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Quel impact de la pandémie de COVID-19 sur l’incidence des infections nosocomiales à l’UZA ?

Frank Van Laer - Équipe d’hygiène hospitalière, UZA Hilde Jansens - Équipe d’hygiène hospitalière, UZA Frank Van Laer, Elise Van Cauwenberg, Hilde Jansens - Équipe d’hygiène hospitalière, UZA

Introduction 

Suite à plusieurs publications récentes ayant rapporté une diminution de l’incidence de différents types d’infections nosocomiales pendant la pandémie de COVID-19 (1,2), nous avons également voulu vérifier si cette pandémie avait eu un impact similaire sur les infections nosocomiales au niveau de l’UZA. Les résultats de cette petite analyse sont décrits ci-après.

Matériel et méthodes 

Au départ d’une base de données existantes, les incidences des infections nosocomiales suivantes ont été calculées : bactéries multi-résistantes aux antibiotiques (MDRO) incluant Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM), VRE (entérocoques résistant à la vancomycine), bactéries à gram-négatif productrices de carbapénémases (CP) incluant les entérobactéries mais également Pseudomonas aeruginosa, infections entériques à Clostridium difficile, bactériémies associées aux cathéters centraux (CLABSI) et infections urinaires associées aux cathéters (CAUTI). Ces calculs ont été effectués sur deux périodes distinctes, à savoir de janvier 2018 à février 2020 inclus (période pré-COVID-19) et de mars à novembre 2020 inclus (pendant la période de COVID-19). 

Résultats 

 Pendant la période de COVID-19, nous avons enregistré une baisse notable de l’incidence des SARM ( -31 %), des CLABSI
( -25 %) et des CAUTI (- 13 %), et une diminution plus limitée des infections à Clostridium difficile (- 8 %). Par contre, l’incidence des VRE et des CP a a fortement augmenté, de respectivement 49 et 42 % (Figure 1).

Figure 1: comparaison des taux d’incidence des infections nosocomiales pendant la période pré-COVID-19 et la période de COVID-19.

 

Discussion

Pendant la pandémie de COVID-19, les incidences de plusieurs infections nosocomiales ont diminué au sein de l’UZA. Il est possible que cette diminution soit liée au renforcement des mesures d’hygiène appliquées pendant cette pandémie. Le port généralisé du masque chirurgical par le personnel et par les patients hospitalisés a été introduit et la mise à disposition de gel hydroalcoolique a été intensifiée pendant la période de pandémie de COVID-19. Ainsi, la figure 2 montre que le nombre de moments d’hygiène des mains, calculé sur la base de la consommation de gel hydroalcoolique a fortement augmenté pendant la période de COVID-19. En ce qui concerne les CAUTI, d’autres causes que le seul renforcement des mesures d’hygiène pourraient expliquer la diminution des taux d’incidence rapportés. En 2019, nous avons en effet lancé une nouvelle stratégie  pour l’attache des sondes urinaires, et celle-ci a été déployée dans tout l’hôpital au début de l’année 2020.

Figure 2 : Nombre de moments d’hygiène des mains par trimestre

 

 

 

 

 

 

 

L’augmentation de l’incidence des colonisations et infections à VRE et à CP contraste avec les autres donnnées. Après analyse de la consommation d’antibiotiques, une consommation accrue d’antibiotiques a pu être exclue (données non rapportées). 

Le regroupement en cohorte des patients atteints de la COVID-19 et le non-respect systématique des précautions standard ou du changement de gants entre les soins de patients, pourraient être la cause de contaminations croisées. Ainsi, Farfour et al. (3) ont rapporté une épidémie de CP dans un grand hôpital Parisien (3) liée à notamment l’usage erroné d’équipements de protection individuelle. Suite à un nombre accru de patients infectés/colonisés par une souche de Pseudomonas aeruginosa multirésistante et productrice de carbapénémase de type VIM (métallo-beta-lactamase) dans la cohorte de patients COVID hospitalisés en unité de soins intensifs à l’UZA, plusieurs mesures complémentaires ont été introduites, entre autres le port d’une blouse de protection recouvrant les EPI et devant être changée entre chaque patient. L’accent a également été mis sur l’importance du changement systématique des gants entre les soins des patients. Ces mesures sont désormais appliquées lors des soins, chez tout patient avec COVID-19 que celui-ci soit ou pas mis en isolement complémentaire à cause d’un portage ou d’une infection par un MDRO. 

Plusieurs facteurs liés à la pandémie de COVID-19 peuvent soit jouer un rôle favorisant la transmission de MDRO (par exemple l’usage incorrect des EPI), mais aussi les limiter (par ex. l’utilisation généralisée des masques chirurgicaux) (4,5). Ces facteurs expliquent probablement en partie les résultats divergents d‘incidence des infections nosocomiales observées à l’UZA pendant la pandémie. Il est possible que le port d’un masque ait pu ainsi davantage limiter la propagation de SARM que celle des VRE et CP, étant donné que le SARM colonise surtout le nez.

La hausse de l’incidence observée pour les VRE doit cependant être nuancée, étant donné qu’il s’agit ici pour chacune des périodes d’un faible nombre d’infections/ colonisations (en chiffres absolus, 9 cas avant et 4 cas pendant la période de COVID-19).  

Conclusion

L’impact favorable de la pandémie de COVID 19 sur l’incidence des infections nosocomiales, qui a été rapporté dans plusieurs publications, ne semblet être observé que pour certaines infections nosocomiales à l’UZA. Les normes d’hygiène accrues n’ont cependant pas eu d’impact favorable sur l’incidence de certaines MDRO (CP et VRE). Il est possible que la hausse de ces MDRO soit due à l’utilisation erronée d’EPI et/ou au non-respect systématique de l’application des précautions standard et de contact.

Références

1. Cole J, Barnard E. The impact of the COVID-19 pandemic on healthcare acquired infections with multidrug resistant organisms. American Journal of Infection Control 000 (2020) 1−2 (article in press).

2. Wee LEI, Conceicao EP, Tan JY. Unintended consequences of infection prevention and control measures during COVID-19 pandemic. American Journal of Infection Control 000 (2020) 1−9 (article in press).

3. Farfour E, Lecuru M, Dortet L et al. Carbapenemase-producing Enterobacterales outbreak: Another dark side of COVID-19. American Journal of Infection Control 48 (2020) 1533−1536.

4. Harbarth S. COVID-19 and antimicrobial resistance: Are there any unknowns that will become known? This Viewpoint was originally published on the REVIVE website revive.gardp.org, an activity of the Global Antibiotic Research & Development Partnership (GARDP).

5. Donà D, Di Chiara C, Sharland M. Multi-drug-resistant infections in the COVID-19 era: a framework for considering the potential impact (Letter to the Editor). Journal of Hospital Infection 106 (2020) 198e199.

 

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