Utilisation des gants de toilette imprégnés à la chlorhexidine dans les Unités de Soins Intensifs (SI) de l’Evidence Based medicine (EBM) à la pratique clinique : commentaires à propos de l’expérience de l’UZ-Anvers

L’étude de F. Van Laer et coll. rapportée dans ce numéro de NOSO-Info est originale et innovante (assurément une première en Belgique !). Elle a en premier lieu le mérite de mettre en avant un bel exemple de collaboration pluridisciplinaire entre le laboratoire de microbiologie, les hygiénistes hospitaliers et les équipes soignantes de terrain. 

L’évaluation porte sur une période de plusieurs années et les résultats suggèrent un impact très favorable de la toilette quotidienne à base de gants imprégnés de chlorhexidine à 2% sur l’incidence de certaines infections nosocomiales ainsi que sur l’écologie des résistances microbiennes chez les patients en soins intensifs (SI). Les diminutions observées de 50% des taux d’incidence des septicémies associées aux cathéters veineux centraux (CLABSI) et des germes multirésistants (MDRO) après intervention par rapport à la situation de base constituent un résultat spectaculaire. Cependant, comme les auteurs eux-mêmes le soulignent, ces résultats ne permettent pas de conclure à l’existence d’un lien direct de causalité entre l’instauration de la toilette à la chlorhexidine et l’amélioration des deux indicateurs précités. 

Malgré les nombreuses études publiées dans la littérature internationale depuis plus de 10 ans, la toilette sans eau reste encore très peu appliquée compte tenu du doute qui subsiste quant aux bénéfices apportés par son utilisation. Force est de constater aussi que cette pratique n’a pas encore atteint un niveau élevé d’acceptation et que pour bon nombre de soignants la toilette des patients au bassin avec de l’eau et du savon reste encore la référence. Par ailleurs, on ne sait toujours que très peu de choses sur les risques d’effets indésirables liés à l’utilisation à large échelle de la chlorhexidine (développement de réactions cutanées, modifications de la composition du microbiote de la peau et des muqueuses, développement de résistances bactériennes aux antiseptiques mais également aux antibiotiques…). 

Bien que la chlorhexidine soit un produit antiseptique et désinfectant largement utilisé, peu coûteux et globalement bien toléré, le surcoût engendré par son utilisation sous forme de gants de toilette imprégnés à usage unique, la  nécessité d’acquisition de matériel supplémentaire pour cette pratique (p.ex: armoire de préchauffage), l’existence de formes commerciales multiples disponibles en conditionnements pré-emballées devraient également être pris en considération dans la décision de leur introduction dans les protocoles de soins et doivent aussi faire l’objet d’évaluations approfondies au niveau local. 

Ci-après quelques considérations qui mettent en lumière les lacunes et les nombreuses zones d’incertitudes qui doivent encore être levées avant une éventuelle généralisation de la recommandation de cette pratique de soins.

Les études publiées différent fortement les unes des autres et il est dès lors difficile de les comparer et de tirer des conclusions univoques en termes d’efficacité et de rapport coût/bénéfice.  Ces différences concernent à la fois les contextes cliniques (étude locale vs multicentrique), les  unités et services (médicaux, chirurgicaux, unités mixtes, etc.…), les profils (case-mix) des patients, ou encore les  paramètres d’intérêt ciblés (p.ex: septicémies nosocomiales de toute origine (HA-BSI), septicémies associées aux cathéters veineux centraux (CLABSI), pneumonies associées à la ventilation mécanique chez les patients intubés (VAP), infections des voies urinaires associées aux cathéters (C-AUTI), ,… ). 

Les taux d’infections de base (c’est à dire avant l’introduction de la chlorhexidine), la durée des études (de quelques semaines à plusieurs années) et donc les nombres d’événements d’intérêt rencontrés divergent aussi très fortement. Les nombres de journées d’hospitalisation à risque d’infection sont très souvent manquantes. Enfin, l’évaluation de l’impact de la toilette à la chlorhexidine sur la durée du séjour aux SI, la durée totale du séjour à l’hôpital ou sur la mortalité des patients en cours d’hospitalisation ne sont que très rarement mesurés et rapportés.

Le design des études publiées diverge aussi très fortement et les biais de publication (ou de non publication) sont nombreux. Les méta-analyses ne reprennent que les essais cliniques comparatifs randomisés et contrôlés (randomized controlled trials) ou encore les essais cliniques randomisés croisés en grappe (cross-over, cluster randomized trials). Par contre, les études observationnelles sans groupe contrôle ne sont pas retenues car elle sont trop hétérogènes et sujettes à de nombreuses variations. Le plus souvent ce sont cependant des études de type ‘avant-après’ comme celle de l’UZA qui montrent un effet favorable de l’utilisation des gants de toilette à la chlorhexidine sur la réduction des taux de certaines infections nosocomiales (HA-BSI, CLABSI). Par contre, les essais cliniques randomisés susmentionnés ne montrent aucun effet significatif lorsque considérés isolément car ils  n’atteignent généralement pas la taille et la puissance statistique suffisante.

En ce qui concerne les germes multi-résistants, ce sont en priorité les MRSA, les VRE et les entérobactéries productrices de BLSE (parfois Clostridium difficile) qui ont fait l’objet d’investigations. Par contre, les CPE (Entérobactéries productrices de carbapénémases) ainsi que d’autres bactéries à Gram-négatif multi-résistantes comme Pseudomonas aeruginosa ou Acinetobacter spp. ne sont quasiment jamais ciblées. Ce  manque de prise en compte est étonnant compte tenu de leur implication fréquente dans les infections nosocomiales contractées en soins intensifs et des nombreuses sources et réservoirs (notamment hydriques) qui leur sont associées. 

La diminution importante de l’incidence des P. aeruginosa multi-résistants observée dans l’étude de l’UZA pourrait accréditer l’hypothèse que la toilette sans eau à l’aide de gants de toilettes imprégnés de chlorhexidine diminuerait les risques d’acquisition de ces bactéries en réduisant la fréquence des contacts des patients avec l’eau du réseau de distribution dans le cadre des procédures de soins journaliers. Cependant il est très vraisemblable que des modifications d’autres variables (non évaluées dans l’étude) aient aussi pu être introduites au fil du temps (p.ex : systématisation du dépistage à l’admission dans l’unité et isolement précoce des patients porteurs de bactéries multi-résistantes, meilleure maitrise des risques microbiologiques de l’environnement, amélioration de la qualité de la prescription  des antibiotiques chez les patients hospitalisés suite à la mise en œuvre des groupes de gestion de l’antibiothérapie,….) et que celles-ci puissent aussi avoir contribué à cet impact favorable sur l’écologie des Pseudomonas aeruginosa multi-résistants au sein des unités de SI. 

Trois méta-analyses récentes (Alonso et al., 2016; Frost er al. 2018; Lewis et al. 2019) ont apportées des informations intéressantes. La revue d’Alonso qui incluait quatre études randomisées croisées (près de 23,000 patients dans 25 unités de SI dans plusieurs pays en Europe) avait un degré d’hétérogénéité acceptable (pour les études retenues) et montrait une réduction d’incidence de 26% des septicémies nosocomiales (HA-BSI). Une sous-analyse a identifié que c’était surtout le taux d’incidence des septicémies sur cathéter central (CLABSI) qui était diminué (-50%) mais que cette réduction n’était observée que pour les seules bactéries à Gram-positif (-55%) sans modification aucune du taux d’incidence des septicémies causées par des bactéries à Gram-négatif, suggérant ainsi un effet bénéfique de la chlorhexidine sur la prévention des HA-BSI et des CLABSI par l’intermédiaire d’une réduction des bactéries à Gram-positif de la flore commensale. Les résultats montraient également une variation importante selon les centres en fonction de la qualité de “l’hygiène de base”, les différences d’impact étant significativement moindres dans les unités de SI lorsque les taux de base des HA-BSI et de CLABSI étaient déjà bas avant introduction de la chlorhexidine dans la toilette quotidienne des patients.

La méta-analyse rapportée par Frost et al. incluait cinq essais cliniques randomisés (trois essais randomisés contrôlés et deux études randomisées croisées en grappe). Elle portait sur plus de 17,000 patients hospitalisés en unité de SI (>50 unités, dans une dizaine de pays) et elle excluait les populations non-adultes (SI pédiatriques) ne tenant compte par ailleurs que des nombres de journées à risque d’infection. Etaient également exclues toutes les études où des interventions autres que l’introduction de chlorhexidine étaient réalisées. 

Les principaux résultats d’intérêt analysés étaient: 
1) les septicémies (HA et non-HA BSI);
2) les septicémies associées aux cathéters centraux (CLABSI);
3) les taux de colonisation/infection par MDRO (essentiellement MRSA, VRE, +/-Clostridium difficile avec peu/pas de données renseignées concernant les MDRO à gram-négatif); 
4) les pneumonies associées à la ventilation artificielle (VAP); 
5) les infections des voies urinaires associées aux cathéters (CAUTI). 

Pour les BSI et CLABSI, les réductions d’incidence après introduction de la chlorhexidine étaient respectivement de 29% et de 40% , avec une incidence de base durant la période contrôle de 6 BSI/1000 jours et de 3 CLABSI/1000 jours de séjour en SI. Pour les MDRO une diminution globale d’incidence de 18% était observée dans la période chlorhexidine (avec une incidence de base de 6 MDRO/1000 jours de SI). Aucune réduction n’était par contre observée pour les VAP ni pour les C-AUTI.  Globalement, les auteurs concluaient à l’incertitude du bénéfice de la chlorhexidine par rapport à une toilette standard et à l’impossibilité de généraliser les recommandations de son utilisation sur base des données existantes. 

L’accent était mis en particulier sur la nécessité de réaliser des études complémentaires de taille et de puissance suffisante afin d’éviter des erreurs de type I (non détection d’une différence réelle), et sur la nécessité d’inclure des groupes plus homogènes (SI médicaux chirurgicaux ou trauma) et d’étudier des facteurs de risque individuels permettant d’identifier d’éventuels groupes/types de patients qui pourraient particulièrement bénéficier de la toilette à la chlorhexidine. Enfin le degré du taux d’observance, la fréquence de la toilette  (quotidienne vs tous les deux jours), les effets éventuels liés à la concentration de chlorhexidine utilisée (2% vs 4%) et à la formulation (gants pré-imprégnés commerciaux prêts à l’emploi vs préparation extemporanée de la dilution de la solution par le personnel soignant au lit du patient) étaient quelques uns des multiples facteurs non adressés par les études dans cette revue. 

La méta-analyse la plus récente de la Cochrane systematic review (Lewis et coll. 2019) incluait quant à elle huit études (quatre essais contrôlés randomisés sur plus de 1,500 patients et quatre études randomisés croisées en grappe comprenant 23 unités de SI randomisées avec un total de plus de 23,000 patients. Ces séries comparaient l’utilisation de gants de toilette imprégnés de chlorhexidine à 2 % ou de solutions diluées de chlorhexidine à 4 % par rapport aux bains à l’eau savonneuse ou aux bains avec des gants de toilette non antimicrobiens. A l’aide d’une approche du niveau d’évidence (GRADE), la méta-analyse a montré un niveau de certitude faible ou très faible d’évidence selon les indicateurs et qui ne permettait aucune conclusion de l’effet de la chlorhexidine sur la réduction du taux d’infections nosocomiales, de la durée de séjour et de la mortalité des patients en SI. Bien que des réactions cutanées aient été rapportées comme possible effet indésirable dans cinq des huit études, le rapportage était le plus souvent insuffisamment précis et ne permettait pas d’attribuer la responsabilité de celles-ci à la chlorhexidine.

En conclusion, il est important que d’autres études soient réalisées afin de tenter de reproduire ces résultats dans des contextes locaux différents. La démarche de l’équipe de l’UZA ouvre la voie et devrait inciter d’autres équipes de soins à évaluer et préciser les bénéfices cliniques et économiques de la toilette à la chlorhexidine dans les hôpitaux belges. A terme, cette pratique de soins pourrait s’imposer comme un pilier majeur dans les stratégies de prévention des infections associées aux soins chez les patients à haut risque hospitalisés en unité de soins intensifs voire également dans des groupes de populations à risque hospitalisés dans d’autres types d’unités.

Références

– Alonso E, Blot K, Blot S. Prevention of hospital-acquired bloodstream infections through chlorhexidine gluconate-impregnated washcloth bathing in intensive care units: a systematic review and meta-analysis of randomised crossover trials. Eurosurveillance 2016 ; 21(46) : pii=30400. DOI: http://dx.doi.org/10.2807/1560-7917.
– Frost SA, Hou YC, Lombardo L, Metcalfe L, Lynch JM, Hunt L, Alexandrou E, Brennan K, Saxnchez D, Aneman A, Christensen M. Evidence for the effectiveness of chlorhexidine bathing and health care-associated infections among adult intensive care patients: a trial sequential meta-analysis.BMC Infectious Diseases, 2018, 18 : 679-89.
– Lewis SR, Schofield-Robinson OJ, Rhodes S, Smith AF. Chlorhexidine bathing of the critically ill for the prvention of hospital-acquired infection. Cochrane Systematic Review –  Intervention Version published: 30 August 2019 
– https://doi.org/10.1002/14651858.CD012248.pub2

Gants de toilette imprégnés de chlorhexidine à usage unique. Quel impact sur les MDRO et CLABSI chez des patients admis en soins intensifs à l’UZA?

1. Introduction 

Depuis 2009, l’UZA applique dans l’ensemble de l’hôpital le lavage soignant (également appelé le « lavage sans eau ») pour les patients alités. Il est, dans ce cadre, fait appel à des gants de toilette jetables neutres sans action antimicrobienne(1).
Suite à des publications concernant l’impact favorable sur l’incidence notamment des septicémies (2,3), il a été décidé, en 2014, de passer dans le service des soins intensifs (SI) à des gants de toilette antimicrobiens imprégnés de chlorhexidine 2% (CHX) comme composé actif.

L’effet de l’utilisation de ces gants CHX sur l’incidence des septicémies associées aux cathéters centraux (CLABSI) et des micro-organismes multirésistants (MDRO) aux SI est décrit ci-après.

2. Matériel et méthodes 

Depuis le mois de juillet 2014, tous les patients des cinq services de soins intensifs (total de 45 lits) de l’UZA sont lavés quotidiennement à l’aide de gants de toilette jetables imprégnés de CHX 2%. Pour une toilette corporelle complète d’un patient, un emballage contenant huit gants de toilette est utilisé. 
 Dans le but d’accroître le confort du patient, les gants de toilette sont préchauffés dans un réchauffeur à fonction
« first-in first-out », ce qui permet d’éviter que les emballages y restent trop longtemps (photo 1).

Photo 1 : réchauffeur pour gants de toilette CHX 

L’incidence nosocomiale moyenne de MDRO par 1 000 journées d’hospitalisation de 2006 à juin 2014 inclus a été comparée à l’incidence nosocomiale moyenne après l’introduction des gants de toilette CHX de juillet 2014 à 2018 inclus.

Les MDRO (infections et colonisations) suivantes ont fait l’objet d’une surveillance et ont été incluses dans l’analyse des données d’incidence :

Enterobacteriaceae : 
o Résistance ou sensibilité dimininuée (intermédiaire (*)) vis-à-vis des céphalosporines de troisième ou de  quatrième génération (BLSE)
oRésistance ou sensibilité dimininuée (intermédiaire (*))  au méropénème et/ou  production de carbapénémase (CPE)

Acinetobacter baumannii :
o Résistance à ou  sensibilité dimininuée (intermédiaire (*)) au méropénème et/ou production de carbapénémase  

Pseudomonas aeruginosa :  
o Résistance ou sensibilité dimininuée (intermédiaire (*)) à 4 des 5 classes d’antibiotiques  suivantes: pénicillines, céphalosporines de 3e et/ou de 4e génération, carbapénèmes, fluoroquinolones, aminoglycosides) et/ou production de carbapénémase

(*) La sensibilité intermédiaire correspond au concentration critique entre S (sensible) et R (résistant) selon EUCAST (European Committee on Antimicrobial Susceptibility Testing).

o Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (MRSA)

o Entérocoques résistant à la vancomycine (VRE)

o Stenotrophomonas maltophilia résistant au cotrimoxazole 

L’incidence des septicémies associées aux cathéters centraux (CLABSI) par 1 000 jours cathéters de janvier 2014 à juin 2014 inclus (période avant intervention) est comparée à l’incidence de juillet 2014 à 2016 inclus (période après intervention). 

À partir de 2017, plusieurs mesures préventives supplémentaires ont été introduites en vue de la prévention des CLABSI (entre autres notamment l’utilisation de connecteurs sans aiguille en combinaison avec capuchons désinfectants, un système de fixation adéquate des cathéters).

Dans le cadre des normes d’accréditation (Joint International Commission – JCI)  pour la qualité des soins et en particulier du niveau de reconnaissance de la qualité des soins infirmiers (label Magnet)  en vigueur  à l’UZA, les données d’incidences des CLABSI sont enregistrées et communiquées tous les trois mois dans la base de donnée centrale des indicateurs de qualité (« National database of nursing quality indicators », de l’American Nurse Association). 

Les CLABSI, au même titre que les chutes, les escarres, les infections urinaires sur cathéter (CAUTI),…) sont en effet repris dans le cadre du label Magnet comme des indicateurs pertinents du niveau de qualité des soins infirmiers (« nurse sensitive quality indicator »)  (4). Les directives de cette collecte de données stipulent que l’enregistrement des CLABSI doit se faire selon la définition CDC (5).

Le cathéter veineux central (CVC) doit être présent au moins 2 jours calendrier avant l’apparition de la septicémie (le jour de la pose du CVC étant qualifié de jour calendrier 1) et le CVC doit être présent le jour de la septicemie ou le jour précédent. Cette définition diverge du protocole national (belge) (6).

3. Résultats 

a) Incidence nosocomiale des MDRO
L’incidence nosocomiale globale des MDRO était de 0,56 par 1 000 jours d’hospitalisation (période avant intervention de 2006 à juin 2014 inclus) contre seulement 0,27 par 1 000 jours d’hospitalisation après introduction des gants de toilette CHX (période de juillet 2014 à 2018 inclus). Ceci correspond à une diminution du taux d’incidence de 51.5 % (graphique 1)

On a par ailleurs  observé une légère diminution des infections nosocomiales à MRSA, à savoir de 0,026 par 1 000 jours d’hospitalisation à 0,024 par 1 000 jours d’hospitalisation , soit une réduction de 6,7% (graphique 2).

Graphique 1 : Incidence MDRO, MRSA inclus 

 

S1) = premier semestre ; (S2) = deuxième semestre 

Graphique 2 : Incidence MRSA
(S1) = premier semestre ; (S2) = deuxième semestre 

b) Incidence des CLABSI

L’incidence des CLABSI enregistrée pour les 6 premiers mois de 2014 était de 2,54 par 1 000 jours cathéters et a diminué après l’introduction des gants de toilette CHX à 1,24 par 1 000 jours cathéter pour la période comprise entre juillet 2014 et 2016 inclus, soit une diminution  de 51 %. En suite del’introduction d’autres mesures préventives à partir de 2017, l’incidence des CLABSI a encore diminué pour atteindre en 2018 un niveau de 0,95/1 000 jours cathéters, soit une baisse de 62,6 % par rapport à l’incidence mesurée lors du premier semestre de 2014 (avant intervention).


Graphique 3 : Incidence CLABSI
TXT(S1) = premier semestre ; (S2) = deuxième semestre 

4. Discussion 

Depuis l’introduction de la toilette quotidienne des patients des SI à l’aide de gants de toilette imprégnés de CHX à 2%, tant l’incidence nosocomiale des MDRO que celle des CLABSI a chuté de manière substantielle (- 50% environ par rapport aux taux d’incidence avant intervention) chez les patients hospitalisés dans les unités de SI de notre hôpital.

Cependant, aucun lien de causalité directe ne peut être établi entre l’utilisation des gants de toilette  CHX et la diminution d’incidence des CLABSI.  En effet, nous ne disposons d’aucune données de base de l’incidence des CLABSI avant 2014 en raison de l’absence du nombre de jours cathéters et seule une comparaison avec une période d’un semestre avant l’intervention a pu être réalisée.

Par contre en ce qui concerne les MDRO, une comparaison a pu être réalisée avec les incidences de la période avant 2014. Il en ressort notamment qu’une diminution de l’incidence de Pseudomonas aeruginosa multirésistant était déjà amorcée dès 2006. Cette espèce bactérienne est bien connue comme pathogène opportuniste important d’origine hydrique.

Il est possible que l’abolition de l’utilisation d’eau du réseau pour les soins aux patients des soins intensifs dès 2005 ait été une mesure ayant déjà en soi contribué à la réduction d’incidence des MDRO. Ce facteur ne peut cependant pas être responsable d’une diminution des CLABSI  car la grande majorité des microorganismes responsables sont des bactéries à Gram-positif (60-70%) commensales de la peau. Avant l’introduction des gants de toilette CHX, les patients des soins intensifs étaient en effet lavés avec des gants de toilette jetables non-antibactériens. Cette mesure avait été introduite suite à la survenue d’infections et de colonisations chez des patients des soins intensifs à Sphingomonas paucimobilis, également présents dans l’eau de distribution (7). Les lavabos ont également été à plusieurs reprises incriminés comme source potentielle ou comme réservoir de micro-organismes multi-résistants responsables d’infections nosocomiales dans des unités de SI (8).

Après l’utilisation des gants de toilette CHX, un nouveau recul de MDR-Pseudomonas aeruginosa a été constaté
(graphique 4). Ces résultats ne confirment donc pas la problématique de la résistance accrue de micro-organismes contre CHX, comme plusieurs études le décrivent. Surtout pour Pseudomonas aeruginosa, qui est réputé être capable de se développer dans une solution savonneuse de 1% CHX (9). Le recul limité de l’incidence des MRSA, ainsi que la hausse en 2018, peut éventuellement s’expliquer par le fait que les MSRA colonisent surtout le nez, partie du corps sur laquelle les gants de toilette désinfectants ont un impact limité. En ce qui concerne les MRSA également, rien ne permet actuellement d’indiquer dans quelle mesure l’utilisation de longue durée de CHX peut expliquer le recul limité, voire la hausse de l’incidence en 2018 à la suite d’une possible résistance à la CHX. A ce jour, la concentration minimale bactéricide de CHX la plus élevée rapportée est de 256 mg/litre (= 0,25%) dans l’albumine du sérum qui tue 50 % des bactéries (MBC50), contre 512 mg/litre (=0,50%) pour la concentration minimale Inhibitrice (CMI), soit un niveau 8 à 4 fois inférieur au dosage utilisé de 2% dans les gants de toilette CHX (10,11).

Un suivi de l’évolution des incidences des MDRO et CLABSI reste donc nécessaire en raison de la tendance croissante des MDRO à partir de 2017. 

Graphique 4 : Incidence de MDR-Pseudomonas aeruginosa

(S1) = premier semestre ; (S2) = deuxième semestre 

La suite du recul des CLABSI en 2018 est éventuellement due à plusieurs facteurs, étant donné que de multiples actions spécifiques ciblant la prévention des CLABSI ont été réalisées. Il s’agit par exemple de l’introduction de connecteurs sans aiguille avec capuchons désinfectants (de type Curos®, SwabCap® ou PurHub™), de l’utilisation de rallonges en spirale afin qu’une rampe de robinets puisse être manipulée à distance du patient, etc.

Les campagnes continues sur l’hygiène des mains induisent également une hausse de l’utilisation de gel hydroalcoolique pour les mains dans les soins intensifs. Le nombre de moments d’hygiène des mains est depuis 2017 supérieur à l’objectif minimal de 40 par jour d’hospitalisation (12).

5. Conclusion

Une diminution notable de l’incidence des CLABSI et MDRO aux soins intensifs a été observée suite à l’introduction de la  toilette quotidienne à l’aide de gants de toilette imprégnés à la CHX. Cette diminution est très probablement d’origine multifactorielle, vu que, d’une part, l’eau de distribution en tant que source potentielle de pathogènes a été éliminée et que, d’autre part, des mesures supplémentaires en guise de prévention des CLABSI ont été introduites.  Une vigilance reste cependant de mise en raison de la tendance croissante de l’incidence des MDRO.

6. Références

1. Van Laer F, Stockmann E. Eenmalig te gebruiken geïmpregneerde washandjes. Ervaringen in het UZA. Noso-info, 2016;23(3): 12-17.

2. Bleasdale SC, Trick WE, Gonzalez IM, Lyles RD, Hayden MK, Weinstein RA. Effectiveness of chlorhexidine bathing to reduce catheter-associated bloodstream infections in medical intensive care unit patients. Arch Intern Med. 2007;167:2073–2079.

3. Munoz-Price LS, Hota B, Stemer A, Weinstein RA. Prevention of bloodstream infections by use of daily chlorhexidine baths for patients at a long-term acute care hospital. Infect Control Hosp Epidemiol. 2009;30:1031–1035.

4. The Online Journal of Issues in Nursing (OJIN). The National Databank of Nursing Quality Indicators® (NDNQI®), 2007;12(3).

http://ojin.nursingworld.org/MainMenuCategories/ANAMarketplace/ANAPeriodicals/OJIN/TableofContents/Volume122007/No3Sept07/NursingQualityIndicators.aspx

5. Centers for Disease Control and Prevention. National Healthcare Safety Network (NHSN). Patient Safety Component Manual CDC. January 2019.

https://www.cdc.gov/nhsn/pdfs/pscmanual/pcsmanual_current.pdf.

6. Sciensano. Infections liées aux soins & antibiorésistance. Surveillance des Septicémies dans les Hôpitaux Belges. Protocole version 4.4, mai 2017

https://www.wiv-isp.be/nsih/download/BSI%20surv%20protocol_FR_Jun2017.pdf

7. Jansens HAL, Van Laer F, Goovaerts E et al. Nosocomial infections caused by Sphingomonas paucimobilis in an intensive care unit associated with contaminated tap water. Abstract 06-A-266-SHEA. SHEA, Chicago, 2006.

8. Marchaim D, Taylor AR, Hayakawa K, et al. Hospital bath basins are frequently contaminated  with multidrug-resistant human pathogens. Am J Infect Control, 2012 Aug;40(6):562-4. DOI: 10.1016/j.ajic.2011.07.014. Epub 2011 Dec 16.

9. Kampf G, Acquired resistance to chlorhexidine – is it time to establish an “antiseptic stewardship” initiative?, Journal of Hospital Infection (2016), doi: 10.1016/j.jhin.2016.08.018.

10. Gezondheidsraad. Resistentie door desinfectantia, achtergronddocument bij Zorgvuldig omgaan met desinfectantia. Den Haag: Gezondheidsraad, 2016; publicatienr. A16/03.

11. Wand ME, Bock LJ, Bonney LC, Sutton JM. 2017. Mechanisms of increased resistance to chlorhexidine and cross-resistance to colistin following exposure of Klebsiella pneumoniae clinical isolates to chlorhexidine. Antimicrob Agents Chemother, 2017; 61(1):e01162-16. https://doi.org/10.1128/AAC.01162-16.

12. Ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports (FR). Modalités de calcul de l’indicateur de consommation de produits hydro-alcooliques (ICSHA 2006).

Prévention et contrôle des infections pendant la pandémie de Covid 19 : chronique d’une expérience vécue à l’hôpital AZ Groeninge de Courtrai

Lorsque l’OMS a fait état le 5 janvier 2020 de 40 cas de pneumonies d’origine inconnue dans la ville de Wuhan dans la province chinoise de Hubei 1, personne n’aurait cru que à peine 2 mois plus tard, le 11 mars 2020, qu’il s’agirait d’une pandémie. D’aucuns continuent par ailleurs de se demander pourquoi la Chine a initialement caché les chiffres officiels et a attendu le 18 janvier pour admettre que le virus était transmissible à l’homme.

L’AZ Groeninge disposait déjà de recommandations en matière de prévention des infections pour le SARS-CoV, le MERS-CoV, de nouveaux variants de coronavirus et d’un système d’alerte établi par la JCI (Joint Commission International) pour la détection rapide des cas suspects de pathogènes importés et à haut potentiel de transmission via la mise en place d’un pré-triage aux urgences et d’un isolement précoce. Au début, la définition d’un cas potentiel était simple: un tableau clinique d’une infection sévère des voies respiratoires (pneumonie) combiné à un historique de voyage dans les 14 jours avant le début des symptômes dans la province de Hubei. Après avoir contacté le médecin en charge de la lutte contre les maladies infectieuses de « l’Agentschap Zorg en Gezondheid »(AZG ), des échantillons été envoyés pour analyse au laboratoire de référence national des virus pathogènes de l’UZ Leuven. En cas de confirmation du diagnostic et de nécessité d’hospitalisation, les patients étaient adressés soit à l’UZ Antwerpen soit au CHU Saint-Pierre de Bruxelles. Les patients présentant une infection potentielle au 2019-nCoV, appelée COVID-19 à partir du 11/02/2020, semblaient encore bien loin…  

A ce moment, le déploiement rapide d’une capacité de tests et la préparation des laboratoires en Belgique étaient difficilement réalisables, comme dans la plupart des autres pays d’Europe d’ailleurs. A cause du manque criant de réactifs, d’appareils de laboratoire et de matériel de prélèvement, le gouvernement belge a établi des critères stricts limitant la réalisation des test coronavirus. Seuls les patients hospitalisés qui répondaient à la qualification de cas suspectés et les prestataires de soins présentant de la fièvre et des symptômes suggestifs pouvaient être testés. En raison de la forte hausse du nombre de tests après les vacances de carnaval, la mis sur pied d’un réseau national de laboratoires pour tests du coronavirus s’est très rapidement imposé comme une nécessité. Dans ce contexte, la détection du virus SARS-Co-V-2 pour le diagnostic de COVID-19 par méthode rapide de RT-PCR SARS Co-V-2 a également pu être réalisée à partir du 12 mars,au laboratoire de l’AZ Groeninge, avec toutefois une capacité restreinte.

En raison de l’évolution constante de l’épidémiologie, les versions des procédures recommandées par Sciensano pour les hôpitaux lors de la prise en charge de patients avec un diagnostic établi ou une suspicion de COVID-19  n’ont cessé de se succéder à un rythme effréné. L’anamnèse de l’historique des voyages est très rapidement devenu de plus en plus complexe, car outre la Chine, il fallait également tenir compte de la Corée du Sud, de l’Iran, de Singapour, du Japon, de l’Italie (nombreuses régions (en particulier la Lombardie, l’Emilie-Romagne, la Vénétie et le Piémont) et du département de l’Oise en France, jusqu’à ce qu’à partir du 11 mars, l’historique de voyage ne soit plus considéré comme critère de risque et que à compter de cette date tout patient présentant une infection aiguë des voies respiratoires supérieures ou inférieures soit considéré comme un cas potentiel. Le 17 mars, le gouvernement décidait que seuls les décès liés au COVID-19 devaient encore être signalés au médecin inspecteurs en charge de la lutte contre les maladies infectieuses de « l’Agentschap Zorg en Gezondheid », submergé dans l’intervalle par le nombre de cas. Les patients n’étaient plus réorientés vers des hôpitaux de référence mais étaient pris en charge pour les soins requis dans les réseaux habituels. Soit dit en passant, ce n’est seulement qu’à partir de ce moment que les problèmes de pénuries d’approvisionnement d’équipements de protection individuelle et de dispositifs médicaux sont mentionnés dans les points de contacts. 

Le 13 mars, le premier patient atteint du COVID-19 était hospitalisé à l’AZ Groeninge, et une semaine plus tard, ils étaient déjà au nombre de 22. Une augmentation constante du nombre de patients COVID-19 a été observée, atteignant un nombre maximum de 106 patients le 6 avril, après quoi le nombre de patients admis a régulièrement et lentement diminué. Le 15 mars, une première procédure Sciensano pour la gestion de décès d’un patient atteint du COVID-19 était publiée. Ce n’est que quelques jours plus tard que le premier décès d’un patient atteint du COVID-19 est survenu à l’hôpital, et que cette directive allait devoir être mise en pratique par nos collaborateurs de la morgue. Le virus allait également fortement influencer le processus normal de décès et de deuil d’un défunt proche.

Le 18 mars 2020, le confinement « lockdown »est annoncé en Belgique et le plan d’urgence hospitalier (PUH) est déployé. Dans les 2 mois qui vont suivre, le plan interne d’urgence existant applicable en cas de flux entrant de patients contagieux a connu une mise en pratique inédite. Grâce à la mise en place d’une collaboration mutli-disciplinaire, une capacité d’accueil maximale de 52 lits de soins intensifs (SI) et de 180 lits non-SI a ainsi pu être créée (6 services de cohorte de 30 lits, dont un service de réserve qui n’a jamais dû être utilisé).  

L’établissement d’une nouvelle directive d’isolement en cas de COVID-19 présumé/confirmé, incluant l’usage correct des équipements de protection individuelle (EPI) a été le premier point d’attention de l’équipe hygiène hospitalière (EOHH). Les images parues dans les médias de prestataires de soins portant des vêtements de protection contre l’Ebola complets et illustrant des mesures de désinfection insensées comme la vaporisation dans les rues, les escalators et les lieux publics ont été contreproductives. Une politique .adaptée à la situation et basée sur des niveaux d’évidence a été appliquée, en tenant compte des voies de transmission de l’infection à SARS-CoV-2, du taux de reproduction de base (R0) et de la mortalité spécifique à cette maladie. Les directives du SPF Sciensano et les directives de l’OMS, de l’ECDC et des CDCs ont été suivies au maximum 2-8. Pour arrêter la transmission par voies gouttelettes-contact, ces directives préconisent l’utilisation de gants, d’un tablier, de lunettes de protection et « au minimum » de masques chirurgicaux 9-13.  La nécessité de recourir au port de masques FFP2/FFP3 étaient recommandées dans le cadre de procédures par aérosols (AGP) Cette formulation a fait que la majorité des hôpitaux ont choisi,
« en bon employeur », d’opter pour une protection maximale, c’est-à-dire par défaut un masque FFP2 et un masque FFP3 en cas de procédures génératrices d’aérosols. Ceci a eu pour effet d’accentuer encore la  pénurie déjà existante sur le marché. En conséquence, ces masques dans le monde n’étaient plus toujours disponibles en cas d’indication stricte, donnant lieu à un dilemme du point de vue éthique. La définition de procédure aérosolisante a également évolué au fil de l’épidémie, toutes les directives officielles (OMS, OHSA, CDC, ECDC, Sciensano) ne coïncidant pas entièrement et des imprécisions étant mises au jour. Depuis le 22 avril, Sciensano inclut dans les définition des procédures aérosolisantes les actes suivants: l’intubation endotrachéale; l’extubation; la ventilation manuelle avant l’intubation (sédation profonde, toujours risque de ventilation manuelle) ; la réanimation cardiopulmonaire ; la ventilation non invasive (incl. La ventilation en pression positive continue (CPAP), les systèmes de lunettes d’oxygénation à haut débit (optiflow),  l’oxygénation par voie nasale à haut débit (> 12 l), la trachéotomie et les soins de la canule d’orifice de la trachéotomie, la bronchoscopie, l’aspiration trachéo-bronchique à ciel ouvert,  l’administration d’un traitement par nébulisation; le retournement des patients en décubitus ventral ; la déconnexion du respirateur ; certaines procédures dentaires (par ex. le fraisage à haute vitesse). Avec l’apport des médecins spécialistes dans différentes disciplines, cette liste a été élargie aux procédures endoscopiques de gastro-entérologie, d’ORL et aux échographies transoesophagiennes. Bien que Sciensano ne considère pas le prélèvement d’un échantillon nasopharyngé en soi comme une procédure aérosolisante, d’autres sources les contredisent sur ce point14. Dans tous les cas, une incertitude continue de planer à ce jour sur de nombreuses procédures potentiellement aérosolisantes qui, dans le cadre du COVID-19 (ou d’autres virus respiratoires), pourraient représenter un risque pour les prestataires de soins, notamment parce qu’il n’existe encore que très peu de recherches et d’évidence en la matière15.

Des affiches d’isolement spécifiques, des fiches et des vidéos d’instruction concernant l’utilisation des EPI ont été réalisées rapidement. Diverses versions se sont succédées en fonction de la disponibilité des équipements de protection. Les combinaisons n’ont volontairement pas été utilisées, sauf en cas de procédures aérosolisantes aux SI ou dans les quartiers opératoires. Depuis les épidémies de virus Ebola, on sait que la phase de déshabillage et d’élimination de ces combinaisons de protection constitue une phase à risque. Ces tenues doivent en effet être enlevés dans le bon ordre, avec une désinfection des mains. L’expérience nous a appris que la bonne manière d’enlever une combinaison n’était pas simple, surtout parce que ces vêtements de protection ne faisaient pas partie du choix standard16. De même, il n’a pas été opté pour le port d’une double paire de gants ni pour une désinfection de la paire intérieure de gants à l’aide de gel hydroalcoolique17 pendant le changement de la paire externe de gants. 

Le choix d’une visière de protection à la place de lunettes de protection classiques s’est révélé être le bon. Les visières de protection protègent non seulement une plus grande partie du visage mais empêchent également l’utilisateur de se toucher le visage et offrent clairement un plus grand confort d’utilisation18.

 

 

 

L’aménagement d’unités de soins COVID-19 spécifiques a fait qu’un nouveau modèle de soins par cohorte, jusque-là inutilisé, est apparu concernant la division de l’unité en zones, ainsi que des conventions de travail spécifiques aux zones ainsi que sur l’usage efficace et ciblé d’EPI.

 

 

 

 

 

 

 

Garantir une politique de masques rationnelle et sûre a été un travail titanesque. En raison de la pénurie mondiale de masques, l’usage correct et normal de ces derniers a dû être adapté aux instructions d’utilisation « exceptionnelles » recommandées par le SPF RAG c’est-à-dire l’utilisation (sous condition) d’un même masque pendant 8 heures. Pour éviter un usage inapproprié, une gestion centrale a également été imposée. La crainte chez les collaborateurs les a conduits à se poser des questions sur les masques qui n’étaient pas indiqués pour leur type d’exposition. Le port d’une protection nasobuccale par des personnes saines à l’extérieur d’un contexte de soins a donné lieu à des discussions, tant en dehors de l’hôpital qu’en son sein, dans le cadre duquel, au début, l’avis de l’OMS et des virologues avait été suivi. Le 19 mars cependant, l’hôpital recommandait aux non-prestataires de soins de porter au quotidien un masque propre en tissu. Début avril, cette recommandation s’est muée en une obligation. Plus tard, les virologues, dans le cadre de la stratégie de déconfinement fédérale, préconiseront aussi le port d’un masque en complément à l’hygiène des mains et au respect de la distanciation sociale, sous le couvert de la philosophie « je te protège, tu me protèges ». Enfin, à partir du 30 avril, chaque patient hospitalisé était obligé de porter un masque dans certaines situations 19-23 . 

Le stock stratégique fédéral de masques FFP2 détruit en 2018 et son non-remplacement ont été maladroitement dissimulé par les autorités compétentes. Les premières nouvelles commandes de masques FFP2 par le gouvernement se sont avérés être un cuisant échec (Fallait-il en rire ou pleurer ?). Les masques commandés ne sont soit jamais arrivés ou ne répondaient pas aux normes de qualité requises. Par tatonnements, le problème serait résolu à l’aide d’une construction politique à la belge impliquant une pléthore de ministres.  

Les masques chirurgicaux/médicaux et les masques FFP2/FFP3 qui ne répondent pas aux normes européennes peuvent être utilisés à titre exceptionnel et temporaire moyennant la rérérence à une norme alternative en vigueur et un rapport d’analyse émanant d’un laboratoire accrédité. Dans la pratique, de nombreux faux certificats ou des attestations non valides ont circulé. Au final, c’était soit l’agence fédérale du médicament et des produits de santé (AFMPS), soit le service public fédéral Économie, PME, Classes moyennes et Énergie qui allait établir les conditions pour la livraison et la libération de masques chirurgicaux et masques FFP2/FFP324-26. 

Seuls des masques FFP2/FFP3 approuvés ont été utilisés à l’AZ Groeninge. De grandes quantités de masques FFP2 fournis par les pouvoirs publics et autres instances n’ont pas été utilisées, car il est apparu ensuite qu’ils étaient uniquement approuvés dans le cadre d’une procédure de bandage adhésif sur le nez (« tape nose procedure »). C’est-à-dire que la capacité filtrante est bonne, mais que le masque n’épouse pas assez la forme du nez et des joues. Pour y remédier, un ruban adhésif médical suffisamment large doit être appliqué sur le haut du masque pour le coller, ou il doit être fait appel à une bride de fixation supplémentaire (Materialise Mask Fitter®) : une opération fastidieuse qui en outre engendre des frais supplémentaires. L’AZ Groeninge n’a pas procédé à la restérilisation des masques FFP2/FFP3 utilisés. Ceci a été motivé tant par la diversité des modèles de masques FFP2 utilisés sur le terrain que par le manque de garanties qu’un masque restérilisé conserve encore son efficacité de filtration originale.

La combinaison entre une foule de questions posées par téléphone concernant le nouveau coronavirus, encore inconnu, l’ augmentation rapide du nombre de patients atteints du COVID-19 à l’hôpital, la pénurie de nombreux équipements de protection et la recherche d’alternatives de qualité ont été à l’origine de 3 semaines de travail chaotiques à partir de la mi-mars 2020. 

Des alternatives au gel hydroalcoolique habituel, aux masques FFP2, aux masques d’isolement, à la protection des yeux, aux blouses d’isolement, aux combinaisons, aux désinfectants de surface ont dû être recherchées. L’expertise relative aux exigences de qualité pour chacun de ces produits relève de l’équipe opérationnelle en hygiène hospitalière mais celle-ci est apparue clairement insuffisante au niveau du service des achats, ce dernier étant toujours tributaire de demandes de conseils qu’il n’obtenait pas assez rapidement. Souvent, les fournisseurs omettaient de fournir une fiche produit avec données techniques, et d’autres étaient tout simplement peu scrupuleux. Il est à déplorer que l’Europe n’ai pas pu coordonner la prise en charge de cette crise sanitaire…

Au fil du temps, des solutions créatives ont été imaginées. des gels désinfectants et des gels hydroalcooliques ont été  fabriqués localement à l’aide de matières premières fournies par des distilleries de liqueurs, mais conformes à la formulation de produit de l’OMS27, des combinaisons et vestes d’isolement ont été réalisés à partir de Flexothane®, des masques buccaux en textile ont été produits localement. Plusieurs gels hydroalcooliques commerciaux et inconnus qui avaient été achetés pendant la pénurie de marché ont provoqué une hausse des problèmes cutanés, ce qui fait que le service de dermatologie a, en collaboration avec nos spécialistes en soins des plaies, élaboré une procédure des soins de la peau dans le cadre de l’hygiène des mains.

Alors qu’à l’hôpital, une machine bien rodée a été mise en place dans la lutte contre le SARS-Cov-2, les maisons de repos et de soins sont restés trop (longtemps) en dehors du radar. Ce n’est que vers la fin du mois de mars 2020 que le gouvernement flamand a commencé à y remédier. L’AZ Groeninge a de différentes façons endossé sa responsabilité sociale dans la lutte contre le COVID-19 et a offert son aide/expertise aux maisons de repos et de soins et établissements pour personnes handicapées. Une assistance a été fournie à 7 maisons de repos et de soins, et 32 infirmiers au total ont été affectés à cette fin.

En marge de changements au niveau de la définition des cas pour le COVID-19, nous avons également vu la liste d’indications pour tests RT-PCR s’allonger, notamment par le que ce test n’était plus exclusivement un outil diagnostic mais est devenu également un instrument dans la maîtrise des risques complémentaire. Cette état de fait a dès lors entrainé une extension nécessaire de la capacité de testing, tant en intramuros qu’ en  extramuros, avec les défis que cela impliquait en termes de délai de réponse et d’obtention des résultats. Le 1er mai, une unité de dépistage du COVID-19 et une équipe de prélèvement mobile étaient opérationnelles. En complément au traçage des contacts mis en place par le gouvernement, à la mi-mai 2020, le service de médecine du travail Liantis a mis en place un processus de « track and trace » pour les collaborateurs positifs. Le nombre de collaborateurs hospitaliers testés positifs à ce jour est resté très limité. 

Quelle que soit l’évolution du nombre de patients COVID-19 dans le futur, un énorme travail a été accompli à l’AZ Groeninge, tant au niveau de l’adaptation des  infrastructures que dans la formation du  personnel et de l’’organisation générale, afin de pouvoir faire face au nombre de patients en évolution constante. L’esprit d’équipe omniprésent et l’excellente collaboration pluridisciplinaire et interdépartementale et sont été remarquables. C’était une certitude en temps d’incertitude. Mais le SARS-CoV-2 n’a à ce jour pas encore livré tous ses secrets.

Pendant la pandémie de COVID-19, l’équipe hygiène hospitalière (EOHH) a suivi toutes les étapes de la stratégie multimodale de l’OMS pour la prévention des infections, à savoir : « build it » (changement du système), « teach it»t (formation et éducation), « check it» (surveillance et feed-back), « tell it » (rappels et communication), « live it » (changement de culture) 28.

Le COVID-19 a fait que plusieurs mesures de prévention des infections horizontales existant depuis longtemps et annoncées par l’équipe hygiène hospitalière ont pu être mises en place de manière très explicite et ce tant au niveau du personnel hospitalier que du grand public. Le rôle des médias audio et visuels a constitué un relais de communication inédit dans la diffusion de ces recommandations. On aura rarement autant entendu et vu parler de recommandations relative à des pratiques telles l’hygiène des mains, l’ hygiène en cas de toux, l’importance d’éviter le plus possible toucher du visage, le lavage/désinfection fréquente le matériel, le fait de tirer la chasse des toilettes en gardant la planche fermée, la distanciation sociale (1,5 m) et le port correct du bon masque buccal pendant la saison des virus respiratoires, l’importance de rester chez soi et de pas aller à l’école ou au travail et encore moins se rendre à une visite à l’hôpital ou dans une maison de repos et de soins en cas de maladie. Espérons que la pratique de cette multitude de bonnes règles d’hygiène ne sera pas un acquis rapidement oublié dans l’ère post-COVID-19. 

6. Références

1. OMS, Pneumonie de cause inconnue – Chine, https://www.who.int/csr/don/05-january-2020-pneumonia-of-unkown-cause-china/fr//

2. Sciensano, Procédure pour les hôpitaux : prise en charge d’un patient possible ou confirmé de Covid19, https://covid19.sciensano.be/sites/default/files/Covid19/
COVID-19_procedure_hospitals_FR.pdf

3. ECDC, Infection prevention and control for the care of patients with 2019-nCoV in healthcare settings, ECDC technical report, february 2020, 4pp.

4. ECDC, Guidance for wearing and removing personal protective equipment in healthcare settings for the care of patiënts with suspected or confirmed COVID-19, ECDC technical report, February 2020, 13 pp.

5. ECDC, Infection prevention and control for COVID-19 in healthcare settings, ECDC technical report, march 2020, 10 pp.

6. OMS, Lutte anti-infectieuse lors de la prise en charge des patients chez lesquels on suspecte une infection par un nouveau coronavirus (nCoV), janvier 2020, 3 pp.

7. OMS, Lutte anti-infectieuse lors de la prise en charge des patients chez lesquels on suspecte une infection par un nouveau coronavirus (nCoV), mars 2020, 5 pp.

8. CDC, Interim guidance for Healthcare facilities: preparing for community transmission of COVID-19 in the United States, 11 march 2020.

9. Offeddu  (V.) et al., Effectiveness of masks and respirators against infections in healthcare workers: a sytematic review and meta-analysis, Clin Infect Dis 2017 Nov 13;65(11):1934-1942. doi: 10.1093/cid/cix681.

10. Radonovich (L.) et al., Effectiveness of N95 rspirators versus surgical masks against influenza: a systematic review and meta-analysis, JAMA, 2019 Sep 3;322(9):824-833. doi: 10.1001/jama.2019.11645.

11. Long (Y.) et al, N95 respirators versus medical masls for preventing influenza among healthcare personal: a randomized clinical trial, Journal of Evidence based medicine, 2020, 13(2):93-105.

12. Seto (W.H.) et al., Effectiveness of precautions against droplets and contact in prevention of nosocomial transmission of servere acute respiratory syndrome (SARS), Lancet, 2003, 361: 1519-1520.

13. Leung (N.H.) et al., Respiratory virus shedding in exhaled breath and efficacy of face maks, Nature Medicine, 2020, May;26(5):676-680. doi: 10.1038/s41591-020-0843-2. Epub 2020 Apr 3. 

14. Procédure interdisciplinaire prévention et contrôle de l’infection Prise en charge du patient suspect / atteint de la maladie COVID-19 (SARS-Cov-2) dans le contexte épidémique, HUG, 14 avril 2020,   https://vigigerme.hug-ge.ch/sites/vigigerme/files/documents/procedures/procedure_sarscov_deux.pdf

15. Harding (H.), Broom A., Broom (J.), Aerosol generating procedurs and infective risk to healthcare workers: SARS-CoV2 – the limits of the evidence, J Hosp Infect, 2020, Jun 1;S0195-6701(20)30277-2. doi: 10.1016/j.jhin.2020.05.037 

16. Aanbevelingen inzake handhygiëne tijdens de zorgverlening, HGR aanbeveling 9344, april 2018.

17. DuPontEurope, Donning and doffing Tyvek ® classic Xpert, https://www.youtube.com/watch?v=zLbvQcpfZyQ

18. Roberge (R.J.), Face shields for infection control: a review, Journal of Occupational and Environmental Hygiene, 216, vol.13, nr.4, p.23-242.

19. WHO, Advice on the use of masks in the community, during home care and in healthcare settings in the context of the novel coronavirus (2019-nCoV) outbreak, interim guidance 29 january 2020, 2pp.

20. MacIntyre (C.M.) et al., A cluster randomised trial of cloth masks compared with medical masks in healthcare workers, BMJ Open. 2015 Apr 22;5(4):e006577. doi: 10.1136/bmjopen-2014-006577.

21. WHO, Advice on the use of masks in the context of COVID-19, interim guidance, 5 june 2020, 19pp.

22. Greenhalgh (T.) et al., Face masks for the public during the COVID-19 crisis, BMJ, 2020 Apr 9;369:m1435. doi: 10.1136/bmj.m1435.

23. Klompas (M.- et al., Universal masking in hospitals in the COVID 19 era, N Engl J Med. 2020 May 21;382(21):e63. doi: 10.1056/NEJMp2006372. Epub 2020 Apr 1.

24. Conditions à remplir pour permettre la libération des masques buccaux FFP2 et FFP3, Service public fédéral Économie, PME, Classes moyennes et Énergie, 26 mars 2020.

25. Conditions à remplir pour la fourniture et libération de masques chirurgicaux, Agence fédérale des médicaments et des produits de santé, 28 mars 2020 (mise à jour 30 mars 2020) https://www.afmps.be/sites/default/files/content/info_offres_masques_chirurgicaux_1.pdf

26. Coronavirus : masques sans marquage CE – Alternative Test Protocol (ATP), https://economie.fgov.be/fr/themes/entreprises/coronavirus/masques-et-equipements-de/conformite-des-masques/coronavirus-masques-sans

27. WHO, Guide to local production: WHO recommended handrub formulations, april 2010, 9pp, https://www.who.int/gpsc/5may/Guide_to_Local_Production.pdf?ua=1

28. WHO, WHO multimodal improvement strategy (MMIS), https://www.who.int/infection-prevention/publications/ipc-cc-mis.pdf?ua=1

Simple et complexe : le défi de l’hygiène des mains dans les hôpitaux du Bénin.

Introduction

Les infections associées aux soins (IAS) constituent un problème majeur de santé publique dans le monde et particulièrement dans les pays en voie de développement où les infrastructures sont souvent limitées. Ces IAS entrainent entre autres, un allongement du séjour hospitalier, une augmentation de la mortalité et la morbidité et évidemment des coûts financiers additionnels aux patients et à l’hôpital (1). 

Au cours des soins, les mains des praticiens constituent le vecteur principal de transmission de ces IAS. Les micro-organismes sont véhiculés facilement d’un patient vers un autre lorsque l’hygiène des mains n’est pas correctement réalisée. Celle-ci inclut le lavage à l’eau et au savon et la friction hydroalcoolique qui est même plus efficace, plus simple et ne nécessite pas, surtout dans notre contexte, de grandes infrastructures pour sa réalisation. Selon les données de l’Organisation Mondiale de la Santé, la compliance à l’hygiène des mains varie entre services, entre catégories socio-professionnelles et même selon les conditions de travail d’un hôpital à un autre et dépasse rarement 50%.(2) De nombreux facteurs peuvent influencer l’adhésion à une bonne pratique de l’hygiène des mains. Il s’agit par exemple, du manque de ressources et d’infrastructures appropriées, certaines situations comme le port de gants et des catégories professionnelles telles que les médecins décrits comme étant les moins compliants. 

L’hygiène des mains constitue la pierre angulaire des stratégies de lutte contre les IAS (2). C’est fort de cette évidence, que nous avons réalisé « mes cinq moments de l’hygiène des mains » à l’aide de la grille d’évaluation de l’OMS, dans six hôpitaux du pays. Cet article fait un état des lieux et décrit les diverses stratégies mises en œuvre pour améliorer l’observance des soignants.

Compliance, déterminants et points des infrastructures

Malgré les biais et l’effet « Hawthorne », l’observation directe est le gold standard pour le monitoring de l’hygiène des mains. Dans six hôpitaux publics et dans les services de chirurgie et de gynécologie nous avons observé les soignants pendant les soins durant huit semaines. Qu’il s’agisse des salles de pansement, d’hospitalisation, de consultation ou au bloc opératoire, tout soignant était observé. La grille de L’OMS a permis de calculer la compliance. Nous avons recueilli aussi des informations concernant les prérequis à une bonne hygiène des mains (Ongles, Cheveux, bracelets…) et les infrastructures.

Pendant 60 jours, 432 acteurs de soins ont été observés. Les infirmiers et aides- infirmiers représentaient la catégorie la plus représentée (4). La compliance était de 33,3% et elle variait selon le service. Comme dans beaucoup d’études l’attitude d’autoprotection des soignants était assez marquée.et se traduisait par une compliance plus élevée pour toutes les opportunités intervenant après contact avec des patients (37,5% après avoir touché les patients et 54,5% après exposition à un liquide biologique) comparativement à celles se situant avant un contact avec un patient (25.2%) ou avant un geste aseptique (33%) (cf. Tableau 1). 

Tableau 1 :  Tableau présentant la compliance des acteurs de soins au Benin, audit 2018.

La friction des mains au moyen d’une solution hydro-alcoolique (SHA) est aujourd’hui le standard de qualité des pratiques d’hygiène des mains. Elle doit être privilégiée dans toutes les situations, si les mains ne sont pas souillées par des sécrétions, du sang ou tout autre liquide biologique.  L’utilisation de solutions hydro-alcooliques n’est pas encore dans les habitudes de soins. Parmi les 438 actions d’hygiène réalisées, seulement 27,9% étaient consacrées à la friction. Dans la très grande majorité des cas où l’observance était respectée, la durée et la technique n’étaient pas correctes. En effet, seulement 6% des acteurs de soins respectaient les trente secondes de la friction hydroalcoolique tandis qu’aucun d’entre eux ne respectait la durée des 60 secondes du lavage au savon. Il est cependant bien connu que le temps de contact constitue un paramètre d’importance majeure pour assurer une efficacité optimale. En effet, compte tenu de la dynamique de colonisation bactérienne des mains, seule l’application d’un agent antiseptique rapidement  disponible, constitue une alternative compatible avec l’enchainement des processus de soins (3).

Beaucoup reste à faire également en ce qui concerne les prérequis de l’hygiène des mains. Environ un quart des soignants portaient des bijoux 77% des soignants n’avaient pas de bijoux . >90% des soignants avaient des cheveux courts et/ ou attachés pendant les soins. Concernant les ongles, 91% avaient des ongles courts sans vernis, 7.2% des ongles courts avec du vernis et 1.8% portaient de faux ongles.  

Grace à la grille d’infrastructures de l’OMS, nous avons fait le tour des hôpitaux à la fin de chaque mois pour collecter les différentes infrastructures disponibles. Cette grille est constituée de 28 questions et nous présentons dans le tableau 2 le récapitulatif des items clé.

Les infrastructures existantes dans les hôpitaux sont souvent mal situées dans les lieux de soins. Un lave-main bien loin des salles de consultation. L’alcool existant une semaine sur trois et une absence dans certains hôpitaux de « reminders ». 

Tableau 2 : Récapitulatif des infrastructures et ressources disponibles dans les hôpitaux du Bénin, 2018.

Légende : Les trois couleurs utilisées rappelant les feux tricolores signifient : 

Rouge = absence totale d’infrastructure
Orange = Intermittence disponibilité par moments (Nécessité d’amélioration)
Vert = infrastructure disponible chaque fois. 

Les défis des prochaines années 

• Primo, il s’agira de préparer et d’apprendre à préparer la solution hydro-alcoolique dans les hôpitaux pour au moins faciliter l’usage fréquent pendant des soins.

• Secundo, nous formerons les infirmiers et les membres des CLIN (Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales) sur la technique et l’importance de l’hygiène dans la réduction des IAS. En effet les CLIN existent dans tous ces hôpitaux mais ils n’ont pas toujours un plan d’action annuel validé et exécuté.  

• Tertio, nous allons réaliser et implémenter différents supports (affiches, poster, flyers). Les acteurs de soins des hôpitaux aideront à vulgariser les affiches dans les salles de pansement et d’hospitalisation. 

• Quarto, il nous faut mettre le patient et les visiteurs au cœur de l’hygiène des mains. Certains l’ont fait avec succès(5). De petites pancartes avec des émoticônes placées dans les couloirs de l’hôpital par des patients avec des phrases incitatives telles que : « N’oubliez pas de vous laver les mains», « Êtes-vous sûrs que vos gants sont propres ? », « Lavez-vos mains, protégez-nous ». Enfin les divers services et le ministère de la santé seront totalement impliqués dans ces divers processus pour nous aider à relever le défi « Clean your hands save lives » au Bénin. 

Bibliographie 

1. Allegranzi B, Pittet D. Role of hand hygiene in healthcare-associated infection prevention. Journal of Hospital Infection. 2009;73(4):305-15.

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