche pragmatique, il s’agit également des surfaces avec lesquelles le patient entre régulièrement en contact, comme les clenches de porte, le téléphone, le lit, la tablette de nuit, etc. 

Les mains lavées sont séchées à l’aide d’une serviette propre ou d’un essuie-tout. La préférence est accordée à l’essuie-tout, étant donné qu’il est impossible de s’assurer de la propreté de la serviette. La collaboration du patient est nécessaire pour avoir de l’essuie-tout à disposition.  

Animaux domestiques et fourniture de soins infirmiers?  

Une caractéristique spécifique des soins à domicile est la présence éventuelle d’animaux domestiques qui peuvent empêcher le bon déroulement des soins. Les patients avec animaux domestiques devant faire l’objet de soins infirmiers sont invités à mettre les animaux domestiques dans une autre pièce pendant les soins. Ce n’est pas toujours le cas, raison pour laquelle l’infirmier à domicile doit se concerter avec le patient et clairement lui faire comprendre qu’un animal domestique constitue un obstacle à des soins infirmiers de qualité.

Vêtements de protection et utilisation du tablier?  

En ce qui concerne également l’utilisation du tablier, il n’existe aucune directive sur laquelle on peut se reposer. Des experts du groupe de travail sur la prévention des infections dans les soins à domicile de la NVKVV appliquent une distinction entre 3 types de vêtements.

Les vêtements personnels sont la propriété de l’infirmier, sont portés sous les vêtements de service et suffisent lors de la fourniture de soins dans le cadre desquels il n’y a aucun risque de contact physique ou de contamination avec du sang ou des liquides biologiques. Songez à la mesure de paramètres, à un contrôle de glycémie, à la conduite en voiture vers un autre patient ou à une discussion à propos de patients. 

Les vêtements de service (généralement un tablier de soins blanc) protègent les infirmiers et leurs vêtements personnels contre le patient et les souillures survenant pendant les activités. L’utilisation de ce tablier est recommandée dans des situations induisant un potentiel contact physique avec le patient mais aucun risque de contact avec du sang, des liquides biologiques ou des agents pathogènes pendant l’exercice des soins dans des circonstances normales. Il peut par exemple s’agir de soins d’hygiène, d’une prise de sang ou d’habiller et de déshabiller un patient sans matériel d’incontinence. Après les soins au patient, ce tablier est retiré et soigneusement rangé dans un sac. 

Pour terminer, le tablier à usage unique est utilisé en cas de risque de contamination ne pouvant être limité. C’est le cas dans des situations de soins impliquant un contact physique et un risque réel de contact avec du sang, des liquides biologiques ou des agents pathogènes, par exemple dans le cadre de soins à un patient gravement incontinent ou de l’administration ou du retrait de substances toxiques (par ex. cytostatiques). On y retrouve également les soins aux patients souffrant d’une maladie infectieuse transmissible.

Déchets médicaux  

Les infirmiers à domicile doivent respecter les dispositions légales en matière de gestion des déchets. Lors de l’exécution d’un acte médical, l’on devient également producteur de déchets. Et en tant que producteur de déchets médicaux, il convient de se charger de leur gestion. Parmi les principales différences entre un cadre domestique et un cadre hospitalier, citons le fait que l’infirmier doit se charger lui-même de l’enlèvement de certains déchets. Si l’infirmier travaille pour une organisation de soins infirmiers, un service logistique viendra régulièrement enlever les déchets au bureau , tandis qu’un indépendant devra lui-même les déposer au parc à conteneurs. 
La directive OVAM (Openbare Vlaamse Afvalstoffenmaatschappij) établit également, dans le milieu domestique, une distinction entre RMA (déchets médicaux dangereux) et NRMA (déchets médicaux non dangereux). Les RMA peuvent de manière globale être mis au rebut dans un conteneur spécialement conçu à cette fin, comme un conteneur à aiguilles, une boîte en carton avec sachet ou un fût en plastique. Les NRMA n’impliquent aucun risque particulier pour l’environnement ou la santé. Ces déchets peuvent être mis au rebut avec les déchets ménagers du patient. Dans certains cas, il est tout de même question de déchets à risque, comme dans le cas des patients traités avec des médicaments anticancéreux ou soumis à des rayons.
Si les patients ou aidants proches dans l’environnement domestique exécutent ou administrent eux-mêmes certains soins, ils sont tenus de se charger eux-mêmes des déchets. Il s’agit alors de déchets ménagers de nature médicale (aiguilles, compresses, matériel de désinfection, etc…). Leurs collecte et traitement relèvent de la responsabilité des administrations locales. Nombre de ces déchets peuvent être mis au rebut avec les déchets ménagers, mais une partie relève des petits déchets dangereux (PDD).

Matériel de soins  

Il n’est pas toujours évident de savoir qui fournit quel matériel pendant la prestation de soins. En général, l’employeur ou l’infirmier à domicile indépendant doit prévoir du matériel de base afin d’assurer un travail de manière sûre et responsable:
produits de désinfection des mains, gants, lingettes désinfectantes, kit de soin de blessures, mais aussi tablier de soin, sur-blouse à usage unique, etc. Un infirmier à domicile doit souvent réfléchir à ne pas gaspiller le matériel de soin acheté par le patient, étant donné que les frais auxquels ce dernier est confronté peuvent parfois être très élevés. déchets dangereux (PDD).

Comment disposer d’instruments propres? 

Le nettoyage, la désinfection et la stérilisation d’instruments dans le cadre de soins à domicile se font également différemment que dans le cadre hospitalier. Alors qu’un hôpital dispose par exemple de procédures écrites et que les possibilités organisationnelles sont légions, il est fait appel à beaucoup plus de matériel à usage unique dans le cadre des soins à domicile. Il est en effet particulièrement ardu de transporter en toute sécurité le matériel usagé. Les infirmiers ne retournent pas quotidiennement dans leur bureau , raison pour laquelle le matériel doit être conservé dans le coffre de la voiture. Si une boîte ou un conteneur venait à s’ouvrir dans la voiture, l’infirmier pourrait se blesser en contact avec ce matériel (parfois tranchant). Si un infirmier effectue sa tournée en ville à l’aide d’un vélo, la situation est encore plus ardue sur le plan organisationnel. Il est difficile d’établir une distinction entre matériel propre et usagé dans la mallette de soins fixée au porte-bagages. 

Votre téléphone, votre sac et votre porte-clés sont-ils exempts de bactéries (ces objets ne seront jamais totalement exempts de bactéries et donc stériles) ?  

Le respect d’une bonne hygiène des mains est la principale mesure de prévention à adopter pour ne pas contaminer ce matériel. Ce qui signifie qu’il convient de se désinfecter les mains en quittant le patient et avant de prendre son téléphone ou ses clés. Gardez le matériel dont vous n’avez pas besoin à l’écart lors de la fourniture de soins. Vous pouvez laisser votre téléphone et vos clés dans votre sac jusqu’à votre départ de chez le patient. Si vous devez appeler un collègue, cherchez alors des gants et désinfectez-vous les mains. 

En nettoyant ce matériel à l’aide d’une lingette désinfectante à la fin de la journée de travail, vous le protégerez au maximum contre les bactéries. Il n’existe donc aucune règle. Ces procédures doivent dès lors être établies en interne. Il peut par exemple être décidé de nettoyer chaque semaine ou chaque mois la mallette de soins et lors de chaque constatation visuelle d’une souillure. 

Comment éviter les infections des voies urinaires en présence d’un cathéter à demeure ? 

La principale mesure de prévention des infections des voies urinaires dans le cadre des soins à domicile est la bonne indication de la cathétérisation. Ce n’est pas un acte qui se pratique sur ordre médical. Il ne faut cathétériser qu’en présence d’une indication spécifique formelle et ne pas laisser le cathéter en place plus longtemps que nécessaire. Un cathéter à demeure ne peut être utilisé qu’en dernier recours, une fois toutes les solutions alternatives essayées, telles que : l’utilisation d’un aidant proche, exercices de miction, cathétérisme intermittent, etc. Des vidanges de la vessie en vue de prévenir les infections, le changement régulier du collecteur, une désinfection supplémentaire du méat, Les recommandations concernant la gestion du cathéter urinaire sont identiques à celles de l’hôpital. 

Comment travailler de manière hygiénique avec des gants pour mettre des bas de contention ? 

Certains infirmiers utilisent volontiers des gants en caoutchouc pour mettre ou retirer des bas de contention chez des patients. Les gants doivent ici rester liés au patient, pour éviter toute diffusion des germes. D’autre part, les infirmiers doivent également appliquer une hygiène des mains correcte afin de ne pas contaminer l’intérieur des gants. 

Comment réduire les contaminations croisées en cas de soins à des porteurs de bactéries multi-résistantes aux antibiotiques (MDRO) et quand prendre des précautions supplémentaires ? 

Pour les patients porteurs de MDRO des précautions additionnelles sont à adopter, comme le port d’un masque, de gants et d’un tablier à usage unique. Sur le plan organisationnel, les soins à ces patients constituent un défi de taille. Il est recommandé de s’occuper de ce patient à la fin de la tournée, ce qui n’est pas toujours possible dans le cadre des soins à domicile. L’infirmier doit prendre un minimum de matériel à l’intérieur avec lui, afin de réduire la quantité de matériel pouvant être contaminé. Téléphone et tablette doivent être traités à l’aide d’une lingette nettoyante et désinfectante après les soins. Une bonne communication avec les autres membres du ménage, les aidants proches ou les autres visiteurs du patient est essentielle pour limiter la transmission du germe.  

Références :

• Conseil supérieur de la Santé, Recommandations en matière de maîtrise des infections lors de soins dispensés en dehors des établissements de soins (au domicile et/ou au sein d’un cabinet) (décembre 2008) (CSS 8279)

• Conseil supérieur de la Santé, Recommandations en matière de prévention, maîtrise et prise en charge des infections urinaires au cours des soins (CSS 8889) (Juillet 2017)

• Conseil supérieur de la Santé, Recommandations en matière d’hygiène des mains durant les soins (version 2018) (CSS 9344)

• World Health Organization, Hand Hygiene in Outpatient and Home-based Care and Long-term Care Facilities, Genève, 2012.

• LCI, BRMO bijzondere resistente micro-organismen in het bijzonder CPE, mars 2014. https://lci.rivm.nl/richtlijnen/brmo

Caractéristiques et évolution clinique de 29 infections à Enterobactéries productrices de carbapénemase type OXA-48-like dans un hôpital périphérique belge.


Introduction   

Les infections à Enterobactéries productrices de carbapénemases (CPE) sont en augmentation partout dans le monde et ce depuis plusieurs années (1). La première étude de surveillance européenne réalisée en 2013-2014 (étude EuSCAPE) pour les souches cliniques hospitalières de Klebsiella pneumoniae et Escherichia coli CPE a montré une incidence de 1.3 patients/10 000 admissions, soit 2.5 patients/100 000 journées d’hospitalisation (1). L’incidence maximale a éte retrouvée dans les pays méditerranéens et dans la région des Balkans.
Dans cette étude, les carbapénemases prédominantes pour les souches de Klebsiella pneumoniae étaient de type KPC (45%), suivie d’OXA- 48-like (37%). Pour E. coli, OXA-48-like était prédominante (56%), suivie de NDM (26%).
L’incidence retrouvée Belgique dans EuSCAPE pour Klebsiella pneumoniae et E. coli CPE  était de 0 .124/10 000 admissions en 2013 et de 0.223 /10 000 admissions en 2014 (2).
Pour Klebsiella pneumoniae, OXA-48-like représentait 37% des carbapnenémases et 31% pour E. Coli (1).
De 2012 à 2015, l’incidence des CPE dans les échantillons cliniques des hôpitaux belges est passée de 0.25% à 0.55% (3). Cette augmentation d’incidence des CPE est préoccupante car ces infections sont associées à une mortalité élevée.  Un nombre restreint d’antibiotiques est actifs sur ces bactéries (4-10). Le traitement optimal de ces infections est toujours débattu, vu le peu d’études randomisées ayant pu être réalisées (7-10). Dans notre hôpital, pour la période de janvier 2016 à octobre 2017, 29 infections à CPE ont été enregistrées. Toutes étaient de type OXA-48- like. Les dossiers des patients ont été revus pour mieux caractériser ces infections dans le but d’en améliorer la prise en charge.

Méthodologie :

1. Récolte des données cliniques :

Les dossiers des patients ayant présenté une infection à CPE au CHU Tivoli pour la période janvier 2016- octobre 2017 ont été revus. Le CHU Tivoli est un hôpital périphérique de 518 lits, avec un nombre d’admissions annuel de 20 984 patients en 2016 et 17 745 (janvier à octobre 2017) pour 138.550 journées d’hospitalisations en 2016 et 115 131 (janvier-octobre 2017). Le type d’infection a été répertorié en fonction du diagnostic du clinicien au moment de la prise en charge du patient et des résultats microbiologiques disponibles. Un score de gravité pour ces infections n’a pas pu être réalisé rétrospectivement. Les caractéristiques cliniques des patients ont été récoltées (données démographiques, unité d’hospitalisation au moment de l’infection et facteurs de co-morbidités). La mortalité associée à ces infections a été enregistrée au quatorzième jour. Les patients ont été classés en «survivants» et «non survivants», dans le but de dégager un éventuel profil associé à un échec clinique au traitement de ces infection CPE OXA-48-like.

2. Détermination microbiologique de la résistance au carbapénem :

La production de carbapénemase était suspectée par méthode de disque diffusion selon les critères EUCAST 2016 (11). La détermination de la production de l’enzyme OXA-48-like était déterminée par méthode immunochromatographique (OXA-48 K-Set, Coris BioConcept®, Belgium). La détermination des concentration minimales inhibitrices (CMI) pour le meropenem était déterminée par la méthode E-test (Biomérieux®). La CMI pour la colistine était déterminée par la méthode E-test (Liofilchem®) pour 24 des infections et par méthode de microdilution pour les 5 autres (Liofilchem® SensiTest Colistin). Les souches n’ont pas systématiquement été envoyées au laboratoire de référence des Bacilles Gram Négatifs (BGN). Les valeurs des CMI pour le meropenem ont été classées en 7 catégories, réparties entre des valeurs < 1 μg/ml à ≥ 32 μg/ml.

3. Récolte des données relatives au traitement antibiotique reçu :

Les traitements administrés ont été catégorisés en monothérapie, bithérapie, trithérapie et absence de traitement. Les antibiotiques suivants ont été utilisés : meropenem, colistiméthate sodique (colistine), tigecycline, trimethoprim/sulfamethoxazole, amikacine et nitrofurantoine. Les doses de charge et d’entretien, ainsi que le mode d’administration des molécules ont été récoltées. Pour le colistiméthate, une dose de charge de 9 millions d’unités internationales était administrée indépendamment de la fonction rénale. La dose unitaire de meropenem était de 1g pour les CMI < 2 μg/ml et de 2g pour les CMI ≥ 2 <16 μg/ml. Le meropenem était perfusé en 3h. 

Résultats :

Parmi les 29 infections à CPE, 34 Enterobactéries ont été isolées, plusieurs infections étaient polymicrobiennes. Le type de carbapnénemase identifié pour ces 34 souches était de type OXA-48-like. 
Vingt patients (69%) étaient en vie au quatorzième jour de l’infection (« survivants ») et neuf (31%) étaient décédés (« non-survivants ») (tableau 1). Parmi les 29 infections, Klebsiella pneumoniae représentait 47% des souches, suivi par E. Coli (20%). Klebsiella oxytoca et les Enterobacters spp prédominaient à 27% dans le groupe « non-survivants ». L’origine de l’infection était urinaire dans 31% des cas, intra-abdominale dans 31%, due à des plaies dans 14%, respiratoire dans 10% et 7% étaient des bactériémies. L’origine de l’infection était indéterminée dans 7% des cas. Cette répartition était différente dans les groupes « survivants » et « non-survivants».
Dans le premier groupe, la majorité des infections étaient urinaires (45%), comparativement au groupe des « non-survivants, où les infections intra-abdominales prédominaient (33%), suivie des bactériémies (26%) et des plaies (26%).

Tableau 1 : Identifications et origine des 29 infections
à CPE OXA-48-like (n=29) :
L’âge médian des patients était de 74 ans, avec une prédominance de femmes (55%)     (tableau 2). Les patients étaient majoritairement hospitalisés dans les unités de médecine (48%) et aux Soins Intensifs (31%). Dans le groupe des « non-survivants», 78% des patients séjournaient aux Soins Intensifs. Le nombre de co-morbidités, en particulier la présence d’un diabète (44%), d’une insuffisance rénale (44%), d’une cirrhose hépatique (33%), d’ un traitement immunosuppresseur et d’une chirurgie récente (dans les 3 mois qui précèdent) étaient plus nombreux dans les groupe « non-survivants » (tableau 2).

 Tableau 2 : Caractéristiques des patients (n=29) :

Concernant les CMI au meropenem, elles ont été déterminées sur 29 des 34 souches cliniques (tableau 3). Pour les 5 autres, la CMI a été déterminée sur des frottis de dépistage réalisés antérieurement. La majorité des souches (13/29) avaient une CMI < 1 mg/ml. Pour 9 souches, les CMI étaient très élevées (≥32 mg/ml), sans confirmation de ces valeurs par le laboratoire de référence. Ces CMI élevées étaient prédominantes dans le groupe des patients « non-survivants » (36%).

Tableau 3 : Distribution des CMI du meropenem pour les souches CPE OXA-48-like 

Le traitement antibiotique administré a été déterminé par l’infectiologue, en collaboration avec le clinicien, et était fonction de l’état clinique du patient. Cinquante-neuf pourcent des patients ont reçu une monothérapie, 31% une bithérapie (majoritairment combiné a du meropenem ou de la colistine) et 7% une trithérapie. Un patient n’a pas été traité car il était en Soins Palliatifs. Le choix d’une monothérapie, bithérapie ou trithérapie était déterminé par la gravité de l’infection et de l’antibiogramme de la CPE. Les bithérapies sont prédominantes dans le groupe « non-survivants (56%) vu l’état clinique plus sévère de ces patients. Les trithérapies ont peu été prescrites, et n’étaient pas toujours possible vu la résistance des CPE aux différents antibiotiques testés disponibles en 2016-2017 en Belgique (tableau 4).

Tableau 4 : traitements antibiotiques administrés

Discussion 

Le traitement des infections à CPE constitue un challenge pour le clinicien. Peu d’antibiotiques sont actifs sur les CPE. Une importante mortalité (entre 39 et 71%) est associée aux infections sévères, en particulier aux bactériémies (4-10). Les drogues de derniers recours sont le plus souvent la colistine, la tigecycline, la fosfomycine (non disponible en Belgique) et les aminoglycosides. 
Les données disponibles pour le traitement de ces infections, avant la publication de l’étude multicentrique AIDA (9) étaient issues d’études rétrospectives (4-7). Il était suggéré que les thérapies combinées étaient supérieures aux monothérapies. Ces études ont été réalisées majoritairement pour les Klebsiella pneumoniae productrices de carbapénemase KPC (5, 6).  
Les bithérapies peuvent en outre engendrer le développement de bacteries résistantes au carbapénem et la survenue d’infection à Clostridium difficile (9).
Dans ce contexte, l’étude randomisée contrôlée AIDA a comparé le traitement « colistine seule » versus « colistine plus carbapenem » pour les infections sévères à bacilles gram négatif résistants au carbapénem. Les résultats de cette étude ont montré que la bithérapie n’était pas supérieure à la monothérapie « colistine seule » dans le groupe Acinetobacter baumannii. Des conclusions concernant les Enterobactéries n’ont pu être tirées, vu le manque de puissance de l’étude pour ce groupe. Il est à noter que les CMI meropenem étaient majoritairement supérieures à 8 mg/l dans cette étude.
La méta-analyse réalisée par Vardakas et al (10) comparant les « traitements combinés colistine « versus « colistine seule » a conclu que le traitement combiné ne diminue pas la mortalité des infections sévères à BGN résistants au carbapénem. Il pourrait peut-être y avoir un bénéfice quand la colistine est administrée à haute dose (>6 millions unités internationales/jour) chez les patients avec une bactériémie en Asie ou une infection à Acinetobacter baumannii.
Toutes ces études ne permettent donc pas d’établir le meilleur traitement pour les infections sévères à CPE.
Dans notre revue de 29 cas d’infections CPE OXA-48-like, de gravité différentes, les bithérapies ont été majoritairement prescrites pour les cas sévères. Dans la majorité des cas, vu les CMI meropenem <16mg/ml, le meropenem a pu être prescrit. La colistine était utilisée avec une dose de charge de 9 millions unités internationales, indépendamment de la fonction rénale, et suivie d’une dose d’entretien adaptée à la clearance de créatinine. Il n’y a pas eu de Therapeutic Drug Monitoring (TDM).
Les infections urinaires non compliquées ont pu être traitées par du trimethoprime/sulfamethoxazole ou nitrofurantoine, avec une bonne évolution clinique. 
Les trithérapies ont uniquement été prescrites dans les cas très sévères, quand l’antibiogramme permettait la combinaison de 3 molécules.
La mortalité associée à ces 29 infections OXA-48-like est élevée, puisque de 31% des patients sont décédés. La majorité d’entre eux présentaient plusieurs facteurs de comorbidités.

Conclusions  

A ce jour il n’y a pas de recommandations claires pour le traitement des infections sévères à CPE. Il n’est pas encore formellement établi dans des études randomisées que les thérapies combinées soient supérieures aux monothérapies.
D’autres études seront nécessaires pour clarifier cette prise en charge, et idéalement en fonction du type de carbapénemase impliquée.
De nouvelles molécules sont attendues prochainement sur le marché (ceftazidime+avibactam, meropenem-vaborbactam), ce qui permettra d’élargir le choix des molécules utilisables pour traiter ces infections, de nouveau en fonction du type de carbapénémase impliquée, en espérant que cela puisse en améliorer le pronostic.

Références  :

1. Grundmann H, Glasner C, Albiger B, et al. Occurrence of carbapenemase-producing Klebsiella pneumoniae and Escherichia coli in the European survey of carbapenemase-producing Enterobacteriaceae (EuSCAPE): a prospective, multinational study. Lancet Infect Dis. 2017 Feb;17(2):153-163.

2. De Laveleye M, Huang TD, Bogaerts P, et al. Increasing incidence of carbapenemase-producing Escherichia coli and Klebsiella pneumoniae in Belgian hospitals. Eur J Clin Microbiol Infect Dis. 2017 Jan;36(1):139-146.

3. Huang TD, Bogaerts P, Berhin C, Hoebeke M, Bauraing C, Glupczynski Y; a multicentre study group. Increasing proportion of carbapenemase-producing Enterobacteriaceae and emergence of a MCR-1 producer through a multicentric study among hospital-based and private laboratories in Belgium from September to November 2015. Euro Surveill. 2017 May 11;22(19). 

4. Balkan II, Aygün G, Aydın S, Mutcalı SI, et al. Blood stream infections due to OXA-48-like carbapenemase-producing Enterobacteriaceae:  treatment and survival. Int J Infect Dis. 2014 Sep;26:51-6.

5. Daikos GL, Tsaousi S, Tzouvelekis LS, et al. Carbapenemase-producing Klebsiella pneumoniae bloodstream infections: lowering mortality by antibiotic combination schemes and the role of carbapenems. Antimicrob Agents Chemother. 2014;58(4):2322-8.

6. Tumbarello M, Viale P, Viscoli C, et al.Predictors of mortality in bloodstream infections caused by Klebsiella pneumoniaecarbapenemase-producing K. pneumoniae: importance of combination therapy. Clin Infect Dis. 2012 Oct;55(7):943-50.

7.  Gutiérrez-Gutiérrez B, Salamanca E, de Cueto M, Hsueh PR, et al. Effect of appropriate combination therapy on mortality of patients with bloodstream infections due to carbapenemase-producing Enterobacteriaceae (INCREMENT): a retrospective cohort study. Lancet Infect Dis. 2017 Jul;17(7):726-734.

8. Pletz MW, Hagel S, Forstner C. Who benefits from antimicrobial combination therapy? Lancet Infect Dis. 2017 Jul;17(7):677-678.

9. Paul M, Daikos GL, Durante-Mangoni E, Yahav D, Carmeli Y, et al. Colistin  alone versus colistin plus meropenem for treatment of severe infections caused by carbapenem-resistant Gram-negative bacteria: an open-label, randomised controlled trial. Lancet Infect Dis. 2018 Apr;18(4):391-400.
10. Vardakas KZ, Mavroudis AD, Georgiou M, Falagas ME. Intravenous colistin combination antimicrobial treatment vs. monotherapy: a systematic review and meta-analysis. Int J Antimicrob Agents. 2018 Apr;51(4):535-547

11. EUCAST. Breakpoints table for interpretation of MICs and zone diameter 2016. www/eucast.org

Virus fréquents en pédiatrie, un défi pour l’équipe d’hygiène hospitalière


Introduction   

• Sommaire
En période hivernale, la demande de chambres d’isolement est particulièrement élevée au service de pédiatrie, en particulier pour les infections des voies respiratoires. Chaque année, les enfants de moins de 2 ans font en moyenne face à 6 à 10 épisodes d’infection respiratoire  (1). Cet article s’intéresse à trois virus auxquels les services de pédiatrie sont le plus souvent confrontés et pour lesquels certaines incertitudes subsistent quant à la politique de précautions additionnelles à adopter.
La plus grande partie des patients hospitalisés pour des difficultés respiratoires sont infectés par le virus VRS (virus respiratoire syncytial) ou influenza. Ces 2 virus constituent les principales causes d’hospitalisation pour infections virales respiratoires durant l’automne et l’hiver. Nous aborderons également ici le virus varicelle-zona (VZV), pour lequel les modalités d’application de précautions de type «air» seront revues.

• Importance des mesures de prévention de la transmission
Outre les mesures de précautions «standards ou générales», il convient de prendre également des précautions additionnelles (PA) pour les patients hospitalisés à cause d’une affection par l’un des virus précités.  Ces mesures additionnelles sont nécessaires pour empêcher que d’autres patients hospitalisés ne contractent une infection respiratoire nosocomiale. La prévention de telles infections associées aux soins est de la plus haute importance, car ces infections s’accompagnent d’une morbidité et d’une mortalité accrues. En outre, l’application d’une bonne hygiène de la toux par le patient peut contribuer à la prévention de la transmission des micro-organismes respiratoires. Il convient d’encourager le patient à tousser ou éternuer dans un mouchoir en papier, pour ensuite jeter le mouchoir à la poubelle et bien se laver les mains. Il est préférable que le patient reste à au moins 1 mètre d’autres personnes lorsqu’il tousse ou éternue.
Pour chaque type d’isolement, il est nécessaire d’informer les visiteurs des éventuelles mesures à prendre. Il est préférable de limiter les visites.
L’article de Burin et al. (2018)  démontre l’importance d’une application rapide et correcte de mesures additionnelles dans la prévention de la transmission de ces infections. Cet article compare l’acquisition nosocomiale de ces infections en la présence ou l’absence de mise en place de précautions additionnelles. Cette comparaison est illustrée par la figure ci-dessous (Figure 1) : durant la phase « Pre », aucune mesure supplémentaire d’isolement n’est prise, alors que dans la phase « Post » bien.

Figure 1 Comparaison de la transmission nosocomiale avec ou sans précautions additionnelles

 

 

 

 

 

 

 

 

(hMPV : human metapneumovirus, PIV : Parainfluenza, flu : influenza)

Afin d’éviter le plus rapidement possible la propagation d’un micro-organisme, il est important non seulement de prendre les mesures additionnelles lorsque le micro-organisme est identifié, mais aussi d’initier l’isolement sur la base d’un tableau clinique spécifique. Dans le mémoire de maîtrise de Sleekx S., il est également indiqué que les patients soupçonnés d’être infectés ou colonisés par un micro-organisme facilement transmissible devraient déjà être inclus dans l’isolement. 
La figure ci-dessous donne un aperçu de la propagation des infections respiratoires nosocomiales par saison. Comme il y a davantage de patients hospitalisés pour des infections respiratoires en hiver/ automne (voir la figure 2), le risque de propagation est également plus important durant ces saisons. 

Figure 2 Propagation des infections respiratoires nosocomiales en fonction des saisons 

Virus respiratoire syncytial (VRS) 

Le virus respiratoire syncytial appartient à la famille des paramyxoviridae (2). 
Le VRS se propage principalement par les gouttelettes projetées dans l’air lorsqu’une personne infectée tousse ou éternue (2, 4, 5, 6). La transmission peut également se faire par le biais de gouttelettes présentes sur les mains, des surfaces ou des vêtements. Le VRS entre généralement dans l’organisme par les muqueuses du nez, de la gorge (2, 4, 5) ou des yeux (2,5). Le virus va se multiplier dans le rhinopharynx avant d’atteindre les bronches, les bronchioles et les alvéoles (4).
Les symptômes apparaissent au terme d’une période d’incubation de deux à huit jours (2,4). Ils peuvent varier d’un simple rhume à une pneumonie sévère (3,4, 5).
Un à deux pour cent des enfants de moins de six mois souffrant d’une infection à VRS doivent être hospitalisés (5). Dans ce cas, des mesures doivent être prises pour éviter que le virus ne contamine d’autres patients ou soignants. Après sortie du patient, la chambre doit également faire l’objet d’un entretien plus poussé (détersion/désinfection).
Les patients atteints par le VRS doivent être hospitalisés en précautions additionnelles de type contact. Si le patient tousse, on portera un masque conformément aux précautions générales (6). Les mesures d’isolement doivent être maintenues pendant toute la durée de la maladie (6).
Le patient sera hospitalisé de préférence dans une chambre individuelle (6, 7). Les cohortes d’isolement offrent une alternative si aucune chambre individuelle n’est disponible (2, 6).  Les mesures supplémentaires prises pour ce patient doivent être affichées à l’extérieur de la chambre à la vue de tous (7). Il est demandé de porter une blouse, des gants et un masque pour entrer dans la chambre. Ces équipements de protection individuelle doivent être retirés avant de quitter la chambre (6).
La chambre doit être équipée d’un minimum de matériel de soins (7). Le matériel sera utilisé pour un même patient autant que possible. En cas contraire, il sera nettoyé et désinfecté entre deux patients (2).
À la fin des précautions additionnelles (PA) le matériel qui peut être nettoyé et désinfecté de manière adéquate subira les procédures prévues à cet effet (6,7). Le matériel qui ne peut pas être nettoyé et désinfecté devra être jeté. Le VRS présent dans les gouttes de sécrétion nasale peut survivre pendant six heures sur des surfaces dures (2, 4, 8). En revanche, il se désactive endéans l’heure sur les matériaux plus mous comme les vêtements, tentures, mouchoirs en papier (2, 4, 8). Nous pouvons en conclure qu’il est capital de nettoyer et désinfecter correctement la chambre après la sortie du patient. Il n’est pas nécessaire de retirer les rideaux vu la courte durée de vie du virus sur les matériaux mous. 

Virus Influenza 

Les virus influenza appartiennent à la famille des Orthomyxoviridae (15). 
Le virus de la grippe se transmet par des gouttelettes qui se déplacent (< 1 mètre) dans l’air (6, 16). La contamination se produit généralement via les muqueuses des voies aériennes et plus rarement via la conjonctive (18). La durée d’incubation pour la grippe est de 1 à 4 jours, avec une moyenne de 2 jours (16). Les jeunes enfants peuvent être contagieux jusqu’à 10 jours après l’apparition des symptômes (16, 18). Cette période est plus longue que chez les adultes (17). Les symptômes de la grippe tels que fièvre, douleurs musculaires, malaise généralisé, etc. surviennent généralement de manière soudaine(15)
Ces patients seront hospitalisés de préférence en chambre individuelle. Un traitement spécifique de l’air n’est pas nécessaire (6). Il convient de porter un masque chirurgical en cas de contact étroit avec le patient (6). Les mesures supplémentaires à prendre pour entrer dans la chambre doivent être affichées à l’extérieur et à la vue de tous (19).
Le virus de la grippe peut survivre 24 à 48 h sur des surfaces non poreuses, jusqu’à 12 h sur des surfaces poreuses (18). 
La chambre doit être équipée d’un minimum de matériel de soins 19). Le matériel sera utilisé pour un même patient autant que possible. En cas contraire, il sera nettoyé et désinfecté entre deux patients (19). La chambre doit être également nettoyée et désinfectée en profondeur au terme de l’isolement. Comme indiqué précédemment, la transmission par contact indirect est négligeable et il n’est donc pas nécessaire de remplacer les rideaux (18). 

Virus varicelle-zona (VZV)

La varicelle est provoquée par un herpès virus : le virus varicelle-zona (10, 11). Le temps d’incubation du virus est de 10 à 21 jours (la plupart du temps 13 à 18 jours) (10, 11). La maladie se manifeste soudainement par des taches rouges sur la tête et le tronc. Ces taches laisseront ensuite place à des boutons, qui deviendront plus tard des vésicules (10,11). 
La porte d’entrée est l’épithélium respiratoire du rhinopharynx (10, 11). La transmission peut se faire par contact avec le contenu des vésicules, par gouttelettes ou par voie aérogène (noyau de condensation) (6, 9, 10, 11).
The American Association of Paediatrics a décrit une exposition comme suit (10,11) :
-Contacts familiaux (personnes du même foyer que le patient
de référence)
-Contact face à face (moins de 2 mètres de distance pendant au moins 5 minutes)
-Séjour dans la même pièce que le patient de référence
pendant plus d’une heure.
Les patients qui doivent être hospitalisés pour une varicelle doivent être soignés en chambre d’isolement avec des précautions additionnelles de type contact et air (6, 9).  Cet isolement doit être maintenu jusqu’au dessèchement total des vésicules (6, 9, 10).
Une fois de plus, il convient d’indiquer à la porte de la chambre que des mesures supplémentaires doivent être prises en plus des mesures de précautions classiques avant d’entrer (12). Comme le virus se déplace dans l’air, il est recommandé de prévoir un traitement supplémentaire de l’air dans la chambre (6, 13).  S’il s’agit d’un bâtiment neuf, on tendra à 12 renouvellements d’air par heure, 6 en cas de bâtiment rénové (6). L’air sera de préférence évacué directement vers l’extérieur. En cas contraire, il peut être réutilisé moyennant passage par un filtre HEPA (6). S’il n’est pas possible d’hospitaliser le patient dans une chambre dont l’air est traité, il est recommandé de ne laisser entrer que du personnel immunisé contre le virus de la varicelle pour le soigner (13). Les équipements de protection individuelle suivants doivent être portés pour pénétrer dans la chambre : gants, blouse et masque FFP2 (12). Le masque doit être correctement ajusté avant d’entrer dans la chambre (6).
La chambre doit être équipée d’un minimum de matériel de soins (12). Le matériel sera utilisé pour un même patient autant que possible. En cas contraire, il sera nettoyé et désinfecté entre deux patients (12).
À la fin des précautions additionnelles, le matériel qui peut être nettoyé et désinfecté de manière adéquate subira les procédures prévues à cet effet (12). Le matériel qui ne peut pas être nettoyé et désinfecté devra être jeté (12). La chambre doit être nettoyée et désinfectée. Le CDC (Centre pour le contrôle et la prévention des maladies) conseille de ne remplacer les tentures aux fenêtres que lorsqu’elles sont visiblement souillées (14).

Conclusion

Compte tenu des complications possibles d’une infection respiratoire chez les enfants, il est impératif de prévenir toute transmission nosocomiale entre les patients. À cet effet, il convient de mettre en place dès que possible les précautions additionnelles correctes. Il ne faut pas attendre de confirmation microbiologique pour mettre les mesures en place, un tableau clinique clinique suffit. Pour éviter les contaminations, il est non seulement important d’instruire les soignants de l’hôpital, mais aussi, si possible, d’informer les patients et leurs visites/familles. 

Références :

1. L. Schanzer, M. Saboui, L. Lee, A. Nwosu, C. Bancej.  Burden of influenza, respiratory syncytial virus, and other respiratory viruses and the completeness of respiratory viral identification among respiratory inpatients, Canada, 2003-2014. Influenza and other respiratory viruses. 2017.
2. Institut national de la santé publique et de l’environnement. Infections VRS. 2012.
3. C.E. French, B.C. McKenzie, C. Coope, S. Rajanaidu, K. Paranthaman, R. Pebody, J.S. Nguyen-van-tam, Noso-RSV group, J.P. T. Higgins, C.R. Beck. Risk of nosocomial respirtory syncytial virus infection and affectiveness of control maesures to prevent transmission events: a systematic review. Influenza and other respiratory viruses. 2016.
4. Zorg en gezondheid. RS-virus.
5. CDC. Respiratory syncytial virus infection. 2017.
6. CDC. 2007 Guideline for isolation precautions: preventing transmission of infectious agents in healthcare settings. 2017.
7. WIP. Contactisolatie. 2011.
8. CDC. RSV trasmission. 2017.
9. WIP. Indicaties voor isolatie. 2014
10. Zorg en gezondheid. Varicella- en herpeszostervirusinfectie – waterpokken en gordelroos.
11. LCI-richtlijnen. Waterpokken. 2017.
12. WIP. Strikte isolatie. 2011.
13. CDC. Preventing varicella in health care settings. 2016. 
14. CDC. Guidelines for Environmental Infection Control in Health-Care Facilities. 2003.
15. WIV. Influenza.2018
16. CDC. Recommendations of the Advisory Committee on Immunization Practices (ACIP). 2008.
17. WHO. Weekly epidemiological record Relevé épidémiologique hebdomadaire.2012.
18. LCI-richtlijnen. Influenza. 2017.
19. WIP. Druppelisolatie. 2011
20. E.J. Chow, L.A. Mermel. Hospital –acquired respiratory viral infections: incidence, morbidity and mortality in pediatric and adult patiënts. 2017.
21. L.G. Burin, N.Kohn, S. Nullet, M. Hill. Reduction in rate of nosocomial respiratory virus infection in a children’s hospital associated with enhanced isolation precautions. 2018.
22. Gezondheidswetenschappen. Terugkerende infecties en afweerstoornissen bij kinderen. 2018. Geraadpleegd op 19/06/2018 op :
https://www.gezondheidenwetenschap.be/richtlijnen/terugkerende-infecties-en-afweerstoornissen-bij-kinderen
23. Sleeckx S. Een kwalitatief onderzoek naar de beleving van ouders met een kind in isolatie. 2004-2005