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A. L. Traversari, C. Bottenheft, S. P. M. van Heumen, C. A. Goedhart, M. C. Vos

Effect of switcing off unidirectional downflow systems of operating theatres during prolonged inactivity on the period before the operating theatre can safely be used.

American Journal of Infection Control, 2017 vol 45 (2) pp139-144.

L’arrêt des systèmes de conditionnement d’air des blocs opératoires pendant des périodes d’inactivité prolongées (week-end, nuits) peut conduire à de substantielles économies d’énergie. Cependant, nous avons peu de renseignements sur les effets de l’arrêt des conditionnements d’air pendant des  périodes d’inactivité prolongée sur la qualité de l’air des blocs opératoires pendant les périodes opérationnelles. Le but de l’étude est de déterminer le temps nécessaire après la remise en route du système de conditionnement d’air pour retrouver une situation stable avec une qualité d’air au moins aussi bonne que lors de l’arrêt du système de conditionnement. Les mesures sont effectuées dans 3 blocs opératoires, chacun équipé d’un système de flux unidirectionnel (UDF). Les mesures (comptage des particules émises présentant une taille ≥ 0,5µm) sont prises pendant la remise en route du système de ventilation pour déterminer quand les degrés de protection pré spécifiés sont atteints. Les températures sont prises pour déterminer quand une différence stable de température est atteinte entre la périphérie et la zone protégée, signifiant une situation stable.

Après la remise en route du système, la zone protégée atteint le degré de protection dans les 20 minutes (limite maximale de confiance 95 %). Une différence de température stable est atteinte dans les 23 minutes (limite maximale de confiance 95 %). Les deux données s’étendent bien dans la période de 25 minutes normalement requise pour la préparation avant le début de l’intervention.

Nous concluons que l’arrêt du système de ventilation pendant des périodes d’inactivité prolongée (la nuit et le week-end) n’a pas d’effet négatif sur la qualité de l’air des salles d’opération UDF pendant les heures d’utilisation.

T. Gormley, T. A. Markel,  H. W. Jones III, J. Wagner, D. Greeley, J. H. Clarke, M. Abkowitz, J. Ostojic

Methodology for analysing environmental quality indicators in a dynamic operating room environment.

American Journal of Infection Control, 2017 Vol 45 (4) : 354-359.

Des quantités suffisantes et contrôlées d’air de qualité et un flux unidirectionnel sont des éléments importants pour fournir un environnement sûr pour les blocs opératoires. Pour réaliser des évaluations dynamiques de l’environnement du quartier opératoire, il est nécessaire de produire une méthode validée de test  des multiples facteurs influençant la qualité de l’air. Ceci inclut les caractéristiques suivantes ; température, humidité, charge en particules, nombre des contaminants microbiens, pression, vitesse et distribution de l’air. L’équipe a développé les « indicateurs de qualité de l’environnement » (EQIs) pour décrire la qualité générale de l’air basés sur les mesures actuelles de ces caractéristiques relevées pendant des simulations opératoires. Ces indicateurs sont relevés dans 3 hôpitaux différents pendant des simulations d’interventions chirurgicales pour simuler les conditions actuelles en bloc opératoire. EQIs incluent des évaluations microbiennes sur la table d’opérations et sur la table d’instruments, un comptage en temps réel du nombre de particules en 9 endroits définis dans la salle d’opérations. La vitesse de l’air est mesurée à la surface des bouches de pulsion, au niveau du champ stérile, de la table d’instruments et à la grille de reprise.

Le protocole de test a fourni des mesures des indicateurs de qualité de l’air consistantes et comparables entre les institutions. A 20 renouvellements d’air /heure (ACH) et à une température de 66,3 °F (19° C) , la médiane des contaminants microbiens pour les 3 salles d’opérations est de 3-22 unités formant colonies (CFU)/m³ au niveau du champ stérile et de 5-27 CFU/m³ à la table d’instruments. A 20 ACH, le niveau médian de particules de 0,5 µm sur les 3 sites est de 85079, 85325 et 912232 particules/m³ avec une augmentation prévisible en charge particulaire dans l’air filtré par filtre non haute efficience du site de la salle d’opérations. En utilisant une comparaison avec les chambres propres standard, le comptage microbien et particulaire dans les 3 salles d’opérations pendant les simulations est équivalent aux classes 7 et 8  de International Organization for Standardization. Nous concluons que le protocole EQI est mesurable et constant et, de ce fait, peur être sûrement utilisé pour évaluer la qualité de l’air dans un environnement de soins pour donner une guidance aux pratiques opérationnelles et aux exigences réglementaires.

S. Boudjema, C. Tarentini, P. Peretti-Watel, P. Brouqui

Merging video coaching and an anthropologic approach to understand health care provider behavior toward hand hygiene protocols.

American Journal of Infection Control, 2017 Vol 45 (5) : 487-491.

Nous avons utilisé des vidéos de soins de routine pour analyser la déviance des soignants par rapport aux protocoles et avons organisé des interviews de suivi conduits par un anthropologue et une infirmière. Après avoir donné leur consentement, des soignants sont filmés pendant des soins de routine par un système vidéo commandé à distance. Chaque participant est invité à regarder ses comportements enregistrés sur 2 vidéos différentes montrant des pratiques de routine et sa déviance par rapport au protocole et à faire ses commentaires. Après cette étape, une interview plus poussée basée sur les recommandations pré établies est organisée et une discussion engagée sur les explications des déviances constatées. Ce procédé est réalisé dans le but de révéler la subjectivité du soignant ; c’est-à-dire comment ils perçoivent les opportunités à l’hygiène des mains dans leur routine quotidienne, quelles sont les difficultés qu’ils rencontrent et comment ils essaient de les résoudre.

Nous avons sélectionné 43 de 250 prises vidéos créées pendant l’étude ce qui nous a permis d’étudier 15 des 20 soignants. 20 des 43 vidéos montrent une ou plusieurs brèches dans le protocole d’hygiène des mains. Les brèches sont souvent liées à l’utilisation abusive de gants. La déviance au protocole est expliquée par les soignants comme le résultat d’une adaptation du comportement, c’est-à-dire faire face à des contraintes de travail qui ne prennent pas en compte les protocoles de contrôle de l’infection. Les pratiques professionnelles et les protocoles devraient être revus pour aboutir à des messages simples qui sont adaptés aux nécessités dans un environnement clinique réel.

R. E. Taylor

The role of message strategy in improving hand hygiene compliance

American Journal of Infection Control, 2015 Vol 43 (11) : 1166-1170.

Malgré l’augmentation de l’attention à l’hygiène des mains dans la décennie passée, les taux de compliance restent relativement bas. Bien qu’il y ait eu des avancées dans la science de l’hygiène des mains, peu d’attention a été mise dans les messages pour la promouvoir. Un total de 86 soignants membres de l’Association Professionnelle du Contrôle de l’Infection et d’Epidémiologie (ICPs) ont participé à une évaluation online de 6 messages stratégiques. Les participants ont évalué les stratégies en facilité de compréhension, croyance et si les stratégies de messages sont susceptibles d’augmenter l’hygiène des mains. Sur les 6 stratégie, personnelle, sociale, sensorielle, routine, nécessité aiguë et rationnel, la stratégie sociale est considérée comme la plus à même de conduire à l’action. La stratégie sensorielle n’est pas considérée comme la moins pertinente mais même contre productive.

Les ICPs devraient ajouter une stratégie de message social aux programmes de communication promouvant l’hygiène des mains. Bien que des études futures soient nécessaires, les stratégies personnelle, routine et nécessité aiguë montrent une promesse d’entrer à petits pas dans les motivations qui peuvent augmenter la compliance.

Réaliser une hygiène des mains correcte et une désinfection chirurgicale des mains sont essentiels pour réduire le taux des infections associées aux soins, y compris les infections de la plaie opératoire. Les « Recommandations pour l’hygiène des mains » de l’AORN mises à jour donnent un guide pour l’hygiène des mains et le désinfection chirurgicale des mains, le port de bijoux, les produits d d’entretien des ongles et les ongles artificiels, les soins de la peau adéquats pour éviter les dermatites, le choix des produits d’hygiène des mains et des considérations portant sur l’assurance de qualité ainsi que l’amélioration de la performance. L’article se concentre sur les points principaux des recommandations pour aider les personnel intervenant en péri opératoire à prendre des décision conscientes concernant l’hygiène des mains et la désinfection chirurgicale des mains. Les points cruciaux nécessitent de maintenir les ongles et la peau en parfaite santé, de ne pas porter de bijoux sur les mains ou les poignets dans l’environnement péri opératoire, de réaliser unes hygiène des mains et une désinfection chirurgicale des mains correctes et de faire participer les visiteurs et les patients aux initiatives visant l’hygiène des mains. Les infirmières en environnement péri opératoire devraient revoir complètement les recommandations pour parfaire l’information et la guidance au moment de mettre à jour et de rédiger les politiques et les procédures.

D. J.  Gould ; S. Creedon : A. Jeanes ; N. S . Drey ; J. Chudleigh ; D. Moralejo

Impact of observing hand hygiene in practice and research : a methodological reconsideration.

Journal of Hospital Infection,2017 Vol 95 (2) : 169-174.

L’objectif de l’hygiène des mains est de rompre la chaîne de l’infection associée aux soins. Dans beaucoup de pays, l’hygiène des mains est auditée régulièrement comme partie de l’assurance qualité basée sur les recommandations de l’OMS . L’observation directe est la méthode d’audit recommandée mais présente aussi des inconvénients, y compris, pour les personnes observées de modifier leur comportement habituel. L’effet Hawthorne lié à l(hygiène des mains est analogue à l’augmentation de la productivité par augmentation de la fréquence avec laquelle l’hygiène des mains est réalisée. Une observation non intrusive et/ou une observation fréquente pour habituer le personnel à la présence des observateurs est considéré comme une façon acceptable de réduire l’effet Hawthorne mais quelques publications ont interrogé la façon d’implémenter ces techniques  ou d’examiner leur efficience. Il est évident qu’être conscient d’être surveillé peut modifier le comportement habituel des individus dans des directions complexes et non prévisibles autres que simplement un effet de productivité. Sous la présence d’auditeurs, le personnel peut différer ou éviter des activités qui requièrent l’hygiène des mains mais ces attitudes ne sont pas visées dans les recommandations pour les études de la pratique ou de recherche. Cet oubli a des implications pour la validité des résultats des audits de l’hygiène des mains. La mesure de l’utilisation des produits d’hygiène compense ces tactiques d’évitement. Il est moins coûteux et cela génère des données continues d’évaluer la compliance de tous les cliniciens sans perturber les soins au patient. Les inconvénients sont le risque de surestimation dû au gaspillage, à l’élimination ou à l’utilisation par les visiteurs et du personnel non soignant qui fréquente les environnements de soins. Les matériels électroniques peuvent compenser les effets Hawthorne et d’évitement mais sont coûteux et peu utilisés hors des études de recherche.

G. Kampf ; A. Kramer ; M. Suchomel

Lack of sustained efficacy for alcohol-based surgical hand rubs containing ‘residual active ingredients’ according to EN 12791.

Journal of Hospital Infection, 2017 Vol 95 (2) : 163-168.

‘OMS recommande l’utilisation de produits pour les mains présentant une ‘activité prolongée’ pour la préparation chirurgicale des mains. Cette étude a pour but de vérifier si une des formulations pour les mains en base alcoolique contenant des ‘composants actifs’ non volatiles comme le digluconate de chlorhexidine (CHG), le mecethronium ethylsulfate (MES) ou l’orthophénylphénol (OPP) présentent une telle activité prolongée pour la désinfection chirurgicale des mains. Nous avons recherché dans la littérature pour trouver des études respectant la norme EN 12791. Les données publiées sont analysées pour vérifier si une des formulations a une efficacité supérieure à (P &lt ; 0,01) après 3 heures en comparaison à la procédure de référence. Les formulations avec 0,5 et 1 % de CHG en isopropanol ou 61 % d’éthanol ne sont pas supérieures après 3 heures. Les formulations avec 0,2 % MES dans 45 % d’isopropanol et 30 % de n-propanol ne sont aussi pas supérieures lorsqu’elles sont appliquées pendant une minute (une étude), la recommandation d’utilisation est de 1min30 (14 études) et 2 minutes (1 étude). Lorsqu’elles sont appliquées pendant 3 minutes, les formulations sont supérieures dans 3 des 7 études. Le produit pour les mains avec 0,1 % OPP dans 78,2 % éthanol n’est pas non plus supérieur au traitement de référence lorsqu’il est appliqué, comme recommandé, pendant 1,5 minute. Il apparaît raisonnable et responsable de limiter l’exposition dermique et environnementale aux agents biocides avec un avantage clair comme pour les alcools. Par analogie pour éviter les teintures et les fragrances dans les produits pour les mains, les formulations contenant des substances ‘actives’ sans bénéfice clair mais avec des risques potentiels devraient être évités lorsqu’il existe des formulations présentant un même niveau d’activité antimicrobien, de tolérance dermique et d’acceptation pour l’utilisateur.

A. F. Widmer

Surgical hand hygiene: scrub or rub?

Journal of Hospital Infection, 83 (Supplement 1) : S35-S39, février 2013.

La désinfection chirurgicale des mains est un soin standard avant toute procédure chirurgicale. Des perforations péri opératoires des gants sont observées dans presque 30 % des interventions et sont un facteur de risque d’infection post opératoire. Dans le passé, la norme était le lavage des mains à l’eau et avec un savon antibactérien (lavage chirurgical), le plus souvent avec de la chlorhexidine ou de l’iode. Plus récemment, un produit pour les mains en base alcoolique a été introduit avec succès, démontrant une efficacité supérieure, une moindre irritation des mains et requérant moins de temps que le lavage chirurgical des mains. Tous les produits devraient présenter un effet rémanent qui retarde la croissance microbienne sur la main gantée. Certains des produits en base alcoolique sont efficaces (comme déterminé par la norme européenne EN 12791) endéans les 90 secondes alors que d’autres nécessitent 3 à 5 minutes, comme le lavage chirurgical. La procédure courte se fonde fortement sur une technique exacte et un temps déterminé tels que diminuer le temps d’exposition sous les 90 secondes entraîne une efficacité significativement plus faible de l’effet bactéricide. Aujourd’hui, la désinfection chirurgicale des mains devrait rencontrer le prescrit de la norme EN12791 en Europe, ou d’autres standards comme la monographie de la dernière tentative  de la Food and Drugs Administration aux USA. L’acte est mieux réalisé en utilisant un produit en base alcoolique mais un lavage en utilisant un savon contenant de la chlorhexidine rencontre aussi ces standards.

A. Tammelin, A.-M. Blomfeldt

Comparison of two sigle-use scrubs suits in terms of effect on air-borne bacteria in the operating room.

Journal of Hospital Infection, 2017 Vol 95 (3) : 324-326.

Un bas niveau de bactéries aéroportées dans le bloc opératoire peut être atteint si toute l’équipe porte des vêtements faits de matériau peu perméable (vêtements air propre). L’étude cherche s’il y a une différence d’efficacité de protection entre 2 brosses à usage unique réalisée en polypropylène en les testant pendant des interventions orthopédiques réalisées en routine. Nous n’avons pas décelé de différence significative entre les 2 brossages pour le comptage d’unités formant colonies/m³ ; le choix peut donc se baser sur le type de brosse le plus confortable pour l’équipe.

Jeffrey D. Ho ; R. K. Ansari ; D. Page.

Hand sanitizers rates in an urban emergency medical service system.

The Journal of Emergency Medicine, 2014 Vol 47 (2) : 163-168.

La désinfection des mains, quoique souvent pratique « oubliée », est démontrée comme un facteur  majeur dans la prévention de la transmission des maladies infectieuses dans l’environnement des soins de santé. Des études précédentes ont cherché le taux de désinfection des mains dans les services hospitaliers, mais nous sommes conscients du peu d’études décrivant cela dans les services préhospitaliers. Etant donné que le personnel des services d’urgence médicale (EMS) sont des vecteurs potentiels de la dissémination des maladies infectieuses, il est important de savoir si leur pratique de désinfection des mains est suffisante. L’objectif de cette étude est de décrire le taux de désinfection des mains pour un échantillon acceptable d’un système EMS urbain. Un échantillon convenu de paramédicaux employés par un service d’ambulance urbain (plus de 55000 sorties/an) ont subi une observation prospective en aveugle pendant 6 mois. Les observations sont réalisées par  des étudiants paramédicaux sur des périodes de travail de 8 et 12 heures. Les informations recueillies comprennent les modalités de nettoyage des mains (ex : eau et savon, gel ou mousse germicide, lingette germicide) survenant immédiatement après tout contact patient ou repas. L’utilisation de gants pendant le contact patient est aussi recueilli. Le trajet vers la salle de repos n’est pas directement observé et l’hygiène des mains après cette activité est présumée. La durée de l’hygiène des mains n’est pas rapportée. Les données recueillies sont analysées par des statistiques simples et descriptives.

53 paramédicaux (sur 108 employés paramédicaux) sont observés pendant 258 contacts patient. Les paramédicaux sont observés pour l’hygiène des mains après 162 contacts (62,8 %). Si l’hygiène des mains est réalisée dans les 16 premiers trajets vers la salle de repos après contact patient, la compliance augmente jusqu’à 68,9 %. L’hygiène des mains avant contact patient n’est réalisée que 3 fois (1,1 %)et 9 fois pendant le contact patient (3,5 %).Les gants ne sont pas portés pendant 32 des contacts patient (12,4 %).  L’hygiène des mains est réalisée avant 8 des 42 repas (19 %)et après 25 des 42 repas (59,5 %).

Les opportunités à l’hygiène des mains sont notées dans cet échantillon convenu la majorité du temps en même temps que le contact patient. Cependant ; il semble qu’il y ait un espace substantiel d’amélioration. Ceci suggère que les services EMS devraient travailler à l’amélioration de la compliance à l’hygiène des mains. Une instruction et une éducation accrues ou un accès à l’équipement d’hygiène devraient être étudiés comme des avenues pour augmenter la compliance dans le futur.

E. Vanyoloss, K. Peto, A. Viszlai, I. Miko, I. Furka, N. Nemeth, P. Orosi

Usage of ultraviolet test method for monitoring the efficacy of surgical hand rub technique among medical students.

Journal of Surgical Education, Vol 72 (3), 2015 : 530-535, 2015, mai-juin 2015.

Des mouvements adéquats des mains sont essentiels dans la désinfection chirurgicale des mains, il est donc important que les étudiants en médecine les apprennent correctement. Pour évaluer l’efficacité, nous avons utilisé le test à lumière ultra-violette (UV) après application d’une solution fluorescente. Nous avons analysé les images digitales des mains de 253 étudiants réalisée lors de la formation « Technique Chirurgicales de Base » des 10ème (période 1) et 14ème (période2) semaine de formation pour tester le processus et le développement des outils. La dernière étape de la formation à la désinfection chirurgicale des mains est réalisée avec une solution fluorescente, puis les mains sont placées sous le lumière UV. Des photos sont réalisées et analysées. Toute surface non couverte est considérée comme une erreur. Le nombre et la localisation endroits oubliés et leur surface sont déterminés. Pour l’évaluation, les côtés palmaires (P) et dorsal (D) des mains sont divisés en région d’intérêt (1-phalange distale, 2-pouce et premier métacarpe, 3-deuxième au cinquième doigt, 4-deuxième au cinquième métacarpien).

Des erreurs variées en nombre et étendue sont survenues chez 123 (48,61 %) étudiants pendant la période 1 et chez 65 (25,69 %) en période 2. Les sites les plus fréquemment oubliées sont les régions D2 et P4 lors de la période 1 et D1 et P4 pour la période 2. Il y a eu une amélioration lors de la période 2 comme montré par la diminution des surfaces oubliées et de leur étendue. Les étudiants droitiers font moins d’erreurs sur leur main non dominante que les étudiants gauchers (n=23). La méthode est intéressante pour évaluer l’efficacité de la technique de désinfection chirurgicale des mains et pour identifier les erreurs et les sites critiques. L’avantage le plus important du test UV est le feed-back immédiat qui a conduit à une amélioration.

L’utilisation du test UV pour l’éducation et l’entraînement des étudiants en médecine peut contribuer à augmenter la compliance et l’efficacité de la technique de désinfection chirurgicale des mains parmi les étudiants.


AORN – Abstract

Réaliser une hygiène des mains correcte et une désinfection chirurgicale des mains sont essentiels pour réduire le taux des infections associées aux soins, y compris les infections de la plaie opératoire. Les « Recommandations pour l’hygiène des mains » de l’AORN mises à jour donnent un guide pour l’hygiène des mains et le désinfection chirurgicale des mains, le port de bijoux, les produits d d’entretien des ongles et les ongles artificiels, les soins de la peau adéquats pour éviter les dermatites, le choix des produits d’hygiène des mains et des considérations portant sur l’assurance de qualité ainsi que l’amélioration de la performance. L’article se concentre sur les points principaux des recommandations pour aider les personnel intervenant en péri opératoire à prendre des décision conscientes concernant l’hygiène des mains et la désinfection chirurgicale des mains. Les points cruciaux nécessitent de maintenir les ongles et la peau en parfaite santé, de ne pas porter de bijoux sur les mains ou les poignets dans l’environnement péri opératoire, de réaliser unes hygiène des mains et une désinfection chirurgicale des mains correctes et de faire participer les visiteurs et les patients aux initiatives visant l’hygiène des mains. Les infirmières en environnement péri opératoire devraient revoir complètement les recommandations pour parfaire l’information et la guidance au moment de mettre à jour et de rédiger les politiques et les procédures.

Les Mycobactéries non-tuberculeuses chez les patients atteints de mucoviscidose : mise à jour

Les Mycobactéries non tuberculeuses (MNT), également appelées mycobactéries atypiques, sont omniprésentes dans la nature, dans l’eau et sur les surfaces [1]. Depuis quelques années, les MNT ont fait l’objet d’une attention particulière en raison de leur fréquence et de leur pathogénicité chez les patients atteints de mucoviscidose (fibrose cystique, FC) [2]. Il y a quelques dizaines d’années encore, les MNT étaient considérées comme une flore commensale inoffensive chez les patients atteints de FC [3]. Aujourd’hui en revanche, il devient de plus en plus évident que les MNT sont la cause d’infections pulmonaires chez les patients atteints de FC, et que ces infections vont de pair avec une morbidité et une mortalité accrue [4]. La prévalence rapportée de MNT chez les patients atteints de FC est de 7 à 13%, selon les études [1-3, 5]. En Europe c’est le M. abscessus qui est l’espèce la plus fréquemment retrouvée chez les patients atteints de FC, alors qu’aux Etats-Unis, c’est le complexe M. avium-intracellulare (MAC) qui est le plus fréquemment détecté [1]. L’espèce M. abscessus peut être subdivisée en trois sous-espèces : M. abscessus subsp. abscessus, M. abscessus subsp. massiliense et M. abscessus subsp. bolletii [5].

Le traitement des infections à MNT est un véritable défi, étant donné qu’elles sont intrinsèquement résistantes aux tuberculostatiques classiques (isoniazide, éthambutol et rifampicine), mais aussi à beaucoup d’autres antibiotiques [6]. Le traitement standard comprend un macrolide (azitromycine ou claritromycine) combiné à un aminoglycoside (généralement de l’amikacine) [6]. Des tests de sensibilité sont indiqués, étant donné qu’on rencontre souvent des résistances acquises aux antibiotiques susnommés [1].

En ce qui concerne la source de l’infection ou de la colonisation des patients atteints de FC par des MNT, il existe encore un certain débat dans la littérature scientifique, et de nombreuses études ont été menées ces dernières années. Au départ, les études démontraient que les patients atteints de FC avaient été infectés par des souches phylogénétiquement séparées, ce qui plaidait pour une acquisition à partir de l’environnement.

En 2012, Aitken et al. ont suggéré pour la première fois une transmission inter-humaine de MNT chez des patients atteints de FC [7]. Cette étude décrit 5 patients FC suivis dans un même centre à Seattle (Washington, USA) [7]. Ils étaient tous infectés par des souches de M. abscessus subsp. massiliense multi-résistantes et ne pouvaient en outre pas être distinguées par des techniques phylogénétiques {Repetitive element sequence-based PCR (rep-PCR) et  électrophorèse en champ pulsé (ECP)}.

Un an plus tard, Bryant et al. rapportèrent une analyse de séquençage de génome entier sur 168 isolats de MNT prélevés chez 31 patients atteints de FC au Royaume-Uni, dans un centre qui observait des mesures strictes d’hygiène dans le but de prévenir la transmission de germes entre les patients [8]. Leur principale découverte fut que la différence génétique, exprimée en polymorphismes singuliers de nucléotides (SNP), était dans certains cas plus faible entre deux isolats M. abscessus subsp. massiliense prélevés chez deux patients différents que celle qui existe entre deux isolats prélevés sur un même patient, ce qui suggère une transmission inter-humaine ou l’acquisition de ces MNT à partir d’une source commune.

En 2014, une étude publiée par Harris et al. rapportait une analyse par caractérisation d’un nombre variable de séquences répétées en tandem (VNTR) effectuée sur des isolats de MNT prélevés chez 12 patients pédiatriques [9]. Cette étude n’a pas conclu à une transmission inter-humaine dans ce centre.

Plusieurs questions restent donc ouvertes, même s’il semble aujourd’hui généralement admis que des clusters épidémiques peuvent survenir chez des patients FC suivis dans un même centre de soins. Nous savons que la transmission interhumaine de Mycobacterium tuberculosis est notamment facilitée par la charge bactérienne du patient vecteur et la proximité entre le patient infectieux et le patient infectant. Les études rapportées ne donnent que très peu d’indication sur la concentration bactérienne retrouvée chez les patients infectés ou colonisés par des MNT. Nous savons, par notre pratique clinique, que certains patients présentent des concentrations très importantes (examen microscopique direct fortement positif), alors que chez d’autres, les MNT ne sont retrouvées que par des techniques beaucoup plus sensibles (culture).

Par ailleurs, le fait que M. abscessus subsp. massiliense ait été rapportée dans plusieurs études pourrait faire penser que cette sous-espèce présente des caractéristiques intrinsèques facilitant la transmission inter-humaine. Cependant, il n’existe encore aucun élément scientifique permettant de prouver cette hypothèse.

D’une manière générale, les études suggérant la présence de foyers épidémiques ont rapporté un nombre restreint de patients et d’isolats de MNT. Il est donc essentiel que les centres dédiés aux FC collaborent ensemble et qu’une base de données soit créée (à l’échelle nationale et internationale) pour que les centres dédiés aux FC puissent créer des synergies et répondre aux questions actuellement restées ouvertes.

Enfin, ces études ont utilisé des méthodologies très différentes pour rechercher un lien phylogénétique éventuel entre les souches de MNT (SGE, ECP, REP-PCR, VNTR…), ce qui pourrait expliquer une partie des résultats discordants rapportés.

En conclusion, les MNT sont à considérer comme des pathogènes relativement fréquents chez les patients atteints de CF, et ils doivent donc être recherchés systématiquement chez les patients présentant une altération de leur état sans autre explication. Par ailleurs, étant-donné qu’il existe un certain niveau d’évidence par rapport à une transmission interhumaine de MNT chez les patients atteints de CF, il convient d’appliquer des mesures d’hygiène hospitalière adaptées. 

Références

1. Qvist, T., et al., Shifting paradigms of nontuberculous mycobacteria in cystic fibrosis. Respir Res, 2014. 15: p. 41.

2. Martiniano, S.L. and J.A. Nick, Nontuberculous mycobacterial infections in cystic fibrosis. Clin Chest Med, 2015. 36(1): p. 101-15.

3. Leung, J.M. and K.N. Olivier, Nontuberculous mycobacteria in patients with cystic fibrosis. Semin Respir Crit Care Med, 2013. 34(1): p. 124-34.

4. Griffith, D.E., et al., An official ATS/IDSA statement: diagnosis, treatment, and prevention of nontuberculous mycobacterial diseases. Am J Respir Crit Care Med, 2007. 175(4): p. 367-416.

5. Sermet-Gaudelus, I., et al., Mycobacterium abscessus and children with cystic fibrosis. Emerg Infect Dis, 2003. 9(12): p. 1587-91.

6. Nessar, R., et al., Mycobacterium abscessus: a new antibiotic nightmare. J Antimicrob Chemother, 2012. 67(4): p. 810-8.

7. Aitken, M.L., et al., Respiratory outbreak of Mycobacterium abscessus subspecies massiliense in a lung transplant and cystic fibrosis center. Am J Respir Crit Care Med, 2012. 185(2): p. 231-2.

8. Bryant, J.M., et al., Whole-genome sequencing to identify transmission of Mycobacterium abscessus between patients with cystic fibrosis: a retrospective cohort study. Lancet, 2013. 381(9877): p. 1551-60.

9. Harris, K.A. and D.T. Kenna, Mycobacterium abscessus infection in cystic fibrosis: molecular typing and clinical outcomes. J Med Microbiol, 2014. 63(Pt 10): p. 1241-6.

Hygiène des mains au quartier opératoire

Introduction

Vers la mi-2016, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a organisé sa campagne safe lives pour promouvoir des soins chirurgicaux sûrs (safesurgicalhands) et l’hygiène des mains pendant tout le trajet chirurgical, de l’admission à la sortie. Certains outils ont été offerts, à titre de soutien de la campagne, dont l’affiche « Les 5 indications pour l’hygiène des mains pour les soins aux patients ayant une lésion postopératoire », une infographie  « hygiène des mains pendant le trajet de soins chirurgical » et une vidéo promotionnelle «safesurgicalhands»[1]. Une initiative louable, mais une opportunité manquée aussi, parce que la problématique spécifique de l’observance de l’hygiène des mains au quartier opératoire n’a pas du tout été abordée. Et aucun outil n’a été proposé pour y contribuer vraiment. Ce qui suit démontre que l’obtention d’une bonne observance de l’hygiène des mains au quartier opératoire n’est pas simple du tout.

Observance de la désinfection chirurgicale des mains : un point d’attention oublié ?

Actuellement, la friction chirurgicale (désinfection chirurgicale des mains avec de l’alcool pour les mains) est la seule technique d’hygiène des mains recommandée au chirurgien et aux instrumentistes qui l’assistent[2]. L’opération doit s’effectuer avec le bon produit (répondant à la norme EN 12791), la bonne technique et la durée d’utilisation du produit indiquée par le fabricant doit être strictement respectée[3-5]. L’observance de la désinfection chirurgicale des mains n’est pas nommée comme un indicateur de processus éventuel dans les recommandations du Conseil supérieur de la santé (CSS)[2,6]. Pourtant, lors d’un contrôle du trajet de soins des patients chirurgicaux réalisé en 2013, l’autorité flamande en charge de l’inspection des soins (Zorginspectie) y avait prêté attention. Elle a demandé les directives pour la désinfection chirurgicale des mains lors des visites du quartier opératoire et vérifié si les aspects suivants étaient mentionnés dans ces directives : lavage hygiénique des mains avant de commencer le travail, utilisation d’alcool pour les mains, technique de frottement (friction, ordre, quantité d’alcool, temps de contact) et nouvelle friction entre les interventions. Les locaux où s’effectue la désinfection chirurgicale des mains ont également été contrôlés sur les aspects suivants : espace de désinfection attenant ou non à la salle d’opération, présence d’une porte automatique entre l’espace de désinfection et la salle d’opération, et présence d’un minuteur (nécessaire pour garantir un contact suffisamment long entre l’alcool et les mains). La procédure de désinfection chirurgicale des mains a été contrôlée dans 115 quartiers opératoires. Elle était appliquée partout, mais seulement 88 % des procédures étaient complètes en termes de contenu pour les éléments contrôlés. Sur un total de 486 locaux de désinfection contrôlés, 348 (72 %) étaient en règle au niveau de l’infrastructure pour les items contrôlés. Dans 138 (28 %) locaux de désinfection, un ou plusieurs problèmes  d’infrastructure ont été constatés. Les observations prévues pour vérifier l’adéquation de la friction chirurgicale n’ont produit que très peu de chiffres. Le contrôle de la friction chirurgicale des mains effectuée s’est avéré très difficile dans la pratique. Dans les 115 quartiers opératoires visités, seuls 207 collaborateurs ont été observés lors de la désinfection chirurgicale des mains. Dans 7 quartiers opératoires (6 %), au moins 1 collaborateur a été vu en train de pratiquer un simple lavage désinfectant (une méthode de travail qui n’est plus défendue, faisant usage d’un savon antiseptique)[7].

Chaque patient opéré est en droit de bénéficier des avantages d’une friction chirurgicale correctement effectuée par le chirurgien et l’équipe qui l’assiste, parce que les gants chirurgicaux se perforent plus souvent qu’on ne le pense[8]. Le chiffre moyen des perforations d’une seule paire de gants chirurgicaux est de 18,2 % (fourchette : 4,6-82,5 %) ; dans le cas du port d’une double paire de gants chirurgicaux, le chiffre moyen des perforations est de 4,2 % (fourchette : 0,5-11,5 %)[9]. Dans plus de 80 % des cas, le chirurgien ne remarque pas la perforation[10]. L’extrême importance d’une friction chirurgicale bien réalisée, qui tue la flore cutanée transitoire, réduit la flore cutanée résidente et freine le développement de micro-organismes sur les mains pendant 2 à 4 heures, n’est donc plus à démontrer.

L’observance de la friction chirurgicale des mains est à peine mesurée. Une seule étude rapporte la mesure dans laquelle la durée d’une friction chirurgicale est correctement respectée[11]. L’observance globalement observée était de 44 % (77/174 observations). Les infirmiers ont fait mieux (63 % – 26/41) que les chirurgiens et assistants (38 % – 11/133). En 2015, dans le cadre de l’examen de Bachelor en soins infirmiers, trois étudiants infirmiers ont effectué une mesure de l’observance de l’hygiène des mains à l’AZ Groeninge dans tous les quartiers opératoires à l’aide d’une « checklist » [12,13]. Sur 240 frictions chirurgicales observées, 70 % ont respecté un temps de frottement de 1 minute 30secondes (voir fig. 1). Des différences claires ont été notées entre les divers groupes professionnels (infirmiers, chirurgiens, médecins spécialistes en formation), mais également entre les différentes disciplines chirurgicales et entre les 3 quartiers opératoires. Les chiffres détaillés (non fournis) sont très précieux et permettent de prendre des mesures d’amélioration par quartier opératoire. Souvent, il faut dialoguer avec les médecins à ce sujet, car ils ont tendance à penser que la méthode à utiliser pour la friction chirurgicale des mains dépend de la durée et du type d’intervention (ex. intervention longue ou courte ; recours ou non à des implants ; catégorie de lésion de l’intervention).

Figure 1 : Observance de la friction chirurgicale des mains (durée correcte) (240 observations, dont 112 frictions des mains par des infirmiers (inf), 93 frictions des mains par des chirurgiens, 35 frictions des mains par des médecins spécialistes en formation (MSF)

Durant les frictions chirurgicales des mains, les observateurs ont non seulement fait attention au respect de la durée, mais ont observé aussi certaines pratiques erronées. Les observations suivantes ont été effectuées, dans l’ordre décroissant : mains pas suffisamment sèches après la friction et avant d’enfiler les vêtements stériles (22 %) ; avant-bras pas suffisamment traités pendant la friction chirurgicale (20 %) ; poignets insuffisamment frictionnés(4 %).

Les données récoltées permettent de conclure que les équipes opérationnelles d’hygiène peuvent encore améliorer considérablement la friction chirurgicale des mains.

Observance de la désinfection hygiénique des mains au quartier opératoire : peut mieux faire !

Traditionnellement, l’observance de la désinfection hygiénique des mains se mesure au moyen de la grille d’observation OMS « Les 5 indications pour l’hygiène des mains », une méthode utilisée aussi dans les campagnes nationales d’hygiène au sein des hôpitaux belges. Ces campagnes ciblent surtout les départements de séjour classiques. Lors de la sixième campagne nationale une observance globale de 77,7 % a été atteinte[14]. Les données détaillées de l’observance de l’hygiène des mains par les infirmiers et les médecins dans les quartiers opératoires n’ont pas pu être fournies par l’Institut Scientifique de Santé Publique (ISP).

Diverses études récentes indiquent une observance très limitée de l’hygiène des mains parmi les anesthésistes et les infirmiers anesthésistes[15-20]. Les chiffres de l’observance varient entre 2 et 18 %. Une analyse de l’ensemble des tâches des anesthésistes révèle un nombre élevé d’opportunités d’hygiène des mains par heure (34 à 41/h). Si l’hygiène des mains est systématiquement appliquée, conformément aux indications de l’OMS, il faut compter par heure d’anesthésie 17 à 20 minutes pour la désinfection des mains, un message difficile, voire impossible à faire passer. Précédemment, Pittet a indiqué une corrélation inverse entre l’observance de l’hygiène des mains et un certain nombre d’opportunités d’hygiène des mains par heure de soins des patients[21]. Plus le nombre d’opportunités est élevé, plus il est difficile d’obtenir que les soignants se désinfectent les mains de manière conséquente. Les soins intensifs (SI) sont désignés par Pittet comme le lieu où le nombre d’opportunités d’hygiène des mains est le plus élevé (22/h). Les quartiers opératoires sont des services médicaux hautement technologiques, où les ressources humaines et matérielles doivent être mises en œuvre le plus efficacement possible. Une nécessité qui implique souvent une pression élevée en termes de production dans les temps d’opération attribués et les heures d’activité fixées pour un quartier opératoire. Tout cela doit être concilié avec des soins sûrs (notamment en utilisant la liste de contrôle de la sécurité chirurgicale de l’OMS) et hygiéniques (une bonne hygiène des mains, une application correcte du dispositif d’insertion du cathéter veineux central (cvc), une exécution correcte du nettoyage intermédiaire et du nettoyage final…).

Les mains sont les principaux vecteurs de micro-organismes, également dans un quartier opératoire. La diffusion large de micro-organismes oropharyngés dans une salle d’opération a été magnifiquement illustrée par Biddle et al.[22]. Dans un essai en salle d’opération, de l’encre UV a été déposée dans la bouche d’un mannequin d’exercice. Des anesthésistes expérimentés ont été priés de pratiquer une anesthésie générale selon un scénario constitué de 14 actions. Cet exercice de simulation a permis de démontrer la présence de traces de fluorescine à bien des endroits dans l’environnement de travail direct de l’anesthésiste : laryngoscope, pince Magill, ruban adhésif pour fixer le tube endotrachéal, pièce en Y des tuyaux d’anesthésie, ballon ambu, stéthoscope, boutons de commande de l’appareil d’anesthésie, chariot d’anesthésie, clamp à molette IV (intraveineux) et ports d’injection IV. Après le nettoyage routinier entre les interventions, des résidus de fluorescine restaient souvent encore visibles. Les mains contaminées des anesthésistes et des infirmiers anesthésistes diffusent rapidement des pathogènes potentiels dans l’environnement large de la salle d’opération, également sur les ports d’accès IV. La contamination fréquente et rapide des ports d’accès IV dans les premières minutes de l’anesthésie a été bien décrite par Loftus et al.[23]. Des observations propres et une étude de Munoz-Price et al.[24] démontrent en outre l’absence d’une désinfection systématique des ports d’accès IV alors que des médicaments sont souvent administrés en IV aux patients pendant l’anesthésie. On prétend souvent qu’il n’est pas utile de désinfecter le port d’injection « parce que la ligne IV vient tout juste d’être mise en service ». 

L’observance de la désinfection hygiénique des mains dans les quartiers opératoires est mesurée plusieurs fois par an à l’AZ Groeninge. Les chiffres obtenus sont plus élevés que ceux rapportés dans la littérature, mais ils sont certainement partiellement influencés par l’effet Hawthorne, indissociablement lié à la méthode d’observation non participante. On n’observe pas de réelles améliorations de l’observance durant les mesures post-test des 2 dernières campagnes nationales d’hygiène des mains (voir fig.2). La mayonnaise ne prend donc manifestement pas, et l’approche classique appliquée durant une campagne d’hygiène des mains à l’échelle de tout l’hôpital se révèle inefficace dans les quartiers opératoires.

Figure 2 : Observance de la désinfection hygiénique des mains dans les quartiers opératoires (respect des 5 indications pour l’hygiène des mains de l’OMS) (pré-test 2013 n=506 ; post-test 2013 n=329, pré-test 2015 n=423, post-test 2015 n=385)

Si le respect systématique des 5 indications pour l’hygiène des mains pendant l’induction semble une mission impossible, il devrait poser beaucoup moins de problèmes durant le maintien de l’anesthésie générale. C’est aussi dû au fait qu’il y a beaucoup moins de contacts avec le patient et l’environnement après la phase d’induction de l’anesthésie générale[18] (voir tableau 1).

Tableau 1 : Contacts avec l’environnement et indications pour l’hygiène des mains pendant l’induction et le maintien de l’anesthésie générale (selon Munoz-Price et al. 2014)[18]

Bien qu’il y ait, dans le cadre de l’anesthésie générale, beaucoup plus de contacts (à risque) durant la phase d’induction que durant la phase de maintien, on ne relève entre les deux phases qu’une différence minime dans le nombre de lavages/désinfections des mains.

Des mesures répétées de l’observance de l’hygiène des mains dans le quartier opératoire permettent de classer les comportements non conformes en un certain nombre de sous-catégories (Biddle & Shah 2012[16], observations propre) voir tableau 2.

Tableau 2 : Principales catégories de non-observance dans les quartiers opératoires

Discussion

L’exécution correcte de la friction chirurgicale des mains est peu mesurée. Les résultats de mesure révèlent une technique sous-optimale alors que des perforations des gants se produisent (souvent sans être remarquées) et que les patients sont alors exposés à la flore cutanée du chirurgien[8-10]. Parienti et al. ont trouvé des chiffres d’observance plus faibles dans le groupe de la « désinfection chirurgicale » que dans le groupe de la « friction chirurgicale » alors qu’aucune différence significative n’a pu être démontrée dans le nombre d’infections des lésions postopératoires[11]. Ce constat pourrait ouvrir la porte à un raisonnement selon lequel « tout cela n’a pas tellement d’importance », cette étude étant en effet conçue principalement pour démontrer la sécurité d’une méthode de désinfection chirurgicale plus facile à appliquer. Dans un quartier opératoire, tout est mis en œuvre pour maintenir le degré de contamination de l’environnement et du champ opératoire aussi bas que possible. Une pratique correcte de la friction chirurgicale est donc nécessaire dans cette optique.

Depuis peu, la littérature biomédicale prête attention à la désinfection hygiénique des mains pendant l’anesthésie[15-20]. Bien que l’hypothèse soit très plausible qu’une mauvaise hygiène des mains au quartier opératoire entraîne une incidence accrue des infections associées aux soins, cela n’a pas (encore) été démontré par des études scientifiques et ne peut d’ailleurs quasiment pas être prouvé. Une amélioration substantielle de la désinfection hygiénique des mains en salle d’opération ne peut être obtenue qu’avec une approche multimodale, en travaillant sur l’amélioration du système, l’éducation des soignants, des aide-mémoire sur le lieu de travail, des observations et du feed-back, ainsi que le développement de la culture de sécurité. Les collaborateurs de la salle d’opération et les médecins doivent de préférence y être au maximum impliqués.

Des améliorations simples du système sont certainement possibles dans chaque quartier opératoire, en veillant par exemple à une bonne organisation du point de soins (point of care), à la disponibilité de gants et d’alcool pour les mains dans l’environnement de travail immédiat de l’anesthésiste ou du collaborateur de l’anesthésiste et à une distinction claire entre le matériel d’anesthésie propre et souillé (pince Magill, laryngoscope). Mais des adaptations plus importantes des systèmes seront nécessaires pour obtenir l’amélioration souhaitée de l’hygiène des mains. Il me semble opportun de faire le point sur les différents workflows, de les simplifier si possible et de rappeler les indications minimales d’hygiène des mains pour les anesthésistes et les infirmiers. Des workflows améliorés et des SOP (standard operating procedures) claires peuvent réduire le nombre d’opportunités d’hygiène des mains et ainsi améliorer l’observance de l’hygiène des mains. Scheithauer et al. rapportent une augmentation de l’observance de l’hygiène des mains de 10 à 55 %[17] après un tel exercice.

Durant les différentes étapes de la phase d’induction de l’anesthésie générale, un nombre minimum d’indications pour l’hygiène des mains à mettre en œuvre peut être indiqué (voir fig. 3).


Figure 3 : Analyse du processus de l’anesthésie générale : phase d’induction & de maintien

Un certain nombre d’indications pour l’hygiène des mains est également requis en phase de réveil (voir fig.4).

Figure 4 : Analyse du processus de l’anesthésie générale : phase de réveil.

Une indication OMS pour l’hygiène des mains est également prévue pour chaque forme d’anesthésie locorégionale (rachianesthésie ou épidurale, plexus ou bloc nerveux périphérique). L’idée qu’elle serait superflue « car on met de toute façon des gants stériles » doit parfois être combattue dans ce contexte. 

La figure 5 présente le trajet périopératoire du patient. Toutes les étapes ne doivent pas nécessairement être parcourues, mais toutes prévoient des indications pour l’hygiène des mains à l’intention des infirmiers.

Figure 5 : Trajet périopératoire du patient dans le quartier opératoire.

Une autre amélioration essentielle concerne l’optimisation du nettoyage dans les salles d’opération. Une contamination du quartier opératoire se produit inévitablement pendant l’anesthésie générale, par la flore orobuccale du patient. L’utilisation de 2 paires de gants (la paire supérieure étant immédiatement enlevée après l’intubation) peut limiter partiellement cette contamination, mais pas l’empêcher totalement[22] ; cette méthode de travail doit donc être déconseillée. En outre, on constate souvent que le nettoyage de la salle d’opération est insuffisant[25,26], partiellement en raison de la forme, peu facile à nettoyer, des appareils d’anesthésie (boutons de commande côtelés) et des chariots d’anesthésie (poignées des tiroirs). Face à ces constatations, il est évident qu’une mission revient ici aux fabricants, qui doivent prêter attention à la forme de leurs produits et faire en sorte qu’ils soient faciles à nettoyer/désinfecter (surfaces lisses et rondes). Mais une mission revient aussi à chaque équipe d’hygiène hospitalière. Munoz-Price et al. ont démontré que seuls 47 % des marqueurs UV appliqués sur des surfaces en salle d’opération sont éliminés par un nettoyage régulier[26]. Pourquoi en serait-il autrement dans un hôpital belge moyen ? Le nettoyage du quartier opératoire à l’AZ Groeninge a été revu de manière critique. Les procédures actuelles de nettoyage (intermédiaire et final) ont été évaluées et comparées avec les directives de nettoyage de l’Association of Perioperative Registered Nurses (AORN)[27] avec une photo d’intérieur de salle d’opération. En plaçant une photo de la salle d’opération à côté des schémas de nettoyage actuels, des lacunes et imprécisions dans les conventions de travail ont pu être détectées et corrigées. Une lacune se situait au niveau de l’appareil d’anesthésie (l’une des surfaces les plus touchées selon Munoz-Price et al.[24]), qui est désormais inclus dans le nettoyage entre deux interventions et dans le nettoyage final. L’analyse critique de la méthode de travail actuelle a permis de modifier la procédure, qui décrit maintenant en détail le nettoyage entre deux interventions et le nettoyage à la fin du programme des opérations. Les surfaces à contact fréquent ont été clairement définies (voir fig.6) et les procédures reprennent maintenant celles qui doivent être incluses dans le nettoyage intermédiaire (entre 2 interventions) et celles qui doivent être nettoyées/désinfectées à la fin du programme des opérations. Une formation de tous les collaborateurs qui nettoient la salle d’opération a été organisée. Un suivi ultérieur est prévu, avec notamment des mesures ATP et un feed-back direct aux collaborateurs en charge du nettoyage. 

Fig. 6 : Points de contact fréquents des mains en salle d’opération

L’éducation des prestataires de soins, des aides-mémoires (reminders) sur le lieu de travail et la communication des résultats de mesure étaient déjà en application dans le passé (voir fig. 7).

Fig. 7 : Matériel de campagne au quartier opératoire, de haut en bas : affiche éducative, aide-mémoire collé sur les miroirs dans les vestiaires des quartiers opératoires, tous deux réalisés le 5 mai 2016 (à l’occasion de la journée internationale de l’hygiène des mains), exemple de feed-back pour la désinfection hygiénique des mains et le respect des conditions d’hygiène des mains sur le mur de qualité du quartier opératoire

Les résultats rapportés sur le mur de qualité peuvent donner lieu à des améliorations, mais suscitent souvent, tant chez les infirmiers que les médecins, des sentiments mitigés et des réactions diverses. Les mesures de l’observance sont démotivantes pour les uns, et perçues comme infantilisantes par d’autres. En 2009, l’OMS a publié des directives pour la sécurité chirurgicale[28]. Grâce à la mise en œuvre au niveau mondial d’une liste de contrôle de la sécurité chirurgicale, de grandes améliorations ont été réalisées sur le plan de la culture de sécurité au quartier opératoire[29]. Cependant, la réalisation attentive de la friction chirurgicale des mains et de la désinfection hygiénique des mains ne fait toujours pas l’objet d’une attention suffisante dans cette culture de sécurité. L’optimiser encore constitue un défi.

Bibliographie

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28. Directives de l’OMS pour la sécurité chirurgicale : Une chirurgie plus sûre pour épargner des vies, 2009, 124 pp.
29. Haynes (A.B.) et al., A surgical safety checklist to reduce morbidity and mortality in a global population, NEJM, 2009, 360(), p. 491-499.

Contrôle du risque infectieux à l’hôpital AZ Jan Palfijn de Gand, le récit d’une expérience

L’ Algemeen Ziekenhuis (AZ) Jan Palfijn de Gand est un hôpital public général qui totalise 526 lits. Il ne dispose pas d’un service d’hématologie, ni d’un service d’hémodialyse. Il peut donc être considéré comme un hôpital général de deuxième ligne qui a entretemps été rendu indépendant du Centre public d’action sociale (CPAS) de Gand. En 2007, le service d’hygiène hospitalière a été transformé en une équipe chargée du contrôle du risque infectieux, composée d’un médecin et d’un infirmier. L’équipe rend compte 4 fois par an de ses activités au comité complet chargé du contrôle du risque infectieux, lequel a été composé conformément aux dispositions légales et inclut par extension également des membres invités (1). Le conseiller en prévention, le coordinateur environnemental, le médecin du travail, le service technique, le responsable de l’entretien, le responsable du service central de stérilisation (CSA), le pharmacien clinique et le médecin spécialisé dans les formations (ASO) siègent systématiquement au sein du comité. Il faut y voir une manière de créer une base plus large. En dehors du contrôle du risque infectieux au sens strict et des obligations légales, le comité assure en effet toujours le suivi d’autres aspects importants comme les accidents par piqûre, la lutte contre la vermine, l’entretien, la légionellose, le contrôle de l’eau potable, la problématique des escarres, les normes HACCP (Hazard Analysis and Critical Control Points), etc. L’équipe se réunit en moyenne une fois par semaine et rédige un bref rapport d’activités à l’intention du comité. Dans le prolongement de la stratégie de transparence, ces rapports sont tenus à la disposition de tout le personnel de l’hôpital par le biais de l’intranet.

I. Stratégie

C’est en 2007 qu’a été prise la décision stratégique de ne pas faire du contrôle du risque infectieux un département isolé au sein de l’hôpital. La microbiologie médicale et la politique antibiotique ont sciemment été associées au contrôle du risque infectieux, même si l’arrêté royal prévoyait plutôt de créer le comité de politique antibiotique dans le giron du comité médico-pharmaceutique (2). Ces trois disciplines se recoupent en effet au point de former un véritable triumvirat. S’il peut poser problème en cas de sous-effectif, le regroupement des trois fonctions offre d’indéniables avantages en termes de synergies. Le rapport annuel consacré au contrôle du risque infectieux, à la microbiologie médicale et à la politique antibiotique revêt donc depuis des années chez nous la forme d’un rapport intégré.

Cette stratégie s’inspire d’un article paru dans la revue Clinical Microbiology and Infection en 2006 (3). L’idée sous-jacente peut se résumer comme suit : si l’on parvient à réduire la consommation d’antibiotiques à travers des formations et des mesures restrictives, et dans le même temps à mettre un terme à la propagation des micro-organismes grâce à une bonne hygiène des mains et à identifier les porteurs par le dépistage et l’isolement, pour ensuite éliminer les réservoirs en les décontaminant, il devient possible de mener une action efficace. Huit ans après la mise en place de cette stratégie, il nous a paru intéressant d’évaluer les évolutions que notre hôpital a connues durant cette période et d’en tirer des conclusions. Le compte rendu qui suit se veut un récit, une source d’inspiration, sans aucune prétention scientifique. Cet engagement a également été formulée à l’intention de nos patients (figure 1). Lors de nos portes ouvertes, nous expliquons notre stratégie aux visiteurs dans un langage compréhensible. Nous partons en effet du principe que l’émancipation du patient commence lorsque le patient n’en est pas encore un. Toutes ces informations sont d’ailleurs disponibles sur le site Internet de l’hôpital (4). Somme toute, il s’agit d’une campagne permanente. Une campagne à l’intention des prestataires de soins, des patients, des visiteurs, etc.

1. Politique antibiotique

Comme tous les hôpitaux de Belgique, l’AZ Jan Palfijn respecte les conditions légales en matière de politique antibiotique. Nous avons élaboré un schéma empirique (volontairement) concis et simple décrivant le bon usage des antibiotiques, dont le principal objectif est d’être utilisable. Chaque année, dès janvier, nous mettons toutes les Defines Daily Dose (DDD) de l’année écoulée à disposition sur le site Internet de l’Institut scientifique de santé publique (ISP) (5) ainsi que sur notre propre site (4). Traditionnellement, nous devons alors attendre que suffisamment d’autres hôpitaux aient introduit leurs résultats pour pouvoir plus ou moins (le « case mix » n’est en effet pas pris en compte) établir un benchmark. En 2009 et 2010, 126 hôpitaux participaient au programme. En 2011, 2012 et 2013, respectivement 116, 114 et 107. En 2014, seuls 57 hôpitaux y ont pris part, et ils n’étaient plus que 22 en 2015 (situation au 11-08-2016). Si cette tendance se poursuit, il deviendra malheureusement difficile d’établir un benchmark. Quoi qu’il en soit, le module permet à un hôpital d’assurer un bon suivi de sa propre consommation d’antibiotiques.

Toujours dans le cadre de la stratégie intégrée, l’AZ Jan Palfijn mise aussi sur les lettres d’information consacrées aux antibiotiques, qui vont d’ailleurs souvent bien plus loin que le seul thème des antibiotiques. Les « 10 règles d’or pour le prélèvement d’échantillons » ou encore « Que faire en cas d’infection à Clostridium difficile ? » sont également des sources utiles. Nous nous efforçons aussi de sensibiliser le public. Nous avons créé notre propre « jeu des antibiotiques » qui jouit d’une grande popularité : les enfants doivent lancer des antibiotiques à l’assaut de bactéries et de virus, pour constater que les cartes des virus ne tombent pas (figure 2). Nous utilisons aussi volontiers les supports déployés par les pouvoirs publics, comme « Tante Biotique », une BD de Bob & Bobette diffusée par BAPCOC, ou les gadgets « Vous êtes en de bonnes mains ». Le but est vraiment d’atteindre un public le plus large possible.

La prescription d’antibiotiques fait l’objet d’un  surveillance subdivisé en 4 classes. La classe I peut être utilisée librement et seul un contrôle annuel est réalisé. L’impact de l’antibiotique de classe I prescrit est en effet minime pour notre politique antibiotique. Il s’agit d’antibiotiques de première ligne « classiques » comme l’amoxicilline-acide clavulanique. Leur usage est d’ailleurs si fréquent qu’il ne serait pas possible dans la pratique d’imposer une approbation préalable de la prescription. Les antibiotiques de classe II peuvent eux aussi être prescrits librement, mais font l’objet d’un contrôle hebdomadaire. Il s’agit de la vancomycine, du méropénem, de l’association pipéracilline-tazobactam, de la moxifloxacine, etc. En l’absence d’une indication vérifiable pour l’antibiotique, contact est pris (rétroactivement) avec le prescripteur. Vu les DDD de respectivement 206, 482, 479 et 527 par an, la consommation nous semble sous contrôle et nous considérons que la prescription libre avec contrôle hebdomadaire se justifie. L’utilisation de la lévofloxacine est cependant difficile à maîtriser : 7322 DDD sur 55692. Les antibiotiques de classe III requièrent l’approbation d’un membre du comité de politique antibiotique. En marge des antifongiques, il s’agit de l’azactam, de la ciprofloxacine, … Cependant, les tuberculostatiques relèvent également de la classe III, de sorte que l’équipe chargée du contrôle du risque infectieux peut de cette manière immédiatement savoir qu’un patient tuberculeux pourrait se trouver au sein de l’hôpital.

Les antibiotiques de classe IV ne figurent pas sur le formulaire et ne sont pas utilisés. Il s’agit de la céfépime, de la teicoplanine, de la tigécycline, etc. Pour l’instant, il n’existe pas d’indications au sein de notre hôpital, sauf un cas importé de Clostridium difficile réfractaire et un patient atteint d’un sepsis OXA-48 (CPE) Klebsiella pneumoniae qui a notamment été traité efficacement à la tigécycline. De nombreuses consultations microbiologiques sont réalisées, en marge de la concertation multidisciplinaire hebdomadaire aux soins intensifs (SI), et toutes sont journalisées dans un dossier interne relevant du Système d’information de laboratoire (SIL). Le pharmacien clinique a également accès au SIL. En 2014, on recensait 201 consultations d’antibiotiques uniques (les consultations répétées pour le même patient ne sont comptées qu’une seule fois et les consultations réalisées aux SI ne sont pas prises en compte). Depuis 2015, un pharmacien clinique est notamment chargé d’apporter un soutien structurel à la politique antibiotique en implémentant la prescription électronique, en vérifiant de manière proactive et réactive toutes les prescriptions d’antibiotiques, en réalisant des audits, en faisant la promotion de la perfusion continue, etc. L’épidémiologie fait en outre l’objet d’un suivi rigoureux par le biais du SIL, tandis que le protocole envoie des avis qui peuvent, en fonction du diagnostic posé en laboratoire, avoir un impact clinique sur le patient. Il est fréquent que le laboratoire teste toute une batterie d’antibiotiques, mais l’antibiogramme qui est divulgué et qui est visible pour le clinicien est particulièrement restrictif.

2. Hygiène des mains

Dans l’intervalle, tous les hôpitaux sont convaincus de l’importance de l’hygiène des mains, comme en témoigne l’amélioration significative des chiffres nationaux et flamands (Vlaams Indicatorenproject version 2, VIP2) au cours des dix dernières années. À l’AZ Jan Palfijn, le nombre de désinfections des mains par patient et par jour était de 2,21 en 2006. En 2014, ce nombre atteignait 5,85 et était donc inférieur à celui relevé en 2012 (6,94) (figure 3). La baisse du nombre de désinfections durant ces deux années est à mettre entièrement sur le compte des travaux de transformation, durant lesquels les gels pour les mains à base d’alcool étaient moins disponibles (les supports des flacons de gel pour les mains ne pouvaient parfois tout simplement pas encore être fixés). La tenue de ces chiffres permet également de tenir à jour la consommation de désinfectants à base d’ammonium quaternaire et autres. À l’échelle des services, on remarque souvent que c’est là où l’on utilise le moins de gel pour les mains à base d’alcool que l’on désinfecte aussi le moins, voire que les vaccinations (grippe) se font les plus rares. La présence d’un(e) infirmier(ère) en chef engagé(e) permet cependant d’améliorer rapidement ces résultats, bien que nous ne soyons pas en mesure de prouver ce lien de causalité.

À travers des campagnes ludiques, nous nous efforçons de convaincre tout le monde, y compris le patient, de la nécessité d’appliquer l’hygiène des mains. Nous donnons écho à toutes les campagnes organisées par les pouvoirs publics, mais en organisons aussi de notre propre initiative (figure 4). Nous communiquons à ce sujet par e-mail, organisons un quiz par service (avec des tickets de cinéma à la clé pour le meilleur service), suspendons des affiches, abordons régulièrement le sujet dans le journal destiné au personnel, etc. Bref, les consignes sont répétées en permanence. Parfois aussi « littéralement », par le biais de reproches adressés (en public) aux membres du personnel qui ne se conforment pas aux règles. Soit dit en passant, une enquête de satisfaction menée auprès du personnel a révélé que le caractère public de ces remarques correctives n’a aucun impact sur la popularité du service chargé du contrôle du risque infectieux. Sur la centaine d’aspects à évaluer (ambiance au travail, infrastructures, …), le contrôle du risque infectieux s’est classé à deux reprises dans le top 3.

Dans le domaine de la formation permanente, nous choisissons souvent de faire le tour des services avec un ordinateur portable afin d’inculquer l’une ou l’autre notion à des petits groupes de prestataires de soins, en une dizaine de minutes seulement. Nous parvenons ainsi à atteindre davantage de personnes qu’au moyen d’une présentation unique organisée au niveau central.

Avec le soutien du Conseil médical, de la direction et du Conseil d’administration, nous sommes parvenus en peu de temps à interdire les bijoux à l’AZ Jan Palfijn. Nous avons obtenu que toutes les personnes portant un uniforme de service portent des manches courtes, de sorte que l’audit interne qui contrôle l’hygiène des mains environ six fois par an est relativement simple : l’auditeur ne doit pas se demander qui est en contact avec les patients. La règle est : toutes les personnes qui portent un uniforme de service se conforment à toutes les prescriptions. La note obtenue pour les ongles est en revanche un peu moins brillante. La raison en est que d’une part, nous autorisons encore les personnes qui se rongent les ongles à utiliser des ongles en gel (sur prescription du médecin du travail), et d’autre part que la sensibilisation semble difficile dans ce domaine. Notre approche n’est cependant pas que répressive : dans le passé, nous avons aussi offert à tous les membres du personnel une trousse de manucure en guise de geste de sensibilisation. Nous veillons d’ailleurs aussi à ce que dans notre communication (externe), les prestataires de soins apparaissent sur les photos sans bijoux et en manches courtes. L’audit consacré à l’hygiène des mains se penche aussi sur deux autres aspects : les sondes urinaires et les cathéters veineux centraux. Il en ressort qu’en 2015, en moyenne 8,45 % des patients hospitalisés ont une sonde urinaire et 4,7 % un cathéter veineux central. Ces audits sont uniquement possibles parce que nous adoptons le principe KISS : Keep It Simple & Short. Dans le passé, de tels audits étaient également réalisés pour les protections anti-poussière (surtout pendant les transformations), mais aussi pour les échantillons prélevés sur les patients qui restaient traîner au sein du service parce qu’il n’y avait pas encore de poste pneumatique. En marge de ces audits internes, les évaluations de la Communauté flamande et le projet VIP2 sont considérés comme des formes d’audit externe. La campagne nationale est dotée chez nous d’une interprétation propre, en ce sens que nous cotons le service le moins performant et faisons preuve d’une sévérité redoublée à son égard.

3. Dépistage, isolement et décolonisation de patients

À l’AZ Jan Palfijn de Gand, les groupes cibles classiques font l’objet d’un dépistage : les patients qui viennent d’une maison de repos, d’un hôpital psychiatrique ou d’une autre institution, les patients qui viennent des soins intensifs ou d’un autre service de l’hôpital, les patients dont le voisin de chambre a été testé positif pour le MRSA, les patients auxquels sont implantés des matériaux étrangers, les patients qui passent par la consultation préopérative, les patients ayant des contacts professionnels avec les animaux, les patients qui étaient autrefois porteurs du MRSA et les patients âgés de plus de 70 ans.

Le contrôle du risque infectieux est une forme de risk management dont les rares ressources sont affectées de manière à conduire à l’outcome le plus élevé. Il est assez atypique que les personnes de plus de 70 ans fassent l’objet du dépistage, mais il s’agit du résultat d’une évolution historique. Nous nous sommes cependant demandé s’il ne serait pas judicieux de soumettre également les personnes de plus de 60 ans au dépistage. Pour cette raison, nous avons à un moment donné étendu le contingent des patients à soumettre au dépistage aux personnes de plus de 60 ans. Pour éviter toute confusion au sein des services, l’infirmier hygiéniste s’en est chargé. Un total de 415 patients ont été analysés (nez-gorge-périnée), dont 164 étaient âgés de 60 à 70 ans. Cela revenait à 492 échantillons additionnels en un mois étant donné qu’à l’époque, le nez, la gorge et le périnée faisaient l’objet d’un dépistage distinct. La méthodologie a également été évaluée. Seuls 8 patients supplémentaires ont été trouvés sur les 164, ce qui constitue un hit rate nettement inférieur en comparaison du contingent des personnes âgées de 70 à 80 ans. Pour cette raison, et compte tenu que nous traitons déjà entre 9.000 et 10.000 échantillons par an, il a été décidé de ne provisoirement pas adapter le contingent à soumettre au dépistage.

Le choix de soumettre à la fois le nez, la gorge et le périnée au dépistage repose également sur les données que nous avons tenues à jour avec soin pendant de nombreuses années, et qui ont même fait l’objet d’une publication intitulée « The nose is not the only relevant MRSA screening site » (6). Les BLSE, CPE et VRE ne font pour l’instant l’objet d’aucun dépistage. Nous avons néanmoins élaboré en 2016 un projet de recherche restreint, par analogie à la question de savoir si nous devions étendre le groupe cible MRSA aux personnes de plus de 60 ans. Après avoir tiré des conclusions de cette étude, nous évaluerons si notre politique doit être adaptée.

La politique d’isolement existante a en outre été entièrement adaptée à la réalité architecturale et médicale. Le plan de contingence sur les pandémies et le plan Ebola ont été un défi pour de nombreux hôpitaux, et le nôtre ne faisait pas exception à la règle. L’équipe chargée du contrôle du risque infectieux dispose en ce moment de 63 procédures dont elle est propriétaire ou copropriétaire. Ces procédures sont tenues à la disposition de tous les prestataires de soins par le biais d’un moteur de recherche pratique se trouvant sur l’intranet. Les procédures sont révisées à des moments déterminés.

4. Cesser la propagation

4.a. Aspects particuliers de la propagation : l’évaluation de l’hygiène
La transformation du bâtiment de l’hôpital ont été entièrement finalisés en 2015. En 2 ans environ, le bâtiment existant a été entièrement mis à nu jusqu’au béton et l’hôpital a été complètement réaménagé, y compris les conduites d’utilité publique, la réallocation des services, etc. Durant cette période, l’hôpital est resté opérationnel et le service chargé du contrôle infectieux a supervisé les déménagements incessants. Sur la base d’une analyse de risques standardisée, les patients et les services ont été classés dans une certaine catégorie, à laquelle étaient associées certaines exigences (figure 5). Les déménagements pouvaient ainsi se faire de la manière la plus judicieuse possible. Pendant les travaux, nous avons réalisé des audits supplémentaires portant sur l’utilisation des protections anti-poussière et il a été procédé à des contrôles additionnels de la qualité de l’air. Pendant ces 2 années, aucun cas d’aspergillose n’a été diagnostiqué. Ces actions ont été détaillées au préalable dans des procédures et dans un scénario des déménagements. Ce scénario a également été présenté au « prix de qualité des soins » organisé par la Rode Kruis Vlaanderen, mais n’a malheureusement pas remporté de nomination (alors qu’un autre hôpital a été nominé pour le déménagement d’un service).

Nous avons mis à profit les transformations approfondies de l’hôpital pour faire précéder un maximum des décisions à prendre d’une évaluation de l’hygiène (= confrontation aux aspects du contrôle du risque infectieux). Cette forme systématique de participation de l’équipe chargée du contrôle du risque infectieux a conduit à des choix structurels et architectoniques qui pourront à terme avoir un effet favorable sur le contrôle du risque infectieux.

– Aménagement et circulation du quartier opératoire, dont le positionnement du bureau de l’infirmier-hygiéniste – entièrement en verre – à l’entrée du quartier opératoire, dans le but de mettre en place une meilleure discipline au quartier opératoire par le biais d’un contrôle social (figure 6).

– Introduction de certaines techniques, comme les portes à fermeture automatique, la création de plusieurs chambres d’isolement pouvant également servir à l’isolation inversée (pression positive/négative), etc.

– Les salles de bain des chambres des patients ont été aménagées de manière à ce que « tout soit suspendu » ; le sol est le plus dégagé possible. Il peut ainsi être nettoyé particulièrement rapidement, simplement et efficacement, ce qui laisse plus de temps pour s’occuper des surfaces high touch (figure 7).

– Le choix – dans les limites du budget disponible – de poignées et clenches de portes se nettoyant le plus facilement possible.

– L’introduction du contrôle d’hygiène qui démontre au moyen d’un cachet invisible qui n’apparaît qu’à la projection de rayons UV que les robinets et les surfaces brillent, mais que les surfaces fréquemment touchées (high touch) sont encore souvent oubliées. Cette démonstration a un effet d’apprentissage énorme sur le personnel chargé de l’entretien.

4.b. Aspects particuliers de la propagation : vaccination contre la grippe
Avant l’éclatement de l’épidémie de la grippe pandémique H1N1 pdm 2009, l’AZ Jan Palfijn obtenait un taux de vaccination d’en moyenne 40 % pour la grippe (sur tous les membres du personnel, également ceux n’étant pas en contact avec les patients). À l’époque de la grippe pandémiqe H1N1 pdm 2009, l’angoisse et la sensibilisation ont clairement joué un rôle et nous avons atteint sans fournir d’efforts particuliers un taux de vaccination de 57 %, qui est ensuite retombé à 40,7 %. L’année suivante, nous avons mené une campagne intensive. Nous avons adapté les affiches des autorités flamandes en utilisant des visages familiers de l’hôpital, le commissaire à la grippe est venu administrer en personne le premier vaccin (figure 8) en présence de la chaîne de télévision commerciale VTM, tandis que l’année suivante, un groupe de motards en Harley se sont présentés pour recevoir leur vaccin. Les campagnes ludiques, les bandes dessinées humoristiques, les vidéos marquantes, les notes de service, le tour des services avec un chariot de vaccination, un feed-back relayant le taux de vaccination jusqu’à l’échelle des services… tous les moyens sont bons pour inciter le personnel à se faire vacciner. Ces efforts nous ont permis de mettre en place une certaine culture de la vaccination qui nous fait atteindre aujourd’hui un taux de 63,4 %.

II. Résultats

Il n’est pas évident de transposer les résultats en chiffres dans le domaine du contrôle du risque infectieux. En effet, plus on déploie d’efforts pour trouver des organismes multi-résistants aux médicaments (MDRO), plus on en trouve et plus les résultats sont mauvais. La publication de chiffres n’a de sens que si un hôpital utilise depuis des années la même méthode de mesure. C’est la seule manière d’évaluer plus ou moins si l’approche de l’hôpital fonctionne (ou non). Si ces chiffres sont rendus publics, ils doivent en outre présenter un degré de vulgarisation suffisant, tout en étant scientifiquement étayés.

À l’époque où l’hôpital se composait encore de deux sites, il existait une importante différence entre les deux sites en termes de nombre de cas d’escarres. Lorsque le petit site, plus ancien, a fermé ses portes et que tous les patients ont été regroupés sur un seul site, la situation s’est nettement améliorée. Le service chargé du contrôle du risque infectieux était à l’époque nettement moins présent sur le lieu de travail du petit site, et cela avait donc un impact. Aujourd’hui, l’infirmier-hygiéniste est présent sur le lieu de travail avec l’infirmier(ère) chargé(e) du soin des plaies pour sensibiliser et former le personnel, réaliser des audits internes, etc. Nous sommes convaincus que la présence de notre service sur le lieu de travail est d’une manière générale une nécessité.

À l’AZ Jan Palfijn comme dans tout le pays, on constate au fil des années une baisse du nombre de MRSA. Le nombre de patients colonisés par un MRSA a été réduit à 20-40 par an ces dernières années. Depuis 2012, l’AZ Jan Palfijn n’a pour ainsi dire plus diagnostiqué de patients atteints d’un sepsis MRSA nosocomial (deux cas en 2012, aucun cas en 2013 et 2014 et un seul cas en 2015). La consommation de gel pour les mains à base d’alcool augmente quant à elle d’année en année. Un lien de causalité peut être présumé mais pas prouvé (figure 8). Dans le même temps, il y a toujours matière à amélioration :
l’objectif de l’OMS – 20 litres par patient et par jour – n’est pas atteint, même s’il s’en faut de peu. La décolonisation des patients porte ses fruits, même si le suivi est difficile étant donné que les patients quittent l’hôpital de plus en plus rapidement. En 2008, 2009, 2010 et 2011, respectivement 47,8 %, 38,31 %, 43,1 % et 31,2 % ont été négativés. Les autres patients ont été transférés (et décontaminés) au sein de la maison de repos ou à domicile. Les autres étaient décédés.

Dans l’intervalle, l’AZ Jan Palfijn est également confronté à des problèmes. Le nombre de BLSE cliniques reste stable, de sorte que l’hôpital affiche toujours un niveau moyen au classement national. Pour ce qui est du Clostridium difficile nosocomial, l’hôpital compte parmi les mieux classés à l’échelle nationale, avec seulement 11 cas par an en moyenne. Nous avons cependant été confrontés en 2015, pour la première fois, à un certain nombre de cas importés de CPE. Nous tenons à souligner que c’est surtout la tendance favorable au fil des années et au sein de notre propre hôpital qui nous importe, et pas tant la comparaison avec les autres hôpitaux étant donné qu’il manque à cet égard d’un « case mix » judicieux de patients pour permettre une comparaison correcte.

Pour terminer, notre hôpital n’est pas à l’abri de l’apparition d’un foyer (« outbreak ») aux soins intensifs, même si c’est heureusement rare. Le tout est alors de détecter l’origine du problème. Cette enquête demande beaucoup d’énergie, mais apporte aussi la solution. Chez nous, c’était un laryngoscope réutilisable qui infectait les patients de la même Acinetobacter baumanii. Un diagnostic moléculaire a permis de le confirmer.

Conclusion.

Pour nous, le contrôle du risque infectieux est une forme de risk management qu’il vaut mieux intégrer le plus possible dans la microbiologie médicale et la politique antibiotique, partant de l’idée que les ressources ne sont pas infinies. Il est important de mener campagne en permanence au sein de l’hôpital (et en dehors) afin d’inculquer l’attitude adéquate aux prestataires de soins. Le soutien de la direction, du Conseil d’administration, du médecin en chef et du Conseil médical est à cet égard indispensable. Une campagne crédible ne peut être menée à bien que si le service fait également preuve d’autocritique. Les audits internes y contribuent à condition de revêtir la forme la plus simple possible. Le contrôle du risque infectieux doit donc être beaucoup plus présent sur le lieu de travail. Une évaluation de l’hygiène (= confrontation aux aspects du risque du contrôle infectieux) devrait être inhérente à chaque hôpital et faire partie intégrante de chaque procédure. La simplicité doit être optimale afin de garantir que l’évaluation soit mise en œuvre et ne reste pas lettre morte. Enfin, il faudrait s’interroger à chaque action, enregistrement ou procédure sur la valeur ajoutée effective pour le patient, le prestataire de soins et l’hôpital. Une transparence scientifiquement étayée est vivement recommandée. Pour conclure, nous pouvons dire que nous pensons que cette approche est efficace et conduit à des résultats, mais nous réalisons dans le même temps que le lien de causalité éventuel n’est pas prouvé. We zijn er wel trots op, dat na een externe (internationale) visitatie, wij de European Hand Hygiene Excellence Award 2017 in de wacht mochten slepen, samen met onze Noorse collega’s (7). Deze erkenning werd in gans het ziekenhuis als bijzonder positief ervaren en is een stimulans om het nog beter te gaan doen.

Nous remercions tout particulièrement le comité chargé du contrôle du risque infectieux et le groupe chargé de la politique antibiotique.

Correspondance. Dr. Louis Ide, AZ Jan Palfijn Gent,
louis.ide@janpalfijngent.be.

Références

(1) AR du 26 avril 2007. Arrêté royal modifiant l’arrêté royal du 23 octobre 1964 portant fixation des normes auxquelles les hôpitaux et leurs services doivent répondre.

(2) AR du 12 février 2008. modifiant l’arrêté royal du 4 mars 1991 fixant les normes auxquelles une officine hospitalière doit satisfaire pour être agréée.

(3) HARBARTH S. Control of endemic methicillin-resistant Staphylococcus aureus –recent advances and future challenges. Clin Microbiol Infect 2006; 12: 1154-1162.

(4) www.janpalfijn.be/infectiecontrole

(5) https://www.iph.fgov.be/nsihweb

(6) IDE L, LOOTENS J, THIBO P. The nose is not the only relevant MRSA screening site. Clin Microbiol Infect 2009; 15: 1192-1193.

(7) http://www.hhea.info/cps/rde/xchg/om-hygieneaward-en-int/hs.xsl/7836.html

Figure 1. Énoncé de la stratégie qui a été appliquée au fil des années à l’égard des patients au sein de l’AZ Jan Palfijn.

Figure 2. Jeu éducatif sur les antibiotiques.

Figure 3. La consommation de solution hydro-alcoolique (SHA) confrontée à la survenance du MRSA (d’origine nosocomiale et non nosocomiale) au fil des ans.

Figure 4. Aperçu succinct des campagnes.

Figure 4. Aperçu succinct des campagnes.

Figure 4. Aperçu succinct des campagnes.

Figure 5. Classement des patients en groupes à risque afin de réaliser les déménagements (internes) de la manière la plus judicieuse possible.

Figure 6. Positionnement stratégique du bureau de l’infirmier-hygiéniste hospitalier à l’entrée du quartier opératoire. Évaluation de l’hygiène lors des rénovations.

Figure 7. Évaluation de l’hygiène lors des rénovations. Comme tout le mobilier est suspendu et que le sol est dégagé, le nettoyage est plus aisé et il reste plus de temps pour s’occuper des surfaces high touch.

Figure 8. Lancement de la campagne de vaccination contre la grippe 2014.

Mesures d’hygiène hospitalière appliquées à l’unité de transplantation de cellules souches hématopoïétiques des Cliniques universitaires Saint-Luc

Introduction   

Éduquer les équipes de soins à la prévention des infections nosocomiales et à la maîtrise des conduites à mettre en œuvre est un défi essentiel et quotidien pour les équipes d’hygiène hospitalière. Les stratégies à mettre en œuvre pour contrôler ce risque sont d’autant plus strictes et minutieuses lorsque les patients concernés sont fragilisés par un état d’immunosuppression lié à une greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH). Cette greffe est un traitement de choix administré aux patients souffrant d’une pathologie hématologique et consiste en l’administration de CSH auto- ou allogéniques (apparentées ou non apparentées), provenant de la moelle osseuse ou prélevées par voie périphérique après stimulation par des facteurs de croissance. La greffe survient après une chimiothérapie et dans certaines situations une irradiation corporelle totale destinée à éliminer les cellules cancéreuses. L’équipe médicale de l’unité de transplantation de moelle osseuse et de cellules souches périphériques des Cliniques universitaires Saint-Luc (CUSL), qui fut le premier hôpital belge accrédité JACIE (Joint Accreditation Committee) en 2009, était désireuse d’effectuer une évaluation et une mise à jour si nécessaire des procédures qui concernent la prévention des infections nosocomiales chez le patient neutropénique. Cela concerne différents aspects qui seront développés dans ce travail : tant le côté « environnement » (ventilation, gestion de l’eau, entretien des chambres et de l’unité) que le côté « clinique » de l’unité de soins (isolement protecteur, hygiène des mains, soins administrés au patient). Chaque centre européen de transplantation de moelle osseuse et de cellules souches périphériques écrit et applique ses propres procédures avec ses spécificités propres mais toutes tiennent compte du référentiel JACIE of ISCT-Europe and EBMT (European Bone Marrow Transplantation) et les recommandations du Center for Disease Control (CDC) (1-2).

Le but de ce travail est d’effectuer une révision des recommandations et de s’inspirer d’articles pertinents de la littérature afin de proposer des procédures mises à jour à l’unité de transplantation de cellules souches hématopoïétiques des Cliniques universitaires Saint-Luc.

Recommandations concernant la prévention des infections nosocomiales dans une unité de transplantation de cellules souches hématopoïétiques


1.1. Isolement protecteur

a. Généralités et définitions

Le terme « isolement protecteur » désigne les mesures de protection du patient dont le système immunitaire est affaibli par un traitement ou une pathologie. Ces mesures s’appliquent sur prescription médicale et sont complémentaires des précautions standards. L’isolement protecteur a pour but d’éviter la transmission de tout agent potentiellement infectieux issu de l’environnement (objet, eau, air, alimentation, surface…), d’autres patients, des visiteurs ou des membres du personnel à des patients immunodéprimés. Les mesures concernant l’isolement protecteur impliquent donc l’environnement direct (chambre) et indirect (unité de soins) du patient, le patient lui-même et les personnes qui entrent de loin ou de près en contact avec lui. Une « chambre stérile » est le résultat d’un isolement protecteur mis en place au niveau d’une chambre afin d’accueillir un patient immunodéprimé qui doit recevoir une greffe de CSH. Les agents potentiellement pathogènes sont d’origine bactérienne, virale ou fongique. Une étude menée en 2004 dans 13 unités de transplantation de CSH aux USA a recensé 23 épidémies (10 d’origine bactérienne, 8 virales et 5 fongiques) impliquant 231 patients. Douze unités ont dû être momentanément fermées (3). Ceci illustre l’importance d’accueillir le patient dans un environnement protecteur. Les infections nosocomiales les plus fréquentes sont l’aspergillose invasive, les pneumonies cliniques ou microbiologiquement documentées, les septicémies par translocation digestive et les infections virales.

Les mesures d’isolement protecteur s’appliquent aux patients neutropéniques (taux de polymorphonucléaires <1500/µL et taux de neutrophiles <500/µL (4). Les principales indications d’un isolement protecteur sont la greffe de moelle osseuse ou de cellules souches périphériques lors de la première chimiothérapie du conditionnement de greffe et l’aplasie (onco-)hématologique. Néanmoins, dans un souci évident d’organisation, le patient est mis en isolement protecteur dès son entrée à l’hôpital, avant sa première cure de chimiothérapie et avant donc qu’il ne soit en neutropénie. On anticipe également de cette manière le risque d’infection nosocomiale en limitant les contacts avec de potentiels germes pathogènes avant que le patient ne soit neutropénique.

b. Isolement en chambre

Plusieurs articles et guidelines recommandent que le patient hospitalisé pour une greffe de CSH soit en chambre seule. Cependant, tant que le patient n’est pas en isolement avec des précautions additionnelles (contact, gouttelettes, aériennes), des chambres doubles peuvent être envisagées (5). Les chambres doivent être munies de filtres HEPA (High Efficiency Particulate Air) et/ou d’un flux laminaire. Le filtre HEPA  retient 99,97 % des particules de diamètre supérieur ou égal à 0,3 µm (6). Il s’agit donc d’un filtre ayant une très haute efficacité. On utilise d’ailleurs également la dénomination « filtre THE » (Très Haute Efficacité). A noter que ces filtres sont moins efficaces sur des particules virales comme par exemple le RSV ou le virus Influenza mais cela importe peu si l’air propulsé dans la chambre est 100% d’air neuf (3). Le flux laminaire balaye le lit du patient. L’air est propulsé du plafond vers le sol et est récupéré par des bouches d’extraction situées sur les murs de la chambre. Les fleurs et plantes sont proscrites au sein de la chambre pour lutter contre le risque aspergillaire et autres champignons.

c. Précautions standards et additionnelles

Les précautions standards sont indispensables pour tout contact avec les patients et consistent principalement en l’hygiène des mains et le port d’une blouse ou d’un pantalon et d’une casaque appropriés, propres et changés chaque jour. Le port d’un masque chirurgical et de gants ne s’appliquent que dans des situations particulières (patient qui tousse pour le port du masque, contact prévisible avec du sang – des liquides biologiques – les muqueuses – une peau lésée pour le port de gants) (5-7).

Selon les guidelines de Yokoe et at, l’utilisation d’un tablier supplémentaire à mettre au niveau du sas d’entrée de la chambre d’un patient bénéficiant d’un isolement protecteur et à laisser à cet endroit lorsqu’on la quitte est recommandée (7). Il n’y a, à l’heure actuelle, aucune donnée permettant d’affirmer que l’usage de ces précautions supplémentaires est réellement indispensable.

Il va de soi que des précautions additionnelles (contact, gouttelettes et aérosols) seront de mise lorsque la situation l’exige (colonisation ou infection à MRSA-VRE-bacilles à Gram négatif multi-résistants, diarrhées à Clostridium difficile, infections virales respiratoires, infection à Mycobacterium tuberculosis, etc).

Les patients en isolement protecteur seront, dans certaines situations exceptionnelles et lorsqu’ils sont sortis de la période de neutropénie, amenés à quitter leur chambre (pour effectuer un examen complémentaire par exemple). Ils doivent dans ce cas porter un masque chirurgical et remonter dans le service aussitôt l’examen terminé. Ils doivent, lorsqu’ils réintègrent à nouveau leur chambre, répéter la procédure d’entrée en chambre stérile comme décrite ci-dessous (5-7-8).

d. Mesures concernant le patient

L’entrée en chambre stérile est un moment qui génère beaucoup d’inquiétude et de questions chez le patient et son entourage. Il est important pour le personnel soignant de lui donner des informations complètes et correctes, visant à l’informer, le rassurer, et à le mettre dans les conditions optimales pour suivre son traitement. Les effets personnels sont acceptés en chambre stérile s’ils sont facilement lavables et désinfectables ou s’ils sont neufs et dans leur emballage d’origine. Les jouets pour enfants seront acceptés dans la chambre s’ils peuvent être facilement nettoyés et désinfectés. Les vêtements personnels et les peluches doivent être lavés en machine à température élevée au moins une fois par semaine et aussi souvent que nécessaire (2-7). Avant d’entrer en chambre stérile, le patient doit procéder à une toilette complète (cheveux y compris) à l’aide d’un savon désinfectant (type Isobétadine©) et revêtir un pyjama propre. Il est recommandé aux patients de laisser leurs bijoux à domicile et de ne pas en porter durant toute la période d’hospitalisation.

e. Mesures concernant les visiteurs

Les personnes (famille, proches) voulant rendre visite aux patients hospitalisés devraient idéalement être soumises à une évaluation médicale surtout en période hivernale. Les personnes présentant des symptômes suggérant une pathologie infectieuse sous-jacente (fièvre, vomissements, diarrhées, syndrome grippal ou tout autre signe d’infection respiratoire) ou ayant une histoire de contact récent avec une personne souffrant d’une maladie contagieuse (varicelle, oreillons, coqueluche, grippe, rougeole…) seront interdits de visite (7). Les visiteurs ayant été vaccinés dans les jours précédant la visite avec un vaccin vivant atténué ne pourront pas entrer dans la chambre du patient. Il n’existe pas de recommandation précise quant à l’âge minimal requis pour rendre visite mais chaque visiteur doit être en bonne santé et doit être capable d’effectuer une hygiène des mains stricte et de respecter les conditions d’isolement protecteur (revêtir un pantalon et une blouse propres et dédiés à l’unité de soins, porter un masque chirurgical et un bonnet de salle d’opération en fonction du centre hospitalier) (8). Il parait logique d’éviter toute visite d’enfants en bas âge car ils sont constamment en contact avec des virus très contagieux pour le patient immunodéprimé. Le nombre de visiteurs autorisés par patient et par jour doit être fixé par chaque centre en fonction de différents critères : prévoir une plage horaire dans le planning du nursing permettant d’interroger de manière consciencieuse les visiteurs sur leur état de santé, de les superviser pour l’hygiène des mains et l’application des mesures de l’isolement protecteur sans oublier l’état d’extrême fatigue du patient.

f. Hygiène des mains

L’hygiène des mains est la première mesure de prévention contre toute infection nosocomiale. C’est une mesure de précaution standard essentielle et incontournable pour tous les patients quels que soient les soins administrés (8-9). L’hygiène des mains inclut d’une part la désinfection avec une solution hydro-alcoolique (SHA) et d’autre part le lavage des mains à l’eau et au savon. L’usage de faux ongles et vernis est proscrit de même que le port de bagues, alliance, bracelets et montre. Les membres du personnel doivent éduquer les membres des familles des patients et autres visiteurs à être compliants à une hygiène des mains correcte, avant et après chaque visite. L’hygiène des mains doit être effectuée selon les cinq indications soit avant contact patient, avant un acte propre ou invasif, après contact patient, après contact avec l’environnement du patient et après contact avec des liquides biologiques. Les campagnes d’hygiène des mains et la journée de l’hygiène des mains organisées partout dans le monde sont des exemples d’actions pour continuellement sensibiliser les équipes de soins à cet acte simple sauvant de nombreuses vies (10).

2.2. Ventilation

Les guidelines internationales recommandent que les chambres prévues pour un isolement protecteur soient munies d’un filtre HEPA avec une efficacité de 99,97%. Plus de 12 extractions d’air par heure doivent être effectuées dans ce type de chambre qui sera placée en pression positive (≥ 2,5 Pascal par rapport à la pression du reste de l’unité) (6). Le but principal du filtre HEPA est de protéger les patients contre les infections fongiques dont la première cause est l’Aspergillus sp. Il a été démontré que ce type de filtre associé ou non à un flux laminaire améliorait la survie des patients greffés (11). L’association d’un flux d’air laminaire à un filtre HEPA n’est plus exigée depuis l’utilisation d’antifongiques efficaces associés à une filtration de l’air optimale (5-12). Les portes des sas menant aux chambres doivent être munies d’un système permettant leur fermeture semi-automatique (13).

2.3. Eau

Excepté l’eau stérile, toutes les eaux domestiques sont contaminées par des microbes. Chez les personnes en bonne santé, ils provoquent rarement des infections. Par contre, chez un patient immunodéprimé, ces eaux peuvent provoquer des infections si elles sont ingérées ou en cas de contact avec une peau lésée. Les agents potentiellement pathogènes les plus fréquemment isolés sont Legionella sp, Pseudomonas aeruginosa, des mycobactéries atypiques et certains virus. Des prélèvements microbiologiques systématiques des différents points d’eau (robinet d’éviers et de douches) ne sont pas recommandés sauf en cas d’épidémie (14). L’efficacité de filtres à eau réduisant fortement le nombre de microbes n’a pas été démontrée en termes de prévention des infections nosocomiales mais pourrait se révéler utile pour limiter le nombre d’agents pathogènes éventuels contenus dans les gouttelettes d’eau aérosolisées. Il existe également des filtres à eau à positionner au niveau du siphon dont l’efficacité n’a pas été démontrée  (15). Il est recommandé aux patients de ne pas boire l’eau du robinet mais de l’eau en bouteille.

2.4. Lingerie

L’objectif visé consiste à éviter le transport par le linge de micro-organismes potentiellement pathogènes. Le linge prêt à l’usage (draps de lit, essuies et gants de toilette, pyjamas, vêtements de travail pour les membres du personnel) doit être dépourvu de micro-organismes pathogènes (y compris les moisissures) responsables d’infections nosocomiales. Le nombre d’organismes non-pathogènes ne devrait pas dépasser 12 unités formant colonie (UFC) par 25 cm² (16). Le linge propre doit être stocké dans un local réservé sans communication avec des zones affectées à d’autres fonctions. Le local doit être maintenu propre par un entretien régulier. Toute personne manipulant le linge propre doit avoir les mains propres et procéder à une hygiène des mains. La stérilisation du linge n’a jamais fait la preuve de son intérêt, y compris pour les patients fragiles (hématologie, néonatalogie…) (5).

2.5. Soins de la bouche et de la peau

Les recommandations concernant les soins optimaux visant à lutter contre une infection nosocomiale contractée via un germe de la flore cutanée consistent en une toilette complète quotidienne avec un savon désinfectant doux à pH neutre et sans parfum. Il est conseillé d’hydrater la peau correctement car les traitements immunosuppresseurs peuvent assécher fortement celle-ci et engendrer un prurit entrainant des griffures et des plaies qui sont des portes d’entrée pour les germes cutanés. Une inspection par les équipe de soins des sites cutanés potentiellement infectés (voies centrales, cathéters, périnée, …) doit être effectuée quotidiennement surtout durant la période de neutropénie (3-7).

L’éducation des patients en isolement protecteur au maintien d’une bonne hygiène dentaire et buccale est primordiale car la sphère buccale est la porte d’entrée principale pour les bactéries de la flore salivaire. Garder une bonne hygiène des dents et de la bouche n’est pas toujours aisé pour ces patients car ils sont très souvent atteints de mucite et d’aphtes qui engendrent des douleurs et des saignements parfois extrêmes. Dans la mesure du possible, il est conseillé aux patients de se rendre en consultation préventive chez un dentiste avant leur hospitalisation en unité stérile. Durant la période de neutropénie, les patients ne peuvent pas utiliser une brosse à dents classique afin d’éviter toute blessure que celle-ci pourrait engendrer au niveau des gencives. Des bains de bouches réguliers sont recommandés (4 à 6 fois par jour) avec un désinfectant prévu à cet effet (Corsodyl® par exemple) (3-7).

2.6. Entretien

Les unités de transplantation de moelle osseuse et de cellules souches périphériques doivent être entretenues quotidiennement de manière méticuleuse en particulier concernant le contrôle de la poussière, principale niche des Aspergillus sp. L’usage de torchons et loques humidifiés avec un détergent-désinfectant approuvé par l’équipe d’hygiène hospitalière de l’institution est recommandé de manière à éviter l’aérosolisation des particules de poussière (17). Plusieurs études ont montré que des surfaces mal entretenues et contaminées sont un facteur de risque d’infections nosocomiales mais il existe peu de données démontrant que le nettoyage et la désinfection journaliers des chambres réduisent ce risque. Certaines recommandations ont établi un score permettant de définir la fréquence de nettoyage et de désinfection des différents locaux suivant différents critères :

– la fréquence de passage dans la pièce et de contacts avec une surface donnée (par exemple table de soins) ;
– le type d’activité effectuée dans la pièce (local de soins versus salle d’attente) ;
– la vulnérabilité des patients occupant la pièce ;
– la probabilité de contamination du local.

L’utilisation d’aspirateurs est fortement déconseillée ou alors ceux-ci doivent être munis de filtre HEPA. Les revêtements de sol doivent être lisses et non poreux pour éviter tout dépôt, même minime, de poussière. Les carpettes, tapis et paillassons doivent être proscrits.

Discussion

L’isolement protecteur a pour but de prévenir la survenue d’infections chez les patients neutropéniques. Il est largement implémenté dans les centres de transplantation de CSH mais avec des variations au sein des procédures et des applications pratiques de chacun d’entre eux, malgré le fait qu’aucune étude n’ait encore démontré de manière formelle son impact sur la réduction du taux des infections nosocomiales (7). Cependant, les infections – dont l’origine peut être exo- ou endogène – représentent la principale cause de morbidité et de mortalité de la plupart des patients onco-hématologiques. La mise en place d’un environnement protecteur et de mesures strictes d’hygiène hospitalière sont indispensables pour lutter contre la survenue de ces infections. Holy et al. décrivent que 60% des patients en neutropénie fébrile ont une infection bactérienne. Les infections bactériennes surviennent le plus souvent au début de la période de neutropénie, les infections fongiques apparaissent plus tard alors que les infections virales peuvent se présenter durant toute la période neutropénique (13). Des études ont montré que l’hygiène des mains est la méthode la plus efficace pour la prévention des infections chez les patients neutropéniques, en comparaison avec l’isolement protecteur (3, 18).

Il a été démontré que la mise en place d’un isolement protecteur accroît le niveau d’anxiété, de dépression, d’insomnie et le sentiment de solitude du patient hospitalisé (19). Tecchio et al. rapportent un cas d’interruption d’isolement protecteur qui avait déclenché une dépression grave chez un patient (22). Ces situations extrêmes restent fort heureusement rares mais illustrent le fait qu’un support social et psychologique ne doit absolument pas être négligé pour le bien être du patient et son combat face à la maladie. Il est important de comprendre comment les patients perçoivent l’isolement protecteur non seulement d’un point de vue médical mais également d’un point de vue psychosocial. La présence des membres de la famille auprès du patient est un outil indiscutable pour son moral et sa lutte contre la maladie (21). Dès lors, la question de l’âge minimal requis des visiteurs (un parent « privé » de la visite de son jeune enfant) et de la présence d’un parent auprès de son enfant malade durant la nuit est remise en question. La balance entre réduire les consignes strictes des visites – sans pour autant agir de manière inconsciente et irréfléchie – qui auront un impact psychologique positif sur le traitement d’une pathologie onco-hématologique versus rester sévère sur ces consignes devrait être évaluée à travers de nouvelles études. La question prend une toute autre dimension éthique lorsqu’on pense aux patients pédiatriques qui sont, dans la plupart des centres, privés de leurs parents durant la nuit.

Le coût des mesures mises en place pour appliquer un isolement protecteur est élevé  (5) mais n’a pas été étudié durant ce travail. L’application de ces mesures prennent un certain temps et sont parfois lourdes à respecter pour le personnel soignant. Il est difficile d’évaluer à quel point toutes ces mesures sont nécessaires et ont un impact sur la morbidité des patients greffés.

Le bénéfice de la filtration de l’air (filtre HEPA, flux laminaire) est reconnu pour la lutte contre le risque d’aspergillose et d’autres moisissures mais il est difficile de le dissocier de l’impact d’une prophylaxie antibiotique (5).

Le petit matériel médical et tout autre équipement qui entrent dans le service doivent arriver propres, désinfectés et dans leur emballage d’origine. Tout ce qui est laissé en stock dans la chambre du patient doit être inspecté régulièrement car la poussière peut facilement y trouver refuge lorsque les emballages sont ouverts (par exemple une boite de pansements). Dans ce cas, le matériel devra être immédiatement évacué de la chambre (9). Aucune recommandation n’existe concernant tout autre équipement qui n’est pas destiné à entrer en contact direct avec le patient (médicaments, courrier, matériel pour les locaux techniques. Il semble quelque peu excessif qu’une désinfection doive être réalisée systématiquement pour ce genre de matériel s’il arrive propre et dans son emballage d’origine au sein de l’unité.

Tenant compte de la revue de la littérature et suite à la réflexion qui en découle, les modifications suivantes concernant la procédure de mise en isolement protecteur des CUSL pourraient être suggérées :

– Autoriser la visite d’enfants sans limite d’âge après une anamnèse médicale ciblée ;
– Autoriser qu’un parent (toujours le même) dorme avec son jeune enfant malade ;
– Le port systématique d’une surblouse à manches longues revêtue dans le sas de la chambre du patient doit être remis en question et ne semble pas nécessaire. Le costume devra être immédiatement changé si celui-ci est souillé ;
– Le port d’un bonnet de salle d’opération ou d’une charlotte dans la chambre du patient ou lors de l’administration de soins ne semble pas indispensable pour autant que les cheveux soient courts ou attachés ;
– Sous réserve d’une hygiène des mains irréprochable, le port de gants n’est pas indispensable sauf si un contact prévisible avec du sang – des liquides biologiques – les muqueuses – une peau lésée doit être effectué;
– Tout matériel en provenance de la lingerie, de la pharmacie, du magasin central, du service de distribution du courrier, etc arrivant dans son emballage d’origine et propre dans l’unité ne doit pas être désinfecté surtout si ce matériel doit être stocké dans un local technique.

Conclusion

Chaque centre hospitalier réalisant des greffes de CSH a ses propres protocoles basés sur des guidelines plus ou moins actuels et sur des recommandations de bonne pratique. Les grands principes sont communs et souvent les détails sont variables. Il ne s’agit pas de se contenter de prouver que l’isolement protecteur et les autres mesures qui y sont associées sont trop sévères et trop contraignants pour les alléger. Il n’y a pas de preuves qu’une unité de greffe doit être fermée, qu’il faut prendre toutes les mesures strictes qu’un isolement protecteur impose pour lutter contre le risque d’infection nosocomiale car tout cela s’inscrit dans un contexte ; cela reste une barrière qui permet aux membres du personnel et aux visiteurs d’être vigilants. Imaginons que demain les CUSL allègent ou revoient de manière drastique leur procédure de mise en isolement d’un patient immunodéprimé alors que les autres centres maintiennent leurs consignes, toute infection nosocomiale contractée risque d’être interprétée par les patients comme une erreur d’asepsie. Cependant, bien que les CUSL appliquent avec rigueur les recommandations en vigueur, une révision de certains points évoqués ci-dessus pourrait être suggérée sans pour autant mettre en péril les soins apportés aux patients.

Une suggestion pour des recherches futures est d’évaluer l’impact de l’application (ou la « désapplication ») de certaines recommandations sur les répercussions cliniques qui en découleraient notamment les infections nosocomiales. Mais pour des raisons évidentes d’organisation (beaucoup de personnes devraient être impliquées : médecins, nursing, personnel d’entretien ménager…), d’éthique et ensuite par manque d’investissement financier et de temps, ces études sont très difficiles à mettre en œuvre.

Références bibliographique

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