Questions pratiques concernant la prévention des infections lors des soins dispensés à domicile.
Il existe peu de directives récentes et largement diffusées sur la prévention des infections dans les soins dispensés à domicile. Nous sommes contraints de nous baser sur les principes généraux de la prévention des infections ou sur des directives concernant d’autres cadres que nous transposons alors à la situation du domicile. Plusieurs groupes de travail se penchent sur la spécificité de la prévention des infections lors des soins au domicile mais un consensus ne semble pas se dégager. L’organisation d’études est nécessaire pour élaborer des directives rigoureuses. Pour l’instant, les directives de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), du groupe de travail hollandais sur la prévention des infections (WIP), du Conseil Supérieur de la Santé (Hoge Gezondheidsraad), du «Center for Disease Control and Prevention» et de la «Nederlandse Landelijke Coördinatie Infectieziektenbestrijding» sont utilisées.
Cet article propose des conseils pratiques pour la mise en place des principes de la prévention des infections dans le contexte des soins à domicile.
Le domicile, vraiment un cadre différent ?
L’hôpital est défini comme un environnement «contrôlé». Les médicaments sont administrés à intervalles fixes, vous soignez des plaies , vous discutez des résultats avec votre patient, etc… Le patient reste la majeure partie du temps dans sa chambre ou sur son lit. Au domicile, la situation est différente, le patient bénéficie d’une liberté de mouvement totale en dehors de la prestation de soins. Il interagit avec son environnement et le monde extérieur. Dans un hôpital, la continuité des soins est assurée toute la journée, contrairement aux soins à domicile Le patient qui bénéficie de soins à domicile doit être un partenaire à part entière pour la réussite du traitement.
La formation aux actes infirmiers à l’hôpital repose sur la disponibilité de matériel conçu pour la réalisation de soins, contrairement aux soins à domicile où le mobilier du patient doit être utilisé, de même qu’un environnement pas toujours adapté à la réalisation de ces soins. Un dialogue avec le patient est essentiel à cet égard et son consentement est requis étant donné qu’il s’agit de son environnement de vie. Il est évident qu’un infirmier à domicile doit faire preuve de flexibilité dans cet environnement et travailler avec les éléments à sa disposition.
L’hygiène des mains chez le patient, à son domicile?
Lors de soins à un patient, on doit bien entendu toujours respecter les cinq moments de l’hygiène des mains (OMS) et les précautions standard. Ces principes ont en effet été établis pour tous les prestataires de soins, dans toutes les situations et avec tous les patients. Même si la situation de soins change, ces principes restent d’application. Les traduire correctement constitue un défi de taille.
Que peut-on entendre par « hygiène des mains avant le contact avec le patient » ? S’agit-il aussi bien des contacts de soins que des contacts sociaux, ou une distinction est-elle établie à cet égard, comme c’est le cas dans un cadre psychiatrique ? Dans le cadre des soins à domicile, d’aucuns disent qu’il ne faut pas appliquer à la lettre l’hygiène des mains lors de chaque contact avec le patient, comme lors de sa simple salutation. Cela implique cependant qu’une hygiène des mains correcte doit être respectée lorsque nécessaire. En tant qu’infirmier, il est dès lors important de se désinfecter les mains à son arrivée chez un patient, car la probabilité qu’aucun soin ne soit ensuite administré est très réduite. Et quand appliquer l’hygiène des mains « après un contact avec l’environnement du patient » ? Dans un hôpital, il s’agit de l’environnement immédiat du patient, comme le lit, la tablette de nuit et la perfusion du patient. En est-il de même à domicile ? Qu’en est-il de l’ensemble du foyer du patient avec lequel nous pouvons entrer en contact ? Selon une approche pragmatique, il s’agit également des surfaces avec lesquelles le patient entre régulièrement en contact, comme les clenches de porte, le téléphone, le lit, la tablette de nuit, etc.
Les mains lavées sont séchées à l’aide d’une serviette propre ou d’un essuie-tout. La préférence est accordée à l’essuie-tout, étant donné qu’il est impossible de s’assurer de la propreté de la serviette. La collaboration du patient est nécessaire pour avoir de l’essuie-tout à disposition.
Animaux domestiques et fourniture de soins infirmiers?
Une caractéristique spécifique des soins à domicile est la présence éventuelle d’animaux domestiques qui peuvent empêcher le bon déroulement des soins. Les patients avec animaux domestiques devant faire l’objet de soins infirmiers sont invités à mettre les animaux domestiques dans une autre pièce pendant les soins. Ce n’est pas toujours le cas, raison pour laquelle l’infirmier à domicile doit se concerter avec le patient et clairement lui faire comprendre qu’un animal domestique constitue un obstacle à des soins infirmiers de qualité.
Vêtements de protection et utilisation du tablier?
En ce qui concerne également l’utilisation du tablier, il n’existe aucune directive sur laquelle on peut se reposer. Des experts du groupe de travail sur la prévention des infections dans les soins à domicile de la NVKVV appliquent une distinction entre 3 types de vêtements.
Les vêtements personnels sont la propriété de l’infirmier, sont portés sous les vêtements de service et suffisent lors de la fourniture de soins dans le cadre desquels il n’y a aucun risque de contact physique ou de contamination avec du sang ou des liquides biologiques. Songez à la mesure de paramètres, à un contrôle de glycémie, à la conduite en voiture vers un autre patient ou à une discussion à propos de patients.
Les vêtements de service (généralement un tablier de soins blanc) protègent les infirmiers et leurs vêtements personnels contre le patient et les souillures survenant pendant les activités. L’utilisation de ce tablier est recommandée dans des situations induisant un potentiel contact physique avec le patient mais aucun risque de contact avec du sang, des liquides biologiques ou des agents pathogènes pendant l’exercice des soins dans des circonstances normales. Il peut par exemple s’agir de soins d’hygiène, d’une prise de sang ou d’habiller et de déshabiller un patient sans matériel d’incontinence. Après les soins au patient, ce tablier est retiré et soigneusement rangé dans un sac.
Pour terminer, le tablier à usage unique est utilisé en cas de risque de contamination ne pouvant être limité. C’est le cas dans des situations de soins impliquant un contact physique et un risque réel de contact avec du sang, des liquides biologiques ou des agents pathogènes, par exemple dans le cadre de soins à un patient gravement incontinent ou de l’administration ou du retrait de substances toxiques (par ex. cytostatiques). On y retrouve également les soins aux patients souffrant d’une maladie infectieuse transmissible.
Déchets médicaux
Les infirmiers à domicile doivent respecter les dispositions légales en matière de gestion des déchets. Lors de l’exécution d’un acte médical, l’on devient également producteur de déchets. Et en tant que producteur de déchets médicaux, il convient de se charger de leur gestion. Parmi les principales différences entre un cadre domestique et un cadre hospitalier, citons le fait que l’infirmier doit se charger lui-même de l’enlèvement de certains déchets. Si l’infirmier travaille pour une organisation de soins infirmiers, un service logistique viendra régulièrement enlever les déchets au bureau , tandis qu’un indépendant devra lui-même les déposer au parc à conteneurs.
La directive OVAM (Openbare Vlaamse Afvalstoffenmaatschappij) établit également, dans le milieu domestique, une distinction entre RMA (déchets médicaux dangereux) et NRMA (déchets médicaux non dangereux). Les RMA peuvent de manière globale être mis au rebut dans un conteneur spécialement conçu à cette fin, comme un conteneur à aiguilles, une boîte en carton avec sachet ou un fût en plastique. Les NRMA n’impliquent aucun risque particulier pour l’environnement ou la santé. Ces déchets peuvent être mis au rebut avec les déchets ménagers du patient. Dans certains cas, il est tout de même question de déchets à risque, comme dans le cas des patients traités avec des médicaments anticancéreux ou soumis à des rayons.
Si les patients ou aidants proches dans l’environnement domestique exécutent ou administrent eux-mêmes certains soins, ils sont tenus de se charger eux-mêmes des déchets. Il s’agit alors de déchets ménagers de nature médicale (aiguilles, compresses, matériel de désinfection, etc…). Leurs collecte et traitement relèvent de la responsabilité des administrations locales. Nombre de ces déchets peuvent être mis au rebut avec les déchets ménagers, mais une partie relève des petits déchets dangereux (PDD).
Matériel de soins
Il n’est pas toujours évident de savoir qui fournit quel matériel pendant la prestation de soins. En général, l’employeur ou l’infirmier à domicile indépendant doit prévoir du matériel de base afin d’assurer un travail de manière sûre et responsable:
produits de désinfection des mains, gants, lingettes désinfectantes, kit de soin de blessures, mais aussi tablier de soin, sur-blouse à usage unique, etc. Un infirmier à domicile doit souvent réfléchir à ne pas gaspiller le matériel de soin acheté par le patient, étant donné que les frais auxquels ce dernier est confronté peuvent parfois être très élevés. déchets dangereux (PDD).
Comment disposer d’instruments propres?
Le nettoyage, la désinfection et la stérilisation d’instruments dans le cadre de soins à domicile se font également différemment que dans le cadre hospitalier. Alors qu’un hôpital dispose par exemple de procédures écrites et que les possibilités organisationnelles sont légions, il est fait appel à beaucoup plus de matériel à usage unique dans le cadre des soins à domicile. Il est en effet particulièrement ardu de transporter en toute sécurité le matériel usagé. Les infirmiers ne retournent pas quotidiennement dans leur bureau , raison pour laquelle le matériel doit être conservé dans le coffre de la voiture. Si une boîte ou un conteneur venait à s’ouvrir dans la voiture, l’infirmier pourrait se blesser en contact avec ce matériel (parfois tranchant). Si un infirmier effectue sa tournée en ville à l’aide d’un vélo, la situation est encore plus ardue sur le plan organisationnel. Il est difficile d’établir une distinction entre matériel propre et usagé dans la mallette de soins fixée au porte-bagages.
Votre téléphone, votre sac et votre porte-clés sont-ils exempts de bactéries (ces objets ne seront jamais totalement exempts de bactéries et donc stériles) ?
Le respect d’une bonne hygiène des mains est la principale mesure de prévention à adopter pour ne pas contaminer ce matériel. Ce qui signifie qu’il convient de se désinfecter les mains en quittant le patient et avant de prendre son téléphone ou ses clés. Gardez le matériel dont vous n’avez pas besoin à l’écart lors de la fourniture de soins. Vous pouvez laisser votre téléphone et vos clés dans votre sac jusqu’à votre départ de chez le patient. Si vous devez appeler un collègue, cherchez alors des gants et désinfectez-vous les mains.
En nettoyant ce matériel à l’aide d’une lingette désinfectante à la fin de la journée de travail, vous le protégerez au maximum contre les bactéries. Il n’existe donc aucune règle. Ces procédures doivent dès lors être établies en interne. Il peut par exemple être décidé de nettoyer chaque semaine ou chaque mois la mallette de soins et lors de chaque constatation visuelle d’une souillure.
Comment éviter les infections des voies urinaires en présence d’un cathéter à demeure ?
La principale mesure de prévention des infections des voies urinaires dans le cadre des soins à domicile est la bonne indication de la cathétérisation. Ce n’est pas un acte qui se pratique sur ordre médical. Il ne faut cathétériser qu’en présence d’une indication spécifique formelle et ne pas laisser le cathéter en place plus longtemps que nécessaire. Un cathéter à demeure ne peut être utilisé qu’en dernier recours, une fois toutes les solutions alternatives essayées, telles que : l’utilisation d’un aidant proche, exercices de miction, cathétérisme intermittent, etc. Des vidanges de la vessie en vue de prévenir les infections, le changement régulier du collecteur, une désinfection supplémentaire du méat, Les recommandations concernant la gestion du cathéter urinaire sont identiques à celles de l’hôpital.
Comment travailler de manière hygiénique avec des gants pour mettre des bas de contention ?
Certains infirmiers utilisent volontiers des gants en caoutchouc pour mettre ou retirer des bas de contention chez des patients. Les gants doivent ici rester liés au patient, pour éviter toute diffusion des germes. D’autre part, les infirmiers doivent également appliquer une hygiène des mains correcte afin de ne pas contaminer l’intérieur des gants.
Comment réduire les contaminations croisées en cas de soins à des porteurs de bactéries multi-résistantes aux antibiotiques (MDRO) et quand prendre des précautions supplémentaires ?
Pour les patients porteurs de MDRO des précautions additionnelles sont à adopter, comme le port d’un masque, de gants et d’un tablier à usage unique. Sur le plan organisationnel, les soins à ces patients constituent un défi de taille. Il est recommandé de s’occuper de ce patient à la fin de la tournée, ce qui n’est pas toujours possible dans le cadre des soins à domicile. L’infirmier doit prendre un minimum de matériel à l’intérieur avec lui, afin de réduire la quantité de matériel pouvant être contaminé. Téléphone et tablette doivent être traités à l’aide d’une lingette nettoyante et désinfectante après les soins. Une bonne communication avec les autres membres du ménage, les aidants proches ou les autres visiteurs du patient est essentielle pour limiter la transmission du germe.
Références :
• Conseil supérieur de la Santé, Recommandations en matière de maîtrise des infections lors de soins dispensés en dehors des établissements de soins (au domicile et/ou au sein d’un cabinet) (décembre 2008) (CSS 8279)
• Conseil supérieur de la Santé, Recommandations en matière de prévention, maîtrise et prise en charge des infections urinaires au cours des soins (CSS 8889) (Juillet 2017)
• Conseil supérieur de la Santé, Recommandations en matière d’hygiène des mains durant les soins (version 2018) (CSS 9344)
• World Health Organization, Hand Hygiene in Outpatient and Home-based Care and Long-term Care Facilities, Genève, 2012.
• LCI, BRMO bijzondere resistente micro-organismen in het bijzonder CPE, mars 2014. https://lci.rivm.nl/richtlijnen/brmo
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