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Prévention des infections urinaires nosocomiales liées au sondage vésical à demeure dans les services de soins intensifs et de gériatrie dans un hôpital public bruxellois : audits de processus, connaissances du personnel et perspectives d’amélioration

Samir Habib et Zohra Azmani - infirmiers en prévention et contrôle des infections, Hôpitaux Iris Sud

Introduction

La prévalence des infections des voies urinaires (IVU) associées aux soins est une préoccupation majeure de Santé Publique. Elles occupent la deuxième place après les infections respiratoires et représentent environ 21% de l’ensemble des infections nosocomiales en Belgique (ECDC –PPS, 2017). Ces infections sont majoritairement causées par des entérobactéries « natives » de la flore digestive du patient. Elles sont en effet responsables dans 60 % des cas des infections nosocomiales des voies urinaires liées au sondage vésical (source endogène). 

Dans sa publication en 2017, le Conseil Supérieur de la Santé (CSS, avis N° 8889), rapporte que près de 70-80 % de l’ensemble des IVU en milieu hospitalier sont associées à l’usage d’un cathéter urinaire. Il note également que 21 à 38 % des indications de cathétérisme urinaire sont inappropriées et que 31 à 47 % de ces cathéters ont une durée de placement excessive.

Les infections urinaires peuvent entraîner des complications sévères pour le patient telles que pyélonéphrite ou prostatite (Ben Arab et al. 2007) ainsi qu’une évolution vers l’insuffisance rénale chronique (Page et Espinassea, 2010). Elles sont également responsables de 4 à 20 % de l’ensemble des septicémies en milieu hospitalier (Schmitz et al. 2017, Hammami et Lambert, 2014,) et seraient à l’origine de 5 à 13% de la mortalité attribuable (Salmasian et al. 2019, Bindu et al. 2020, Arcens et al. 2018). 

Outre les conséquences individuelles, les infections urinaires nosocomiales (IUN) liées au sondage vésical peuvent avoir des conséquences importantes au niveau collectif. Elles constituent un véritable réservoir intra-hospitalier de bactéries fréquemment multi- résistantes aux antibiotiques, et peuvent être à l’origine d’infections croisées (Gardner et Mitchell, 2017). De plus, la multi-résistance aux antibiotiques souvent associée aux bactéries responsables d’IUN complique le traitement des patients. 

Les IUN ont également un impact économique considérable. Le Centre Fédéral d’Expertise des soins de santé (KCE, 2008), évalue les coûts annuels des IUN pour l’assurance maladie en Belgique à près de 80 millions d’euros. Cette dépense supplémentaire est liée à une prolongation de la durée d’hospitalisation de 6,7 jours en moyenne par infection et 167.000 jours d’hospitalisation supplémentaires par an (Vrijens et al. 2009). 

Cet article a pour base un travail de fin d’étude (voir bibliographie du TFE en annexe) réalisé dans le cadre du plan d’action annuel 2022 de l’équipe de prévention et contrôle des infections (PCI), plus particulièrement dans les unités de gériatrie et de soins intensifs, des 3 sites des Hôpitaux Iris-Sud. Avec l’apparition du COVID-19 en 2020, la priorité du service PCI a été accordée à la gestion des différents aspects de la pandémie (surveillance, gestion de clusters, formations…) et certains aspects relatifs à la prévention des infections associées aux soins (IAS) ont été suspendus. Le choix de ces unités est basé sur l’analyse des données fournies par notre laboratoire en termes de prévalence d’IUN au sein de ces unités (figure 1), prenant en considération d’autres facteurs de risque d’infections tels que l’âge des patients, la durée de séjour, la présence de comorbidités et la multiplicité des actes techniques et des intervenants. 

Figure 1 : Données liées aux unités d’hospitalisation

 

 

 

 

Nos objectifs principaux consistent d’une part, à tester les connaissances des infirmières sur les mesures préventives liées au sondage vésical à demeure dans trois situations : avant, pendant et après la pose du cathéter, et d’autre part à évaluer leurs pratiques professionnelles auprès des patients ayant ce type de sondage. 

Trois aspects ont été étudiés :

1.Quelle est la prévalence des infections urinaires sur sonde vésicale (IUSV) au sein de notre hôpital dans les
années précédentes (2020 et 2021) et quelles sont les unités les plus concernées ?  

2.Le personnel soignant infirmier applique-t-il les mesures préventives décrites dans notre procédure interne auprès des patients nécessitant un sondage vésical à demeure ?

3.Le personnel soignant infirmier possède-t-il les connaissances nécessaires pour la prévention des infections urinaires nosocomiales (IUN) ? 

Méthodologie

Des audits de processus auprès des patients (observation des patients à l’aide d’une grille d’audit) et l’analyse du dossier patient informatisé (DPI), ainsi qu’une étude rétrospective des résultats d’analyse microbiologique du laboratoire et un questionnaire d’évaluation des connaissances ont été réalisés auprès des infirmières travaillant en gériatrie et aux soins intensifs. Un outil de recherche a été élaboré pour chacune des questions.

• Pour évaluer la prévalence et la distribution des IUSV au sein de l’hôpital, nous avons réalisé une étude rétrospective en se servant des résultats enregistrés dans la base de données du laboratoire de microbiologie des hôpitaux HIS.

• Pour évaluer la compliance (et les compétences) des soignants aux recommandations, nous avons réalisé des audits de processus. Remplacer ce qui est surligné en jaune par ceci : Une grille d’audit basée sur notre procédure interne a été créée. Celle-ci analyse de manière multimodale un ensemble de 3 à 5 pratiques de soins (care bundles) basée sur des observations effectuées simultanément et de façon continue) 

Figure 2 : Care bundles pour le cathétérisme urinaire à demeure 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Au total 17 éléments d’observation peuvent être regroupés en 4 grands thèmes, il s’agit de données liées : à la pose (lieu et indication), à la durée de sondage (en jours), à l’utilisation de matériel adéquat (type de sonde utilisé, sac, tubulure et robinet de vidange), au dossier patient informatisé (diurèse de 24H, suivi de la diurèse par horaire et programmation du retrait).

• Pour l’évaluation des connaissances théoriques d’un acte de soin technique, nous avons réalisé un questionnaire fermé anonyme proposé en ligne (Google Forms®). Cet outil court et facile à compléter permet de cibler un large panel de répondants et d’analyser de manière standardisée les données (extraction des réponses en format Excel®). Les questions ont été extraites de l’enquête menée par la BAPCOC en 2018 auprès des établissements de soins de santé. Elles sont formulées comme un ensemble d’affirmations pour lesquelles il est demandé d’indiquer si celles-ci sont vraies, fausses ou inconnues.

L’évaluation ciblait exclusivement les infirmier(e)s des deux services retenus (soins intensifs, gériatrie). L’échantillon patient observé via l’audit est ciblé sur les patients ayant une sonde vésicale à demeure dans les trois unités des soins intensifs (20 lits agréés) et dans les quatre unités de gériatrie (96 lits agréés). Les facteurs pris en considération étaient : l’âge, la présence de comorbidité, la multiplicité des actes techniques et des intervenants, la durée de séjour. 

Le questionnaire a été envoyé après la réalisation des audits. Une durée de 15 jours a été fixée pour la récolte des réponses. Au total, 75 infirmières ont été sollicitées. La participation était anonyme et le traitement des données a été réalisé de manière confidentielle, cette démarche étant réalisée dans une optique d’amélioration.

Cette étude a pu être réalisée en quelques mois : 

 • 1 au 15 juillet 2022: réalisation des audits ;
• 15 au 31 juillet 2022: distribution du questionnaire et écolte des réponses ;
• août 2022 : première analyse des résultats et rédaction de la partie pratique ;
• septembre 2022: discussions, conclusions et clôture.

Résultats

A. Prévalence et distribution des IUSV dans l’hôpital

Nous avons réalisé une étude rétrospective en utilisant des résultats enregistrés dans la base de données du laboratoire de microbiologie des hôpitaux HIS.
Les données démographiques et biologiques enregistrées étaient: le sexe, l’âge, la date d’admission, la présence d’une culture d’urine positive, la nature du(des) germe(s)sélectionné(s).

Figure 3 : Données démographiques des patients

 

 

 

 Dans les années 2020 et 2021, les IUN semblent affecter plus les femmes (61.5% = moyenne en 2 ans) que les hommes (38.5%). Le sexe -ratio Femme/Homme est de l’ordre de 2 en 2021. Le taux de ces infections est nettement plus élevé après 65 ans. Il est de l’ordre de ±90%.

Figure 4 : Données liées aux journées d’hospitalisation

 

 

 

Nous constatons que dans plus de 75% des cas, les IUN surviennent après 6 jours d’hospitalisation, tandis qu’un quart de ces infections surviennent entre 48h et 6 jours d’hospitalisation. Malheureusement, nous ne possédons pas les données nécessaires pour savoir si les patients étaient porteurs d’une sonde vésicale à demeure (SVD) lors de l’admission ou pas. La Figure 5 montre que les entérobactéries de la flore digestive sont prédominantes et que E. coli est largement le premier germe responsable d’IUN en 2020 et en 2021. En ce qui concerne les autres bactéries, on note une augmentation du nombre de Pseudomonas aeruginosa, de Proteus mirabilis et d’Enterococcus faecium en 2021 tandis que le nombre d’isolats de Klebsiella pneumoniae reste stable sur les deux années. 

Figure 5 : Données de microbiologie

 

 

 

 

 

B. Les audits

Pour la grille d’audit des patients, nous avons regroupé les différents items repris dans le dossier patient informatisé (DPI) en 4 grandes catégories (figure 2 Care bundles)  en fonction des données relatives: à la pose de la  SVD  (lieu et indication), à la durée de sondage (en jours), au matériel (type de sonde utilisé sac, tubulure et robinet de vidange), au dossier patient informatisé (diurèse de 24 h, suivi de la diurèse par horaire et programmation du retrait).  Ces audits ont été réalisés en deux temps : la prise d’informations dans le dossier patient informatisé (DPI) et en deuxième temps les observations effectives. Les audits ont aussi été réalisés simultanément par 2 observateurs, ce qui a permis d’avoir chaque fois deux regards différents sur la problématique. 24 opportunités ont ainsi pu être observées : 14 en gériatrie et 10 en soins intensifs.

Les données qui nous intéressent particulièrement le plus dans le DPI sont surtout celles liées à la surveillance de la diurèse.

Figure 6 : Surveillance de la diurèse

 

 

 

 

 

La surveillance consiste à vérifier l’absence d’obstacles à la circulation des urines (pour empêcher leur retour vers la vessie) et à assurer une hydratation correcte du patient sauf s’il existe une contre-indication à cela. Quant au retrait de la sonde, un contrôle quotidien de la nécessité du maintien du cathéter doit être notifié dans le dossier du patient. En dépit de l’excellent suivi horaire de la SVD indiqué dans le DPI dans 100% des cas dans les deux unités, l’estimation du volume de la diurèse totale était en revanche incorrecte dans 64%  (9/14) en gériatrie et dans 40% (4/10) des cas aux soins intensifs. 

En effet, dans le rapport journalier médical des 24 dossiers consultés seule la présence d’une SVD était indiquée tandis que l’évaluation quotidienne de la nécessité de garder la sonde ou au moins une estimation de sa date de retrait n’a été mentionnée dans aucun dossier.

La fréquence (ou proportion des patients) avec pose d’une SVD est différente dans les 2 services
Les indications de placement d’une SVD sont  différentes dans les 2 services
– En gériatrie : rétention urinaire
– En USI : surveillance des bilans hydriques/ioniques (in / out)

Figure 7 : Lieu de pose

 

 

 

 

 

Plus de la moitié des SVD (54% ; 13/24) sont placées aux soins intensifs et en gériatrie avec respectivement 60% (6/10) et 50% (7/14). A l’analyse des données récoltées, il s’avère qu’une seule sonde sur les 11 (9%) a été mise en salle d’opération, 2 patients sur 11 (18%) avaient une sonde à leur admission et que les autres SVD (72.7% ; 8/11) ont été placées aux urgences. Ces constatations sont importantes dans un programme de prévention qui vise à réduire les infections associées au SVD et ce depuis leur mise en place jusqu’à leur retrait. Cela montre qu’en gériatrie, 57% (8/14) des patients bénéficiant d’une SVD ont une infection urinaire. 

Figure 8 : Incontinence et indication de pose

 

 

 

 

 

 

 

Comparativement, l’ensemble des 10 patients analysés aux USI étaient continents avant la pose du cathéter. Comment peut-on expliquer ce phénomène surtout que l’incontinence ne constitue pas une indication de pose sauf dans le cadre des plaies ouvertes au niveau du sacrum ou du périnée afin de favoriser leur cicatrisation. Grâce aux renseignements extraits du DPI et en se référant à notre grille d’audit, nous avons constaté que les 2 indications de pose initialement « inconnues » et la seule indication initialement « autre » sont liées à l’incontinence.

Nous avons remarqué que 2 indications ne sont plus adaptées au contexte de gériatrie 

« Surveillance des entrées et des sorties aux soins intensifs ». Pour comprendre cela, nous avons confronté ces données avec les données révélées dans le dossier patient informatisé (DPI) et de notre grille d’audit.  L’explication est que ces sondes ont été initialement placées aux soins intensifs pour un suivi correct de la diurèse dans le cadre d’incontinence urinaire et elles sont restées en place malgré la fin d’indication, probablement pour le confort du patient. Au total (figure 7), 35.7% (5/14) des SVD sont placées en gériatrie dans un contexte non justifié d’incontinence et 21.4% (3/14) des indications de pose cumulent à la fois incontinence avec d’autres indications justifiées. D’où l’importance de toujours vérifier la présence d’autres alternatives à la mise en place d’une sonde et la nécessité de respecter les indications de pose décrites par le CSS (2019) et le CDC (2019).  Nous avons de ce fait pu confirmer qu’un total de 41.6% (10/24) des SVD présentes dans les 2 services concernés n’avaient plus aucune indication, et n’étaient donc plus nécessaires, d’où l’intérêt d’une évaluation journalière de la nécessité de garder la sonde.

Notons aussi que la durée de SVD a dépassé les 6 jours chez 57% des patients en gériatrie et chez 43% de ceux présents aux soins intensifs. Cette observation est importante car la durée de sondage est un élément décisif pour la prévention du risque infectieux.

Les sondes pouvant avoir différentes charrières (ou calibres) et différents matériaux, le choix de la charrière sera fait en fonction de la couleur des urines et de l’âge des patients. La matière de la sonde est fondamentale. En effet, les sondes peuvent être en silicone ou en latex. Les sondes en latex sont à usage de courte durée (de moins de 7 jours) et les sondes siliconées pour une utilisation prolongée n’excédant pas 3 mois. 

Il a été observé lors de l’audit que le choix de la charrière est adapté dans 100% des cas (24/24) tandis que le choix du matériel (sonde latex) est inadapté dans presque la moitié des cas 43.83% (11/24). Ce résultat est interpellant car outre le risque d’allergie potentiellement sévère, les sondes latex sont irritantes pour les muqueuses, favorisent la formation de dépôts biologiques et donc augmentent le risque des infections urinaires.

Figure 9 : Fixation de la sonde

 

 

 

 

 

Il est aussi important de préciser que plusieurs publications insistent sur le fait que la sonde doit être fixée afin d’améliorer l’écoulement des urines et prévenir les traumatismes de l’urètre et par conséquent d’éviter les infections. On observe encore toujours des manquements à cette pratique. Les résultats de nos observations sont très décevants car au total 75% des sondés n’ont pas été fixées.

Figure 10 : Sac collecteur et tubulure de drainage

 

 

 

 

 

Concernant le positionnement  du sac collecteur et de la tubulure de drainage, 3 conclusions :

• Les pratiques adoptées aux soins intensifs sont meilleures que celles observées en gériatrie ;
• Les résultats sont cependant médiocres dans les 2 unités pour les raisons suivantes :  
o 28.6% (4/14) des sacs n’étaient pas en position déclive en gériatrie, contre 11.11% (1/9) aux soins intensifs ;
o 50% (7/14) des sacs de drainage en gériatrie étaient suspendus au lit contre 60% (6/10) aux soins intensifs ;
o 92.9% (13/14) des robinets de vidange n’étaient pas protégés en gériatrie contre 60% (6/10) aux soins intensifs ;
o Dans 71.4% (10/14) des cas, la tubulure de drainage était coudée en gériatrie contre 70% (7/10) aux soins intensifs ;

• La dernière conclusion dans les 2 unités est que dans 100% (14/14 ; 10/10) des cas, le sac n’était pas rempli à 2/3.

Concernant l’évaluation de la compliance des soignants aux recommandations, les audits de processus ont montré les pratiques utilisées avant, durant et après la pose. 

En conclusion, les audits montrent des résultats relativement satisfaisant. Les pratiques professionnelles du personnel soignant sont dans la moyenne (score médian 17/23). 

C. Connaissances théoriques des infirmières

Le taux de participation au questionnaire était de l’ordre de 50% (N= 37, n= 75). Il nous semble que ce résultat pourrait être amélioré et ceci illustre l’intérêt de sensibiliser les soignants à l’amélioration continue des soins apportés aux patients.

Figure 11 : Caractéristiques sociodémographiques des personnes interviewées

 

 

 

 

Les éléments les plus importants du questionnaire, présentés ci-dessous nous interrogent. 

• Plus de la moitié des répondants ignorent l’existence d’une procédure interne concernant la prévention du risque
infectieux lié au placement d’une SVD, ceci malgré plusieurs actions mises en place par l’équipe de prévention et contrôle des infections, la présence d’une bibliothèque interne en ligne (ENNOV) facilement accessible. Ce résultat pose des questions d’ordre organisationnel et en matière de communication qui méritent d’être reconsidérées dans une démarche d’amélioration continue. 

• Notre échantillonnage d’infirmières possède globalement de bonnes connaissances théoriques en lien avec les mesures préventives avant, pendant et après la pose de SVD, avec une moyenne de 17,24 points sur 23, une médiane de 17 points sur 23, Plage (min max) : 11 – 23 points. 

En comparant la moyenne obtenue de chaque échantillon (Gériatrie : 16.81 ; SI : 17.57), nous pouvons conclure qu’il n’y a pas une grande différence entre les deux services. Cependant il est difficile d’expliquer certaines observations des audits avec les réponses au questionnaire. Des différences de pratiques (choix du matériel, fixation de la sonde, sac en position déclive, durée de sondage…) nettement plus favorables aux SI qu’en gériatrie.  

Le niveau des connaissances des infirmières de notre échantillon en matière de mesures préventives semble inférieur « avant la pose » par comparaison à leurs connaissances dans les 2 autres catégories (« pendant » et « après la pose »). En effet, plus de la moitié des répondants (54.1%) ignorent que d’autres alternatives (EXP. KT intermittent) existent en cas d’affection vésicale neurogène et 21.6% ne savent pas que l’étui pénien peut être utilisé pour le suivi du débit urinaire chez l’homme. Même constat sur le choix du matériel. En effet, seulement 45.9% des répondants savent qu’une sonde en latex ne doit pas rester plus de 7 jours. Seulement 10.8% des infirmières interviewées optent pour un choix correct de charrière. 

Certaines connaissances liées aux mesures préventives à « la pose » et « après la pose » (figures 10 et 12) nécessitent des mises à jour. En effet, 75.5% des répondants ignorent que la désinfection du méat avec un antiseptique aqueux n’est plus nécessaire et qu’un nettoyage du méat à l’eau stérile est suffisant. De plus, 40% des soignants ignorent la nécessité de garder lors du transport du patient le sac de drainage en position déclive après l’avoir vidé. Ces résultats montrent que le personnel soignant adopte dans ses pratiques de soins actuelles des anciennes habitudes acquises à l’école ou en groupe (au sein de l’équipe). C’est pour cette raison que la mise à jour des connaissances des infirmières est primordiale dans un programme de prévention
afin qu’elles puissent utiliser ces nouvelles connaissances basées sur la recherche et les données probantes et afin d’améliorer ainsi leurs pratiques quotidiennes.

Conclusion

Après avoir analysé et discuté les résultats de nos audits, de notre questionnaire et des données fournies par le laboratoire de microbiologie, nous avons pu définir des perspectives d’amélioration à savoir des stratégies axées sur les ressources humaines, sur le matériel de soins et sur l’informatique (DPI).

La crise sanitaire liée au SARS-COV-19 en 2020 a entraîné des changements radicaux dans nos comportements et habitudes sociales et le fonctionnement des hôpitaux n’a pas été épargné lui non plus. En particulier, les équipes PCI et les services de première ligne ont dû faire face à ce nouveau virus qui constituait une menace pour  la santé publique. Après deux ans de cette pandémie   de cette pandémie, l’équipe PCI de HIS a repris en main début 2022 d’autres missions qui font partie intégrante de ses multiples responsabilités dont la prévention des IAS. Dans ce sens, nous avons accordé, dans notre plan d’action annuel, une attention particulière à la prévention des IUN liées au SVD qui constituent des événements indésirables et peuvent être évités dans environ 30% des cas (KCE, 2008).

Afin de répondre à nos objectifs, nous avons réalisé une étude quantitative descriptive aux SI et en gériatrie. Cette étude s’inscrit dans le cadre d’une démarche d’amélioration continue basée sur le plan PDCA (plan, do, check, act). Cette démarche nous a permis de dresser un état des lieux de la situation actuelle au sein de HIS et d’élaborer un plan d’amélioration qui répond mieux aux risques identifiés et à la population étudiée.

Les résultats de notre étude montrent un écart important entre les connaissances théoriques qui sont relativement bonnes (score médian 17/23) et les pratiques professionnelles du personnel infirmier des HIS qui mettent en lumière de multiples lacunes (indications de pose de SVD, type de matériel utilisé, durée de SVD, alternatives au SVD, certaines mesures concernant la surveillance du système de drainage : sac, type de sonde, tubulure…). Pour mieux expliquer cet écart, l’étude doit être complétée par une démarche qualitative qui nous aidera à comprendre le vécu des soignants et les obstacles qui les empêchent de respecter les recommandations.

Devant ces résultats, certaines actions devront être entreprises. Notre stratégie est basée sur trois axes : humain, informatique et matériel. Nous citons à titre d’exemples: des activités de sensibilisation, d’innovation en matière de formation, de collaboration multidisciplinaire (cadres de santé, médecins, infectiologues, microbiologistes, pharmacie, services informatique et logistique) de renforcer le rôle des référents dans les unités, de créer un programme local de surveillance des IUN, et d’impliquer la direction dans ce processus afin de renforcer le climat de sécurité et qualité  en déclarant ces infections. Si la prévention des IAS (et précisément dans notre étude les IUN sur SVD) concerne tous les acteurs à l’hôpital, le patient aura aussi un rôle important à jouer.

Mais, la question qui se pose est comment inclure et impliquer nos patients afin de réduire ce type d’infection tout comme comment les accompagner au mieux vers l’empowerment.

Plusieurs limites sont apparues au cours de ce travail et méritent d’être soulignées. Dès lors, nous devons nous interroger pour savoir si notre échantillon reflète correctement la population étudiée étant donné que le taux de participation au questionnaire est de l’ordre de 50% et que les résultats des pratiques professionnelles sont moins bons.

Finalement, il reste que, dans l’optique d’une démarche qualité, le cycle d’amélioration est sans cesse continu et revisité. Une culture d’entreprise orientée vers la qualité et la sécurité des soins se veut innovante et doit se fixer des nouveaux objectifs en fonction des nouveaux résultats, voire de nouveaux défis. Pour cela, nous tenons à effectuer une nouvelle période d’audit dans trois mois afin de revoir la situation et les actions menées.

Bibliographie

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3. CDC. Device Associated Module on UTI. Urinary Tract Infection (Catheter-Associated Urinary Tract Infection [CAUTI] and Non-Catheter-Associated Urinary Tract Infection [UTI]) and Other Urinary System Infection [USI]) Events. 2019. Available at: https://www.cdc.gov/nhsn/pdfs/pscManual/7pscCauticurrent. PDF, Consulté en ligne le 3 avril 2022.

4. Organisation mondiale de la Santé (OMS) . Lignes directrices sur les principales composantes des programmes de prévention et de contrôle des infections au niveau national et au niveau des établissements de soins de courte durée. World Health Organization. 2017. Disponible à https://apps.who.int/iris/handle/10665/272850. PDF, consulté le 14 avril 2022.

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6. Espinassea F, Page B, Cottard-Boullea B, Risques infectieux associés aux dispositifs médicaux invasifs, Revue francophone des laboratoires, novembre 2010 – N°426, P 51-59. 

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